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L'interview du week-end

Crise d'ado : "L’important est de réussir à garder une position parentale la plus juste possible"

Par Sophie Raffin

L’adolescence n’est pas toujours une période facile, aussi bien pour le jeune que ses parents, au point qu’il devient parfois difficile d’échanger de façon apaisée au sein de la famille. Le Dr Vincent Henry, pédopsychiatre au CHU de Montpellier, partage ses conseils pour renouer le dialogue.

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Pourquoi Docteur : Pourquoi la communication peut-elle devenir difficile entre des parents et leur adolescent.e ?

Dr. Vincent Henry : L’adolescence est une période faite de grands changements, voire de bouleversement pour les jeunes qui la traversent. Parmi ces changements, on note assez fréquemment un changement de posture, un besoin d’individuation. Comme si l’ado se disait "Je deviens adulte donc je pense par moi-même, je suis autonome…". Cette affirmation de soi en tant que personne à part entière passe souvent par une opposition à ce qui est proposé ou demandé par les parents.

"L’important en cas de conflit n’est pas de vaincre, mais plutôt de résister"

On dit souvent aux parents "Ne t'inquiète pas, c'est la crise d’adolescence, il/elle reviendra vers toi plus tard", est-ce vraiment le cas ?

Heureusement dans la plupart des cas oui ! Nous disons fréquemment aux parents des adolescents qui consultent sur nos unités que l’important en cas de conflit avec son ado n’est pas de "vaincre" mais plutôt de "résister".

Les parents ne sont pas dans un "conflit" qui pourrait se "gagner" ou se "perdre", mais plutôt dans une période de fortes "turbulences". L’important est donc de tenir, de réussir à garder une position parentale la plus juste possible. Et dans la plupart des cas, la tempête passe au bout d’un certain temps… si tempête il y a, car tous les ados ne font pas de "crise d’ado".

"Continuer à communiquer sur des choses simples, agréables et positives"

Quels conseils donneriez-vous à des parents qui ne parviennent plus à communiquer sans dispute avec leur adolescent.e ?

Il est très difficile de "généraliser", car certaines techniques peuvent aider certaines familles et ne pas être indiquées pour d’autres… D’une manière générale, je dirais aux parents de tenter de se focaliser sur leurs propres comportements parentaux pour qu’ils restent les plus justes possible, et qu’ils essayent d’éviter les escalades.

On peut utiliser l’écrit, passer par des messages SMS ou WhatsApp. Toutefois, il ne faut utiliser cette méthode qu'à distance des conflits, quand vous êtes vous-même apaisé, car les écrits restent !

Aussi, continuer à communiquer sur des choses simples, agréables et positives, en essayant de ne pas se focaliser sur "le problème" qu’on veut absolument régler. Pour les ados ayant des troubles du comportement, nous conseillons souvent les ouvrages d’Haim Omer sur la résistance non-violente ou ce qu’il nomme la nouvelle autorité.

Il arrive que les parents soient perdus, car ils n’ont pas rencontré de telles difficultés avec leurs aînés. Que répondez-vous s’ils font cette remarque pendant une consultation ?

Je dis souvent que l’éducation est quelque chose de très complexe. Certains parents ont l’impression d’avoir éduquer leurs enfants avec les mêmes règles, les mêmes principes, les mêmes sentiments, et pourtant à l’adolescence, c’est le jour et la nuit ! C’est assez classique et cela n’est en rien "pathologique". L’important ici encore reste la capacité des parents à s’adapter, à se remettre en question et à tenter de s’ajuster. On demande souvent aux enfants de faire des efforts et de "se mettre à notre place". Donnons-leur l’exemple…

Les ados aussi sont en demande que les choses changent

Les parents sont généralement en demande de conseils pour apaiser les relations à la maison. Est-ce aussi une préoccupation chez les adolescents ?

Nous voyons souvent en consultation des adolescents pour cette demande. Il est vrai que le plus souvent, les adolescents arrivent en consultation à la demande pressante des parents pour que nous "les fassions changer". Ainsi, les premières consultations peuvent être un peu difficiles, car les ados nous cataloguent généralement comme étant "du côté des parents". Toutefois, une fois l’alliance créée avec eux, ils sont très souvent aussi en demande que les choses changent et se remettent souvent en question. Nous pouvons alors travailler directement avec eux, sur des stratégies de communication avec leurs parents, sur des techniques de gestion émotionnelle ou d’autres outils.

Le Dr Vincent Henry est médecin pédopsychiatre au CHU de Montpellier, et co-auteur du livre "100 idées pour accompagner les émotions des enfants et des adolescents" avec Christelle Vernhet (édition Tom Pousse). Il a également développé un site internet de guidance parentale : www.enfance-emotion.fr