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Contre la dépression et les addictions

Des électrochocs pour effacer les mauvais souvenirs

Par Arnaud Aubry

Une étude néerlandaise a réussi à démontrer que des électrochocs, appliqués juste après la « réactivation d'un souvenir », pouvaient effacer la mémoire.

REX FEATURES/SIPA

Dans le célèbre film de Michel Gondry « Eternal Sunshine of the Spotless Mind », Jim Carrey et Kate Winslet choisissent de se faire effacer la mémoire pour oublier une séparation trop douloureuse. Si cela reste de la science-fiction, des chercheurs viennent de faire un grand pas en avant dans cette direction. En effet, des scientifiques néerlandais de la Radboud University Nijmegen ont réussi à effacer des souvenirs chez des patients. L'objectif à terme est de pouvoir mieux soigner les addictions, les dépressions et autres troubles psychiques, en effaçant les mauvais souvenirs. Et ces chercheurs ont découvert qu'en « appliquant les électrochocs au bon moment, il était possible de cibler et effacer l'épisode douloureux de la mémoire des patients ».

Dans un article publié dans la revue scientifique Nature, on apprend que la stratégie de ces scientifiques est basée sur « la théorie de la reconsolidation de la mémoire », qui soutient que chaque fois que l'on se rappelle de quelque chose - que l'on « réactive un souvenir » - il est « réécrit » ensuite dans les circuits du cerveau. Des études sur les animaux ont déjà prouvé que durant cette phase de reconsolidation, les souvenirs sont vulnérables, pouvant être altérés voire même effacés.

Des électrochocs au bon moment

Pour prouver cette théorie, Martin Kroes et son équipe ont fait visionner à 42 patients, à qui l'on avait prescrit des électrochocs du fait de leur état dépressif sévère, deux diaporamas très anxiogènes (le premier montrant un accident de voiture, le second une agression). Une semaine plus tard, l'équipe a réactivé les souvenirs des patients en leur montrant un seul des deux diaporamas. Juste après, au moment où la mémoire réactivée est sensée être la plus fragile, les patients ont reçu les electrochocs. Un jour plus tard, on a demandé à certains d'entre eux de se souvenir des deux histoires anxiogènes. Ceux-ci se rappellaient bien du diaporama qu'ils n'avaient vu qu'une seule fois, mais impossible, par contre, de se souvenir de l'histoire qui leur a été montrée une deuxième fois, juste avant de recevoir les électrochocs. Pour l'autre groupe, on leur a posé des questions sur les diaporamas mais seulement 90 minutes après le traitement, et ces patients ne montraient aucune différence dans leur capacité de se rappeler des deux diaporamas.

Ce qui tendrait donc à prouver que les souvenirs peuvent être effacés si les électrochocs sont appliqués juste après la réactivation du souvenir, mais que cet effacement ne prend effet que 24 heures après le traitement. Reste désormais à savoir si la perte de mémoire est définitive ou temporaire.