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Diabète

Les jeunes diplômés malades de la précarité

Par Bruno Martrette

Une enquête menée en Languedoc démontre une fois de plus la responsabilité de la précarité dans la progression du diabète. Les nouveaux précaires sont des jeunes souvent éduqués.

BAZIZ CHIBANE/SIPA

Plusieurs publications ont déjà rapporté une prévalence ou une incidence accrue du diabète chez les sujets vivant dans des conditions précaires. Mais cette précarité semble changer de visage, elle ne rime plus avec marginalité. D'après une enquête menée en Languedoc-Roussillon par l'Académie de médecine et la Mutualité Française sur précarité et diabète, la pauvreté toucherait une nouvelle population: plus jeune, et avec un bon niveau d'étude. Et donc plus exposée au diabète. 

Le tabac, une alimentation déstructurée entraînant de nombreuses carences, le manque d'actitivté sportive, ces nouveaux précaires négligent leur hygiène de vie et accumulent les facteurs de risque. Les conditions de vie socio-économiques difficiles expliquent leurs carences alimentaires (protéines animales, laitages, fruits, légumes verts), une surconsommation de féculents et de sodas sucrés, un recours fréquent aux fast-food sont le lot quotidien de nombreux jeunes.

Le choix du Languedoc se justifiait par le taux élevé de pauvreté dans cette région (11,7% contre 8% pour la population nationale). Les sujets les plus précaires ont été vus dans les quatre centres de Montpellier où se trouvaient les individus les plus jeunes. (Croix rouge, Conseil général, Médecins du monde, Samu social).

Autre constat de cette étude: le niveau d'éducation. Le diplôme n'est plus un rempart contre la pauvreté. 26,6% des sujets très précaires sortent du collège et 15,7 % ont suivi un cursus universitaire. Les jeunes diplômés sont parmi les premiers touchés par l'aggravation du chômage et l'augmentation du travail précaire. Et ils ne rentrent pas non plus dans les cases définies pour recevoir les aides consenties par ailleurs aux bénéficiaires de la Couverture Maladie Universelle (CMU) et de l'Aide Médicale d'Etat. Du coup, ils boudent les visites chez le médecin ou le dentiste.

L'enquête révèle en outre que la maladie est souvent dépistée de façon trop tardive. Conséquence, le prédiabète dégénère en diabète chronique longtemps ignoré en l’absence de dépistage systématique. Une maladie fréquente (un adulte sur six), mais silencieuse (rarement des symptômes caractéristiques) et insidieuse (10 ans en moyenne d'évolution).
Mais comment savoir si l'on est prédiabétique? Pour le Pr Claude Jaffiol, endocrinologue, membre de l'Académie nationale de médecine, qui a travaillé sur cette enquête, des alertes existent. 

-une prise de poids importante et anormale, surtout au niveau du ventre;
-des antécédents de diabète lors des grossesses et la mise au monde d'un enfant trop gros;                         
-une tension artérielle trop élevée;
-l'abus de tabac.

Pour l'Acédémie, il ne s'agit plus de faire des recommandations en forme de vœux pieux mais d'aller directement et concrètement au plus près de ces jeunes précaires. Pour la première fois, l'institution diffuse un guide opérationnel téléchargeable gratuitement sur internet avec des conseils pratiques à l'intention de ces jeunes précaires, de leur entourage, des associations, des bénévoles, des professionnels de santé et des réseaux de soins.