- Malgré un plan national ambitieux, les mesures pour généraliser les espaces sans tabac tardent à être mises en œuvre, faute de décrets d'application.
- Pourtant, 62 % des Français y sont favorables. Et pour cause : le tabagisme passif provoque entre 3.000 et 5.000 décès par an, dont des enfants et nourrissons.
- En l'absence de cadre national, de nombreuses collectivités locales prennent des initiatives.
Malgré une ambition gouvernementale affichée, la France peine à généraliser les espaces sans tabac. Alors que le tabagisme tue 75.000 personnes par an et coûte 156 milliards d’euros à la société, les mesures prévues restent pour l’instant lettre morte.
En novembre 2023, le Programme national de lutte contre le tabac (PNLT 2023-2027) prévoyait d’interdire la cigarette dans les parcs, plages, forêts et abords d’écoles, avec à la clé des amendes. Objectif affiché : une "génération débarrassée du tabac dès 2032". Pourtant, les décrets d’application promis pour 2024 se font toujours attendre. "Nous attendions beaucoup de ce PNLT, mais les décrets d'application sont toujours dans les bagages", regrette Philippe Bergerot, président de la Ligue contre le cancer, cité par l'AFP.
Des intentions fortes, mais peu d’actes
Aujourd’hui, seules certaines zones sont réellement sans tabac : lieux de travail, transports, aires de jeux pour enfants... Mais les zones grises persistent, comme les parvis d'écoles ou les abris-bus ouverts. Pour Philippe Bergerot, le blocage est incompréhensible : "Ce n'est pas très coûteux, les Français y sont favorables."
Selon un sondage réalisé pour la Ligue contre le cancer, 62 % des Français se prononcent pour une extension des interdictions de fumer dans les lieux publics. Et pour cause : le tabagisme passif provoque entre 3.000 et 5.000 décès par an, dont des enfants et nourrissons, qui voient augmenter leurs risques d'infections respiratoires, otites, asthme... "Cela dénormalise la consommation de tabac et amène les fumeurs à envisager d'arrêter", insiste Yves Martinet, président du Comité national contre le tabagisme (CNCT).
Des maires en première ligne
En l’absence de cadre national, 1.600 communes soucieuses d’agir ont pris les devants : parcs, plages, pistes de ski ou abords d'école deviennent peu à peu des zones sans fumée. À ce jour, plus de 7.000 espaces sont concernés – des expérimentations locales accompagnées par la Ligue contre le cancer. Celle-ci milite aussi pour l’interdiction de la cigarette électronique dans ces lieux, qualifiée de "dangereuse porte d'entrée vers le tabac".
Autre manquement pointé du doigt : la hausse des prix du tabac, prévue dans le PNLT et jugée "très efficace" par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), est absente du projet de loi 2025.
A l’heure où les experts s’accordent sur l’efficacité des mesures et que les Français attendent des actes, la ministre du Travail Catherine Vautrin devrait "s'exprimer sur le sujet du tabac dans les jours à venir", selon un porte-parole.