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Essai préclinique chez le singe

Sida : déloger le virus pour le tuer

Par Audrey Vaugrente

Des macaques rhésus ont combattu efficacement le VIH grâce à une combinaison d’un vaccin et d’un stimulant immunitaire. 

DonyaNedomam/epictura

Le VIH donne du fil à retordre à la recherche. Depuis sa découverte, en 1981, le virus trouve de nouvelles manières d’échapper aux traitements. Cette ère est peut-être finie. Une équipe du Centre Médical Beth Israel Deaconess (Boston, Etats-Unis) a développé une approche efficace. Elle publie ses résultats concluants chez le singe dans la revue Nature (1).

36 macaques rhésus ont été infectés par le SIV, équivalent simiesque du VIH. Ces animaux ont ensuite reçu, pendant 6 mois, le traitement antirétroviral qui est habituellement prescrit pour combattre l’infection. « Les médicaments actuels, bien qu’ils permettent de survivre, ne guérissent pas du VIH. Ils le contrôlent », modère Dan Barouch, auteur de ces travaux. En effet, ils ne parviennent pas à atteindre les réservoirs viraux. Un traitement à vie est donc nécessaire.

"Kick and kill"

« L’objectif de l’étude était d’identifier un traitement curatif fonctionnel du VIH – pas d’éradiquer le virus mais de le contrôler sans avoir à recourir aux antirétroviraux », ajoute Dan Barouch. Objectif atteint, au moins en partie. Les singes ont été répartis en quatre groupes : ceux qui ont reçu deux vaccins expérimentaux, ceux qui ont pris un stimulant immunitaire (TLR-7). Le troisième groupe a testé une combinaison des deux approches. Le dernier a servi de contrôle.

La combinaison suit la stratégie « déloger et tuer » (kick and kill). Elle apporte un complément par rapport aux antirétroviraux. En effet, le vaccin apprend au corps comment se débarrasser du virus, en provoquant une réponse immunitaire spécifique. Or, le VIH a la capacité d’attaquer les cellules produites et d’en détruire une partie. Il reste dormant dans les autres. C’est ce qu’on appelle les réservoirs, qui ne sont pas atteints par les antirétroviraux. Le stimulant immunitaire résout ce problème : il réveille les copies dormantes du virus.

Le virus cède

Ce régime a été administré aux singes toutes les deux semaines pendant une durée de 10 semaines. Le traitement antirétroviral a ensuite été retiré. Les chercheurs ont observé l’évolution des animaux sur une période de deux ans. Les macaques traités avec la combinaison ont présenté une réaction marquée. En terme de nombre de cellules immunitaires générées et de localisations virales ciblées, l’impact est le plus fort. Non seulement la charge virale est réduite, mais en plus les réservoirs sont efficacement touchés.

Résultat : les singes n’ont pas connu de rebond immédiatement après l’arrêt des médicaments. Pour un tiers d’entre eux, la charge virale est restée indétectable. « Si la charge virale de l’ensemble des animaux avait été indétectable, ç’aurait été un home run, concède Dan Barouch. Mais le fait que tous les animaux aient présenté une réduction de la charge virale, et qu’elle soit indétectable dans un cas sur trois, fournit une première base solide. » Reste maintenant à reproduire ces résultats chez l’être humain. Si trois équipes sont dans les starting blocks, la course est loin d’être gagnée.

 


(1) Cette étude a été menée par le Centre Médical Beth Israel Deaconess en collaboration avec l’Institut de recherche militaire Walter Reed et deux laboratoires pharmaceutiques, Janssen et Gilead Sciences.