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Traitements antiépileptiques

Grossesse et épilepsie, prudence avec les médicaments

Par Melanie Gomez

Une étude met en évidence une augmentation du risque d’apparition de troubles moteurs et de traits autistiques chez les enfants exposés in utero aux médicaments antiépileptiques.    

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Chaque année en France, 5000 bébés naissent de mamans épileptiques. Ces grossesses se déroulent sans complication dans 92 à 96% des cas. Cependant, les grossesses de ces femmes sont considérées comme à risque par le corps médical. Des mesures précises sont généralement mises en place pour éviter les complications à la fois pour le bébé et la future mère. Une surveillance, qui passe notamment par une adaptation du traitement antiépileptique. Et pour cause, plusieurs études ont déjà montré que leur absorption pendant la grossesse pouvait perturber le développement du fœtus. Plus précisément, certains médicaments augmentent par exemple le risque de malformations congénitales majeures. D’autres études montrent aussi que le QI verbal de ces enfants serait diminué.

 

D’ailleurs, un nouveau risque potentiel de l’exposition à ces traitements pendant la grossesse vient peut être d’être identifié ? Une étude norvégienne publiée dans la revue Epilepsia met en évidence, un risque accru de développer des troubles moteurs, ainsi que des traits autistiques chez les enfants exposés in utero. Ce travail a été menée à partir des données de 333 enfants exposés pendant la grossesse à différents antiépileptiques (valproate, lamotrigine ou carbamazépine) entre 1999 et 2008 et ensuite observés aux âges de 18 et 36 mois. Pour les spécialistes de l’épilepsie, ces résultats apportent une pierre de plus à la recherche visant à améliorer la prise en charge des grossesses des femmes épileptiques. Pourtant, obtenues à partir de l’observation de trop petits effectifs, ces données ne doivent en aucun cas, affoler les patientes. Elles permettent en revanche, de rappeler que les médicaments pendant la grossesse n’ont rien d’anodin.

 

Ecoutez le Pr Franck Semah, président du Conseil scientifique de la Fondation pour la recherche sur l’épilepsie : « Les femmes épileptiques ne doivent pas arriver chez leur médecin en disant je suis enceinte, je fais quoi ? Actuellement, face à une femme épileptique, dès 15 ans, on prend le temps de choisir le traitement le plus adapté en cas de grossesse.

   

 

Néanmoins, les auteurs vont poursuivre l’analyse de ce registre et augmenter ainsi les effectifs de bébés exposés in utéro aux antiépileptiques suivis. « Les résultats que cette équipe aura dans ¾ ans seront plus intéressants. Mais pour le moment, c’est insuffisant  dire on choisit plutôt tel ou tel médicament pour éviter les troubles moteurs par exemple » précise Franck Semah qui est également chef du service Imagerie fonctionnelle au CHRU de Lille. Cependant, ces dix dernières années, la prise en charge de ces grossesses particulières s’est nettement améliorée. Les médecins sont désormais capables d’écarter ou de conseiller tel ou tel traitement afin de limiter les risques de malformations des bébés conçus par des mères épileptiques sous traitement. Les spécialistes ont réellement pris conscience que pour que tout se passe bien chez les femmes épileptiques pendant la grossesse, il faut que tout ait été bien anticipé.

 

Ecoutez le Pr Franck Semah : « Nos pratiques n’ont plus rien à voir avec ce que l’on faisait il y a 10 ans. Maintenant on dispose de données chiffrées qui précisent qu’un médicament A entraîne moins de risques qu’un médicament B ».


 

Quoiqu’il en soit les experts insistent. Arrêter son traitement antiépileptique pendant la grossesse peut être bien plus dangereux pour le bébé que de continuer à le prendre. Les pourcentages d’augmentation de risques liés à la prise de ces traitements sont vraiment minimes selon les spécialistes, comparés aux dangers réels provoqués par la survenue de crises d’épilepsie au cours de la grossesse. En effet, le risque de reprise ou d’augmentation des crises et de leurs conséquences pour la mère, comme les chutes pouvant provoquer le décès du bébé à venir, est bien plus élevé que le risque de troubles du développement du fœtus entrainé par l'exposition aux médicaments.