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Polynévrite : une atteinte des nerfs des bras et des jambes

Polynévrite : une atteinte des nerfs des bras et des jambes

Polynévrite : une atteinte des nerfs des bras et des jambes
© iStock-Brizmaker
Publié le 13.07.2022
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Polynévrite : une atteinte des nerfs des bras et des jambes : DIAGNOSTIC

Quand faut-il évoquer une polynévrite ?

Il faut suspecter une polyneuropathie symétrique distale en cas de sensations bizarres ou de déficits sensitifs diffus, prédominant initialement aux pieds et aux membres inférieurs et/ou de faiblesse musculaire sans augmentation des réflexes ostéotendineux.

Comment diagnostiquer une polynévrite ?

Le diagnostic de polyneuropathie distale et symétrique est habituellement simple grâce à l’analyse du type et de la répartition des troubles neurologiques à l'interrogatoire et à l'examen clinique qui permettent de retrouver les atteintes sensitives et motrices distales et symétriques. Cette précision de la diffusion du processus oriente d'emblée le diagnostic étiologique. L’interrogatoire peut également rechercher une polyneuropathie familiale.

Un examen électromyographique (EMG) doit toujours être pratiqué pour éliminer une atteinte proximale comme une radiculopathie (polyradiculonévrite) et classer les polyneuropathies en fonction de la structure atteinte (axone, myéline ou noyau), ce qui est déterminant pour trouver la cause (polynévrite axonale, démyélinisante ou neuronopathie). L’EMG permet également de préciser la gravité.

Un examen du liquide céphalorachidien peut apporter quelques indications, mais le médecin demandera surtout des examens biologiques de débrouillage à l’aide d’une prise de sang comprenant au minimum : NFS, VS-CRP, glycémie à jeun et 2 heures après le repas, ionogramme sanguin, bilan hépatique, hémostase, électrophorèse des immunoglobulines à la recherche d'une gammapathie monoclonale.

Des tests de laboratoire supplémentaires (dosage de la vitamine B12, voire de la vitamine B6 ou B1, test de tolérance au glucose électrophorèse des protéines sériques avec immunofixation, une mesure de la TSH, anticorps antinucléaires, plombémie, plomburie…) ne sont nécessaires que lorsque la cause reste incertaine ou en présence de résultats atypiques tels que l'asymétrie, la non-dépendance à la longueur, l'atteinte motrice, l'apparition aiguë ou subaiguë et l'atteinte autonome importante.

Il est particulièrement important pour les médecins d'identifier les causes potentiellement traitables de la polyneuropathie symétrique distale.

Quelles sont les maladies qui ressemblent aux polynévrites ?

La plupart de ces neuropathies présentent des caractéristiques atypiques, telles que l'asymétrie, la non-dépendance à la longueur (des membres), une atteinte motrice, une apparition aiguë ou subaiguë et une atteinte dysautonomique importante, ou des localisations moins courantes des lésions nerveuses, telles que les neuropathies diffuses, non dépendantes de la longueur, les mononeuropathies multiples, les plexopathies et les neuropathies radiculoplexes. Les neuropathies périphériques de ce groupe comprennent le syndrome de Guillain-Barré, la polyneuropathie démyélinisante inflammatoire chronique et la neuropathie démyélinisante associée à une paraprotéine, y compris le syndrome POEMS (polyneuropathie, organomégalie, endocrinopathie, gammapathie monoclonale et changements cutanés), la neuropathie motrice multifocale, la neuropathie vasculaire et l'amyotrophie diabétique.

Comment diagnostiquer une polynévrite liée à une atteinte de l’axone ?

