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Autorisation de l’ANSM

Le baclofène devient officiellement un traitement de l’alcoolisme

Par Afsané Sabouhi

L’Agence nationale de sécurité du médicament a donné son feu vert à la recommandation temporaire d’utilisation (RTU) du baclofène pour les malades alcooliques.

SERGE POUZET/SIPA

Dire que la recommandation temporaire d’utilisation du baclofène dans le traitement de l’alcoolisme était attendue est un euphémisme. Depuis 2008, plus de 50 000 patients l'ont utilisé et 7 000 médecins l'ont prescrit en dehors d’un véritable cadre légal. Après le feu vert de la Cnil accordé hier sur les modalités de suivi des effets indésirables, l’Agence nationale de sécurité du médicament a autorisé vendredi 14 mars l’utilisation de ce décontractant musculaire pour couper l’envie de boire aux malades dépendants à l’alcool, sans attendre les résultats des deux essais cliniques en cours en France sur le baclofène. La ministre des Affaires sociales et de la Santé, Marisol Touraine, s’est « réjoui du processus ainsi engagé, qui permet de répondre à une préoccupation majeure de santé publique ».

L’ANSM précise que « le baclofène pourra être prescrit après échec des autres traitements disponibles chez les patients alcoolo-dépendants dans les deux indications suivantes : aide au maintien de l’abstinence après sevrage chez des patients dépendants à l’alcool et réduction majeure de la consommation d’alcool jusqu’au niveau faible de consommation chez des patients alcoolo-dépendants à haut risque ».

 

Contres-indications, doses réduites : l'ANSM prend des précautions

L’Agence a joué la sécurité en contre-indiquant le baclofène pour toutes les personnes présentant des troubles neurologiques ou psychiatriques graves (épilepsie non contrôlée, schizophrénie, troubles bipolaires, dépression sévère) ou une insuffisance rénale ou hépatique sévère. En matière de doses également, l’ANSM se veut prudente. « La posologie quotidienne initiale devra être débutée à 15 mg par jour avant une augmentation très progressive de 5 puis 10 mg par jour, par paliers de 2-3 jours jusqu’à obtention de l’effet attendu. A partir de la posologie de 120 mg/jour, le médecin prescripteur devra demander un deuxième avis à un collègue expérimenté dans la prise en charge de l’alcoolo-dépendance, psychiatre, addictologue ou tout autre médecin formé à la prescription du baclofène, précise l'ANSM. Si le patient a besoin d’une dose quotidienne de baclofène de plus de 180 mg, un avis collégial au sein d’un CSAPA (Centre de Soins d’Accompagnement et de Prévention en Addictologie) ou d’un service hospitalier spécialisé en addictologie sera requis. Et la posologie maximale de 300 mg/jour ne devra jamais être dépassée. Une fois l’objectif de sevrage atteint, l’ANSM encourage les prescripteurs à diminuer la posologie, chaque patient devant bénéficier de la dose minimale efficace adaptée.

Un dispositif particulier de suivi des données d’efficacité et de sécurité du médicament a été mis sur pied. Le portail électronique https://www.rtubaclofene.org doit permettre de guider patients et prescripteurs dans l’utilisation de ce nouveau traitement de l’alcoolisme et de détecter les signaux de pharmacovigilance.

 

Eviter les faux espoirs

L’ANSM et le corps médical ne veulent toutefois pas susciter de faux espoirs chez les milliers de malades et leurs familles. Si les spécialistes parlent de véritable révolution, ils soulignent toutefois que le baclofène n’est pas la panacée absolue contre l’alcoolisme. Chez un patient sur deux, il reste sans effet.

La recommandation d’utilisation du baclofène étant temporaire, sa situation devra être réexaminée dans 3 ans à la lumière des résultats des essais cliniques actuellement en cours et du suivi des dizaines de milliers de patients traités dans le cadre de cette RTU.