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Retard diagnostic

Alzheimer: le diagnostic est trop tardif, à un stade où les médicaments ne peuvent plus être efficaces

Par Dr Philippe Montereau

Les premières atteintes du cerveau lors de la maladie d’Alzheimer se développeraient encore plus tôt que ce que l'on pensait. Les lésions que l'on diagnostique actuellement sont trop tardives. C'est ce qui explique l'échec des traitements actuels.

tampatra/Stock

Chaque année, en France, 225 000 nouveaux cas de maladie d'Alzheimer sont pourtant diagnostiqués. Pourtant, il n’existe toujours pas de traitement contre la maladie d’Alzheimer. Mais la raison en est assez simple: le diagnostic est trop tardif. La maladie commencerait, en effet, beaucoup plus tôt que ce que l'on pensait. Il faudrait traiter la maladie d’Alzheimer encore plus en amont que ce qui se fait actuellement.

C’est ce qu'avait montré étude publiée dans The Journal of Neuroscience. Actuellement, traiter la maladie d'Alzheimer, c'est comme traiter une arthrose : il est trop tard pour la guérir, les lésions sont installées. On ne peut faire que du traitement palliatif pour essayer de la ralentir car on ne peut pas mettre de "prothèse de cerveau".

Plaques amyloïdes

Pour bien comprendre l’enjeu du diagnostic précoce, rappelons que la protéine bêta-amyloïde est le composant principal des plaques amyloïdes, un agrégat protéique que l'on retrouve autour des neurones de personnes développant certaines maladies neurodégénératives, dont la maladie d’Alzheimer. Le présence de plaques amyloïdes diminuerait notamment la communication entre les neurones.

Partant de ce postulat, les approches actuelles de détection précoce de la maladie d'Alzheimer reposent sur la classification des individus comme "positifs" ou "négatifs" en fonction de la normalité de ce biomarqueur (et d'autres du même genre). Si il est anormal, les dernières thérapies visent à essayer de dissoudre les plaques amyloïdes, sans succès.

Nécessité d'une intervention précoce

Selon l'étude publiée dans The Journal of Neuroscience, une des causes de cet échec serait que la médecine interviendrait encore trop tardivement. Les chercheurs viennent de démontrer que l'accumulation de la protéine bêta-amyloïde commence très lentement, des années avant que les biomarqueurs ne deviennent anormaux.

Ces résultats confirment ainsi la nécessité d'une intervention précoce contre la maladie d’Alzheimer, et ce même chez les personnes ayant été classées comme "négatif"... mais à un stade où l'on n'a pas encore de marquer diagnostique validé.

Un test sanguin pour diagnostiquer Alzheimer 15 ans avant ?

Début avril, des chercheurs ont mis au point un nouveau test sanguin qui pourrait permettre de dépister des protéines anormales circulant dans le sang au tout début du processus pathologique et jusqu'à 15 à 20 ans avant le diagnostic habituel. Aujourd’hui, les outils de détection de la maladie d’Alzheimer se limitent à des examens coûteux ou invasifs, et surtout, trop tardifs : la tomographie par émission de positrons (TEP) et la ponction de liquide céphalo-rachidien.

La mise au point d’un biomarqueur sanguin peu invasif pour le dépistage des stades précliniques s’avére donc cruciale. Ce nouveau biomarqueur plasmatique permettrait l’identification précoce de la maladie d’Alzheimer avec une sensibilité de 71% et une spécifique de 91%. Il pourrait également permettre d’identifier les personnes à risque de développer une maladie d’Alzheimer, de présélectionner les individus devant subir une ponction lombaire ou une analyse par TEP, et d’éliminer les sujets faussement positifs.

Rejoignez les cohortes de recherche

Nous avons peut-être des médicaments efficaces, mais faute de les avoir utilisés assez tôt, nous ne le savons pas. Vous avez peut être les premières anomalies qui vont conduire à l’installation des lésions d’Alzheimer, mais faute de l’avoir recherché, vous ne le savez pas. Par contre, vous pouvez aider la recherche.

Si vous êtes âgé de plus de 60 ans, si vous vous plaignez de troubles de la mémoire, rejoignez les cohortes de malades à un stade précoce qui sont en train de se mettre en place, comme celle de l’Institut de la mémoire et de la maladie d'Alzheimer (IM2A) de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière, à Paris. Il s'agit de suivre de près un grand nombre de personnes qui ne sont pas malades pendant plusieurs années et de les surveiller avec des examens sanguins et d'IRM de pointe. De plus, les personnes qui ont des facteurs de risque de maladie d'Alzheimer (antécédents familiaux multiples, anomalie génétique...) recevront "en avant première", les médicaments potentiellement efficaces.