Les polyneuropathies axonales « longueur-dépendantes » résultent d'une atteinte diffuse et symétrique intéressant les extrémités distales des fibres nerveuses les plus longues. Elles débutent donc, en distal, à l’extrémité des membres inférieurs, aux pieds. Lorsqu'elles atteignent les genoux, les manifestations peuvent toucher également les mains et lorsqu'elle atteint les coudes, la polynévrite touche alors les fibres de l'abdomen et du scalp (« atteinte en calotte »). Les troubles sensitifs initient souvent le tableau avec des fourmillements ou picotements (« paresthésies »), des brûlures (« dysesthésies »), qui sont permanents, diurnes et volontiers nocturnes. L'atteinte des grosses fibres myélinisées se traduit par des troubles de la sensibilité profonde. Au début, les troubles de la motricité provoquent des difficultés à la marche, une fatigabilité anormale. Secondairement, s'installent des déficits des muscles releveurs du pied avec un « steppage » (déficit symétrique des releveurs du pied). Il n'y a pas d'atteinte des muscles respiratoires ni des nerfs crâniens. Associés à ces troubles sensitivo-moteurs existent des troubles végétatifs (« dysautonomie ») qui sont liés à une atteinte des petites fibres amyéliniques et on peut observer une hypotension artérielle orthostatique, des troubles vésico-sphinctériens ou sexuels (impuissance), des troubles digestifs (diarrhée, constipation), une dépilation cutanée et troubles vaso-moteurs distaux. Leur présence évoque certaines causes telles que le diabète et l'amylose. L’examen clinique confirme l'atteinte symétrique, à prédominance distale, aux membres inférieurs : abolition des réflexes achilléens, déficit moteur affectant les releveurs du pied, amyotrophie, déficit sensitif qui peut être discret, atteinte végétative (peau et phanères, hypotension). La démarche pour rechercher la cause dépend de nombreux facteurs dont certains peuvent orienter comme l’âge, une atteinte chez l’enfant évoque une cause héréditaire), l’origine géographique (amylose familiale dont un foyer est au Portugal), le contexte de maladie générale (diabète, insuffisance rénale) ou de prise de médicament, et le mode d'installation déterminant (aigu, subaigu, chronique). Il faut rechercher une cause générale susceptible d'altérer la physiologie de l'axone : essentiellement les causes métaboliques et toxiques (dont les causes médicamenteuses), sans oublier l'amylose.

Le diabète est une des causes les plus fréquentes de neuropathie périphérique, pouvant atteindre 60 % chez les diabétiques anciens, surtout si le diabète est mal équilibré. Plusieurs mécanismes sont associés : facteurs vasculaires (augmentation de la perméabilité capillaire au niveau du nerf), facteurs métaboliques (sorbitol), facteurs inflammatoires (infiltrats de lymphocytes et de macrophages). Il existe un lien entre l'ancienneté de l'hyperglycémie et les neuropathies, qui apparaissent le plus souvent 5 à 10 ans après le début du diabète. La forme la plus souvent observée des neuropathies diabétiques est donc une polyneuropathie sensitivo-motrice distale, associée ou non à une atteinte dysautonomique. Survenant généralement chez des patients dont le diabète évolue depuis plus de 5 ans, le début en est généralement lentement progressif. Il s'agit au début d’engourdissements, de picotements et de brûlures (« paresthésies ») des pieds. L'examen révèle une disparition du réflexe achilléen et une baisse de la sensibilité (« hypoesthésie ») affectant la sensibilité à la chaleur et à la douleur (« sensibilité thermoalgique »), avec une répartition « en chaussettes », et plus tardivement une baisse de la sensibilité vibratoire. Les douleurs sont fréquentes (pieds et jambes), à type de constriction, de broiement avec allodynie au frottement à l'examen clinique. Les manifestations dysautonomiques dans les formes plus évoluées comportent des troubles cardiovasculaires (hypotension orthostatique, « cardiopathie autonome diabétique »), des troubles de la sphère digestive (constipation, douleurs abdominales, nausées, dysphagie, diarrhée et incontinence fécale), des troubles génito-urinaires (impuissance, atonie vésicale), des troubles de la motilité pupillaire et une anhydrose fréquente.

Parmi les causes médicamenteuses et toxiques de la polynévrite, les causes médicamenteuses sont les plus fréquentes. Il s'agit le plus souvent de polyneuropathies sensitives, parfois douloureuses. Les médicaments les plus souvent incriminées sont les anticancéreux cytostatiques (notamment la vincristine et les sels de platines (neuronopathies), la thalidomide (surveillance systématique), l'izoniazide, l'amiodarone, la nitrofurantoïne, les antirétroviraux, le disulfirame, la chloroquine, le métronidazole. L’électromyogramme est utilisé pour dépister les manifestations infracliniques, notamment pour permettre la poursuite de la thalidomide et des autres médicaments neurotoxiques. Les causes toxiques, plus rares, sont principalement d'origine industrielle (benzène) et peuvent se révéler de manière aiguë.

