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Commission européenne

Perturbateurs endocriniens : Ségolène Royal s'oppose à Bruxelles

Par Marion Guérin

La Commission européenne soumet ce mercredi au vote un texte sur les perturbateurs endocriniens, inapte à protéger les citoyens.

monticello/epictura

C’est à désespérer. Ce mercredi, la Commission européenne doit présenter à Bruxelles un texte particulièrement important et attendu – depuis plus de trois ans, c’est dire. Il s’agit en effet de définir une liste de critères permettant de définir un perturbateur endocrinien, et, partant de là, de classer ces substances pour interdire les plus dangereuses.

Alors qu’une étude française a récemment montré la présence de perturbateurs endocriniens chez la totalité des femmes enceintes, l’attente citoyenne est très forte. Or, le texte préparé par la Commission Européenne est particulièrement en-deçà de ces espérances – c’est un euphémisme.

"Cadeau à l'industrie"

D’abord, la liste de critères retenue reste marquée par de profondes lacunes en matière de protection des populations. Cette liste avait déjà été présentée il y a quelques mois et prévoyait de n’inclure que les perturbateurs endocriniens (PE) aux effets toxiques avérés (et non soupçonnés) sur l’être humain.

Une définition qui fait fi de l’effet cocktail propre aux PE et, plus globalement, du principe de précaution qui prévalait dans les réglementations précédentes. Au final, selon les experts, le niveau de preuve exigé est tellement élevé qu’il serait presque impossible de prouver cette toxicité. Les associations avaient alors crié au scandale et la France, par la voix de Marisol Touraine et de Ségolène Royal, avaient demandé à la Commission de revoir sa copie.

Ce qu’elle a fait, dans un certain sens… mais au détriment de la santé des Européens. Non seulement l’instance a conservé cette définition, mais elle a également inclus un paragraphe, discret, en bas de page, autorisant une « dérogation » pour les pesticides. En effet, la plupart des pesticides perturbent le système hormonal des organismes visés – c’est même là leur principale fonction – mais aussi, potentiellement, des humains.

Or, seuls les pesticides qui ne sont pas des PE sont censés être autorisés, mais comme la liste des critères s’est fait attendre, les produits actuellement homologués échappent à cette règle.
Si la dérogation proposée par la Commission était adoptée, elle mettrait, pour la France, « au moins 8 700 tonnes de produits pesticides à l’abri d’une éventuelle interdiction pour leurs propriétés perturbateurs endocriniens », selon les calculs de Générations Futures, qui, dans un communiqué, dénonce un « cadeau à l’industrie ».

La Belgique pas d'accord

« Cette nouvelle possibilité de dérogation à l’interdiction de pesticides ou biocides perturbateurs endocriniens est à la fois scandaleuse et absurde », déclare ainsi François Veillerette, directeur de Générations futures. Scandaleuse car la Commission cède tout à l’industrie (…) Absurde, car à quoi peut bien rimer une législation censée interdire les perturbateurs endocriniens pesticides ou biocides … qui commence par mettre à l’abri (…) les produits ayant justement été conçus pour être des perturbateurs endocriniens ? »

Dans la foulée, le ministère français de l’Environnement a annoncé qu’il s’opposait au texte. « Ségolène Royal a demandé ce jour par courrier au président de la Commission européenne d’engager dès maintenant une réflexion globale pour la mise en place d’une classification des perturbateurs endocriniens ambitieux (qu’ils soient avérés, présumés ou suspectés) », peut-on lire dans un communiqué.
La Belgique a elle aussi annoncé qu’elle ne soutiendrait pas le texte. Si le ministre fédéral de l'Agriculture approuve les critères d’identification, il s’oppose en revanche aux dérogations.