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Une prévalence importante

Violences conjugales : les pays nordiques ne montrent pas l'exemple

Par Caroline Delavault

Alors que l’égalité des sexes incarne une valeur fondamentale dans les pays nordiques, leur taux de violences faites aux femmes est plus élevé que dans d’autres pays européens. 

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Les apparences sont parfois trompeuses. En matière d'égalité hommes-femmes, les pays nordiques en sont les plus soucieux. Dans le dernier rapport annuel du Forum économique mondial, publié en novembre dernier, ils restaient les meilleurs élèves quant à l’égalité des sexes - tant dans le milieu professionnel que privé. L’Islande, la Norvège, la Finlande et la Suède, occupaient les quatre premières places du classement.

Cependant, dans une étude publiée dans la revue Social Science & Medecine, les sociologues de l’université de Valence (Espagne) mettent en évidence un paradoxe moderne. Dans ces pays nordiques, alors que l’égalité des sexes s’inscrit comme étant une valeur fondamentale, les taux de violences conjugales demeurent significativement plus élevés sur que chez leurs voisins européens. Une contraction complexe à déceler, que les auteurs espagnols surnomment « paradoxe nordique ». La théorie selon laquelle l’égalité hommes-femmes conduirait à la réduction des violences conjugales est donc remise en question. 

  

Prévalence plus élevée en Finlande

Le taux moyen de prévalence, fixé à 22 % par l’Union Européenne, atteint les 32 % au Danemark et 30 % en Finlande. Et pendant ce temps, les pays européens - à l’instar du Portugal, de l’Italie et de la Grèce - à qui on n’accorde pas volontiers le statut de garant de l’égalité des sexes, ont des niveaux significativement plus faibles de violences conjugales.
« Un taux élevé de prévalence aux violences conjugales, avec un niveau important d’égalité entre les sexes parait contradictoire, surtout dans les pays nordiques », s’étonne le Pr Enrique Gracia co-auteur de l’étude. Son rapport, étonnant, appelle à se pencher sur ce paradoxe moderne.

« Il est nécéssaire de comprendre pourquoi et comment l’égalité des sexes influe sur la violence. Si il existe un lien direct, il sera essentiel de l’étudier », poursuit-il. Un paradoxe qui révèle également l’omerta pesante autours des violences faites aux femmes. En effet, les taux moyens chiffrés par l’Union Européenne regroupent uniquement les plaintes déposées par les victimes, et les statistiques établies par des groupes de chercheurs. Les violences conjugales en huit clos, silencieuses, ne peuvent donc être appréhendées. 

 

Des chiffres contradictoires 

Pour expliquer ce phénomène contradictoire, les chercheurs évoquent la plus grande liberté de parole des femmes dans les pays nordiques. Car, qui dit égalité des sexes dit aussi liberté de parole. Quand elles sont victimes de violences, les femmes nordiques sont plus nombreuses et susceptibles à faire appel à la justice pour dénoncer les sévices subies, suggèrent les chercheurs.
Toutefois, les chiffres ne cessent de se contredire, ils sont donc à prendre avec la plus grande précaution. Dans une enquête, l’UE révélait que les femmes nordiques portaient moins plainte pour violences conjugales que les femmes d’autres pays européens. Un débat sans fin donc.

Néanmoins, les chercheurs de l’université de Valence tiennent à pousser leur investigation. Pour eux, « le paradoxe nordique peut fournir un moyen pour orienter de nouvelles recherches sur les violences conjugales ».