La polyneuropathie toxique alcoolique est la 2ème cause de polyneuropathie dans les pays industrialisés après le diabète : elle concernerait plus de 10 % des alcooliques chroniques. Elle est habituellement secondaire à la toxicité directe de l'alcool. L'association à une carence en thiamine (vitamine B1), avec ou sans carence en folates associée, est possible, à l’origine d'une expression à prédominance motrice de la neuropathie alors que la polynévrite alcoolique, si elle touche les fibres motrices, sensitives et végétatives, a traditionnellement une symptomatologie sensitive prédominante. S'installant de façon insidieuse et lentement progressive, la polyneuropathie liée à l'alcoolisme chronique se traduit au début par des paresthésies à type de fourmillements des pieds et « en chaussettes », des crampes nocturnes des mollets, une faiblesse motrice s'exprimant par une fatigabilité anormale à la marche. Après un certain temps d'évolution, le patient se plaint de douleurs en étau et surtout de brûlures avec paroxysmes, voire d'une hypersensibilité douloureuse (« hyperpathie »), surtout nocturne. Des troubles cutanés (dépilation, anhydrose, ongles cassants) sont fréquemment associés. L'examen clinique met en évidence une hypoesthésie symétrique, « en chaussettes », concernant les différentes sensibilités, moins marquée pour la sensibilité proprioceptive, avec une aréflexie calcanéenne, une amyotrophie et un déficit moteur prédominant sur les muscles de la loge antérolatérale de jambe. L’électromyogramme retrouve très tôt des anomalies de type axonale.

La polyneuropathie amyloïde (amylose héréditaire et primitive) est secondaire aux dépôts de substance amyloïde dans le nerf (préalbumine mutée au cours des amyloses héréditaires ou gammapathie monoclonale au cours des amyloses primitives). Elle doit être recherchée devant une polyneuropathie axonale chronique avec une riche expression dysautonomique, un syndrome du canal carpien et systématiquement en cas de contexte familial. Initialement marquées par un déficit de la sensibilité thermoalgique pouvant s'associer à des douleurs, les manifestations s'étendent ensuite aux membres supérieurs, au tronc avec des manifestations dysautonomiques. Le diagnostic est suggéré par le contexte familial (pas toujours présent) et est réalisé par la mise en évidence de la substance amyloïde dans la biopsie des glandes salivaires accessoires, la graisse abdominale, la biopsie anale ou la biopsie du nerf sensitif. Il est confirmé par le test génétique à la recherche d'une mutation sur le gène de la transthyrétine (préalbumine) : la plus fréquente est la mutation VAL/MET30.
Une mononeuropathie multiple est plus évocatrice de vascularite mais 20 à 30 % des vascularites prennent la forme clinique d'une polyneuropathie, même si le mécanisme est d’origine vasculaire (atteinte des petits vaisseaux des nerfs, les « vasa vasorum »). Lorsque la neuropathie est évoluée, l'asymétrie disparaît. Il importe de rechercher dans l'histoire clinique un début asymétrique aux membres inférieurs, avec atteinte du nerf fibulaire le plus souvent. Il s'agit d'une polyneuropathie plutôt subaiguë avec composante motrice et douloureuse. Le sida peut entraîner une polyneuropathie sensitive à la phase tardive de l'affection.
D'autres causes plus rares de polyneuropathies axonales sont possibles, telles que les dysthyroïdies.

Comment diagnostiquer une polynévrite liée à une atteinte de la gaine de myéline ?

Les polyneuropathies démyélinisantes sont moins fréquentes et la plus fréquente est la polyneuropathie à IgM monoclonale à activité anti-MAG qui survient chez les personnes de plus de 50 ans et est lentement progressive avec un début s’accompagnant de trouble de l’équilibre (« ataxie ») et d’un tremblement des mains, mais sans déficit moteur au début.

L’électromyogramme témoigne d’une polyneuropathie démyélinisante à prédominance distale et la prise de sang objective un pic d'IgM monoclonale à l’électrophorèse des protéines sériques dont le taux est faible, inférieur à 10 g/l (plus rarement supérieur à 10 g/l dans le cadre d'une maladie de Waldenström). La caractérisation de ce pic monoclonal retrouve un anticorps anti-MAG (Myelin-Associated Glycoprotein qui est constituant de la myéline).

