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A l'Assemblée nationale

Le tiers payant adopté dans la douleur

Par Bruno Martrette

Le projet de loi Santé a été voté ce mardi à l’Assemblée nationale. Malgré l’adoption du tiers payant généralisé, de nombreuses questions restent en suspens.  

WITT/SIPA

Plus d’un an après la présentation du projet en Conseil des ministres, la loi Santé a enfin été adoptée ce mardi. Lors d'un vote solennel, 296 députés ont voté pour et 243 contre. Mais loin de clore le chapitre, ce vote pourrait être le début d’une fronde d’ampleur entre les médecins libéraux et le ministère de la Santé. Avec un impact réel sur les patients. Pourquoidocteur vous donne les clés de compréhension du conflit.

Tout au long de la journée, les syndicats médicaux de libéraux ont réagi vivement. A coup de tweets ou de communiqués de presse, ils ont en effet rappelé que leur mobilisation n’était pas terminée. Manifestations, grèves des cabinets, ou encore désobéissance civile tout reste sur la table pour ces praticiens. 
Ces choix devraient être décidés dans quelques jours. Et dans leur viseur, toujours la même mesure, le tiers payant généralisé (dispense d'avance des frais médicaux) prévu pour 2017.

Un vote anachronique d'après les médecins

La Confédération des Syndicats Médicaux Français (CSMF), principal syndicat de médecins libéraux, a résumé la situation dans un tweet. Elle indique que « les députés se sont prononcés sur le tiers payant généralisé alors que les modalités d'application n'ont toujours pas été définies ». Une situation qu’elle qualifie d’ « ubuesque » .

Cette attaque concerne directement le dispositif technique que doivent mettre sur pied l'Assurance maladie et les complémentaires santé. Un dossier sur lequel les choses piétinent visiblement. Alors qu'initialement l’Assurance maladie devait remettre un rapport sur la question le 31 octobre à Marisol Touraine, la ministre de la Santé a dû concéder que les deux acteurs avaient pris « un peu de retard ». 
Une situation incompréhensible que le Dr Claude Leicher, président du syndicat MG France, explique par la bataille que se livrent les deux acteurs.

Ecoutez...
Claude Leicher, président de MG France : « Je parie aujourd'hui que nous allons retrouver la même bataille que l'Assurance maladie et les complémentaires santé se sont menées sur le tiers payant CMU...»

 

Dans cette bisbille, Marisol Touraine a tenté de camer le jeu. Un amendement de la loi Santé autorise, en effet, la remise du rapport de l'Assurance maladie un mois après la promulgation de la loi, c'est-à-dire courant janvier 2016.
 Les syndicat médicaux s'inquiètent de cette situation car ils n’ont pour le moment aucune information sur le dispositif. Pour cette raison, ils craignent un solution technique inapplicable.

Ecoutez...
Dr Claude Leicher : « Le danger est qu'ils risquent d'introduire dans nos cabinets tous les dysfonctionnements et les anamolies d'un dispositif que ne fonctionnerait pas correctement...»

 

La Mutualité Française se veut, elle, plus rassurante. Dans Le Parisien, la Fédération, qui regroupe les mutuelles de complémentaire santé, assurait ce mardi que ce n’était plus qu’une question de semaines pour trouver un dispositif technique fonctionnnel. 

Les médecins libéraux n'y croient plus. Les dernières données de l’Observatoire du tiers payant ne sont, il est vrai, pas rassurantes. Créé en novembre 2014 pour dénoncer les retards de paiement des actes en tiers payant, il a depuis analysé plus de 265 000 factures. Avec toujours le même constat, les délais conventionnels ne sont pas respectés dans plus de 50 % de ces factures. C'est pour les patients en Aide Médicale d'Etat (AME) que la situation serait la plus critique.

Ecoutez...
Dr Bertrand Legrand, fondateur de l'Observatoire du tiers payant : «  On se rend compte qu'il y a entre 10 et 15 % des factures qui sont payées au-delà de 20 jours...»