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Prévention

Une redoutable bactérie se propage dans les hôpitaux : quel risque pour notre santé ?

Par Charlotte Arce avec Anaïs Col

Certaines souches de la bactérie Staphylococcus epidermidis sont devenues résistantes aux antibiotiques couramment utilisés dans les hôpitaux, ce qui pourrait provoquer de nouvelles infections incurables. Des scientifiques s'alarment.

AlexRaths /istock

Naturellement présente sur la peau et les muqueuses des êtres humains et des animaux, la bactérie Staphylococcus epidermidis est un staphylocoque blanc responsable de maladies ou d'infections cutanées, nasales (sinusites) ou urinaires, et qui touche plus facilement les personnes dont le système immunitaire est compromis.

Particulièrement présente dans les hôpitaux, elle se fixe sur le matériel et menace des patients équipés par exemple de cathéters ou de prothèses. Les colonies de S. epidermidis sont, en général, petites, blanches ou beiges, et ont un diamètre d’environ 1 à 2 mm après une incubation d’une nuit.

Staphylococcus epidermidis, "un formidable pathogène nosocomial"

S. epidermidis était déjà résistante à une grande variété d'antibiotiques, comme la pénicilline et la méticilline. Mais sa force s'est tellement décuplée, que des chercheurs australiens alertent aujourd'hui sur les dangers de ce micro-organisme dans la revue Nature Microbiology. "Staphylococcus epidermidis est devenu un formidable pathogène nosocomial", expliquent-ils. "En utilisant la génomique, nous avons révélé que trois lignées de Staphylococcus epidermidis multirésistantes et adaptées à l'hôpital ont émergé au cours des dernières décennies et se sont répandues à l'échelle mondiale".

Quel est le risque pour notre santé ?

D'après les scientifiques, certaines souches de Staphylococcus epidermidis ont légèrement modifié leur ADN, afin de mieux résister à des antibiotiques couramment utilisés dans les hôpitaux (rifampicine, glycopeptidiques, vancomycine, teicoplanine). Ils ont découvert trois variantes de cette bactérie multirésistante dans des échantillons provenant de 96 établissements de 24 pays, incluant des souches d'Europe.

"Nous avons commencé avec des échantillons en Australie", puis nous avons obtenu, avec d'autres prélèvements, un "aperçu global et constaté que la bactérie est présente dans de nombreux pays et de nombreuses institutions à travers le monde", explique Ben Howden, directeur de l'Unité de diagnostic microbiologique du Laboratoire de santé publique de l'Institut Doherty de l'université de Melbourne. De ce fait, Staphylococcus epidermidis pourrait causer des infections ou des maladies potentiellement incurables.

Les infections nosocomiales en France

Les infections nosocomiales restent encore aujourd’hui un enjeu de santé publique. Environ 750 000 patients en contractent une lors d'un passage en bloc opératoire (ils étaient 16% en 2017). Pourtant, selon un sondage IPSOS réalisé pour Johnson & Johnson Medical Devices, en partenariat avec la Société Française d’Hygiène Hospitalière (SC2H), deux Français sur trois s'estiment mal informés.

D’après les résultats, plus de 9 Français sur 10 connaissent le nom des infections post-opératoires. Néanmoins, seul un Français sur 3 interrogé a une estimation juste de la fréquence des infections du site opératoire (ISO), établie entre 0 et 5%, alors qu’elles ont tendance à être surestimées. Ce résultat indique que seules 28% des personnes interrogées s’estiment bien informées au sujet de ces infections post-opératoires.

Peut-on se retourner contre l'hôpital en cas d'infection nosocomiale ?

Afin d’espérer une indemnisation, il convient de suivre une procédure stricte. "La première chose à faire est de demander une copie de son dossier médical intégral", nous explique Me Julé-Parade. "Cela comprend les comptes-rendus d’hospitalisation, opératoires, d’examens, ainsi que l’ensemble des fiches de suivi. C’est très important car c’est par rapport aux prélèvements biologiques, ou encore par rapport à la courbe de température que l’on va pouvoir fixer une date de contamination."

La deuxième étape consiste à se rapprocher d’une association ou d’un avocat qui pourra aider le patient à s’orienter dans ses démarches. "Il faut ensuite tenter d’obtenir réparation : cela va passer par une expertise. Un expert va devoir se prononcer sur la date et l’origine de l’infection nosocomiale, ainsi que sur ses conséquences. À partir de tous ces éléments, va s’imposer au centre de soins une obligation indemnitaire ou non."

À noter qu’en cas de dommage grave résultant de l’infection nosocomiale et entraînant une Atteinte Permanente à l’Intégrité Physique et Psychique (AIPP) supérieure à 25%, c’est l’Office National d’Indemnisation des Accidents Médicaux (ONIAM) qui indemnise la victime au titre de la solidarité nationale. "Cela veut donc dire que la responsabilité des établissements est engagée pour les cas d’infections contractées lors de séjours en leur sein pour des cas de moyenne importance".

Comment obtenir réparation ?

En France, nous explique Me Julé-Parade, prévaut le principe de la réparation intégrale : cela signifie que le responsable du préjudice doit indemniser tout le dommage et uniquement le dommage, sans qu’il en résulte ni appauvrissement, ni enrichissement de la victime. Or, insiste le spécialiste, "les gens ne pensent pas toujours à garder tous les justificatifs des frais de santé divers qu’ils ont engagés suite à l’infection : des soins extérieurs à l’hôpital qui n’ont pas été pris totalement en charge, mais aussi les frais de déplacement, les arrêts de travail… D’où l’importance de conserver tous ces justificatifs."

Dans l’hypothèse où l’établissement de soins ne contesterait pas sa responsabilité, il convient aussi d’être "particulièrement vigilant sur les termes de l’expertise quant aux conclusions, ainsi qu’au montant proposé par l’assureur, l’hôpital ou l’ONIAM est bien conforme à ce que la jurisprudence alloue", conseille l’avocat.