À côté de la polyneuropathie à IgM monoclonale anti-MAG, mais à part, le «

syndrome POEMS

», qui est un acronyme en référence aux signes cliniques et biologiques cardinaux de cette affection (Polyneuropathy, Organomegaly, Endocrinopathy, Monoclonal plasma cell disorder, Skin Changes) : la neuropathie y prend généralement la forme clinique d'une polyradiculonévrite chronique. La cause en est un myélome ostéosclérosant ou mixte qui doit être recherché sur le rachis ou les diaphyses des os longs.

Certaines neuropathies héréditaires peuvent donner des polyneuropathgies démyélinisantes et elles sont dominées par les polyneuropathies sensitivo-motrices de Charcot-Marie-Tooth (CMT) : atrophie des mollets, pieds creux, atteinte sensitivo-motrice à prédominance motrice, avec peu ou pas de symptomatologie sensitive (« paresthésies »). L'évaluation diagnostique des patients soupçonnés d'être atteints de polyneuropathie de Charcot-Marie-Tooth évolue rapidement. Historiquement, les patients passaient un électromyogramme pour déterminer s'ils étaient atteints d'une variante démyélinisante (généralement CMT-1) ou axonale (généralement CMT-2). Les tests génétiques pour la maladie de CMT-1 produisaient des rendements élevés avec seulement quelques gènes testés. Les formes démyélinisantes autosomiques dominantes sont les mieux caractérisées et le diagnostic est porté par la recherche génétique d’une duplication du gène PMP22 sur le chromosome 17 dans les formes dominantes, anomalie du gène de la connexine 32 dans les formes liées à l'X. En revanche, les tests génétiques pour la maladie de CMT-2 nécessitaient de tester plusieurs gènes sans un rendement élevé de diagnostic. Cependant, les panels de séquençage de nouvelle génération et les approches de séquençage exomique et génomique complet deviennent rapidement moins coûteux, avec des rendements beaucoup plus élevés. Ces approches ont également le potentiel d'identifier de nouveaux gènes et de permettre une nouvelle analyse des variants à mesure que les informations bio informatiques deviennent plus robustes.

Comment diagnostiquer une polynévrite liée à une atteinte du noyau du neurone ?

Les polyneuropathies en rapport avec une atteinte du noyau des axones sont appelées les « neuronopathies sensitives ». Les neuronopathies sensitives correspondent à la dégénérescence du corps cellulaire des neurones sensitifs (dans la racine postérieure des nerfs spinaux). Elles sont caractérisées par des manifestations exclusivement sensitives, avec une atteinte typiquement asymétrique et non systématisée : elle concerne les quatre membres voire la face (25 % des cas) de manière synchrone ou asynchrone. L'ataxie est fréquente. L'aréflexie est diffuse et quasi constante. Les neuronopathies sensitives prédominent, soit sur les grosses fibres (ataxie), soit sur les petites fibres (troubles de la sensibilité thermoalgique). Elles ont le plus souvent un mécanisme dysimmunitaire. Le diagnostic est porté sur une atteinte sensitive pure clinique et une atteinte sensitive pure à l’électromyogramme : abolition diffuse des potentiels sensitifs sans anomalie des potentiels moteurs. L'analyse du liquide céphalorachidien par ponction lombaire montre une augmentation des protéines dans le liquide (« protéinorachie ») à plus de 1 g/l, une augmentation du nombre de cellules, qui évoque une origine paranéoplasique. La présence d'anticorps anti-Hu en immunologie est caractéristique d'un syndrome paranéoplasique.

Suivant les causes, leur évolution est chronique ou subaiguë. Les neuronopathies ont pour causes principales : le cancer du poumon à petites cellules dans le cadre d'un « syndrome paranéoplasique » (syndrome anti-Hu) : il convient de rechercher le cancer par les moyens les plus exhaustifs (scanner thoracique, biopsie, TEP-TDM) avec recherche d'anticorps antineuronaux (dont ceux de type Hu) doit donc être systématique au cours de toutes les neuronopathies sensitives. Une neuronopathie sensitive peut aussi être retrouvée au cours d’un syndrome de Gougerot-Sjögren (recherche de syndrome sec oculaire et buccal, biopsie des glandes salivaires accessoires, biologie), d’une origine dysimmunitaire sans cause et d’une origine toxique (chimiothérapies à base de sels de platine).

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