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Baromètre de Médecins du monde

Accès aux soins : la précarité frappe les mineurs de plein fouet

Par Mathias Germain

En cinq ans en France, le nombre d’enfants qui viennent consulter dans les centres de soins de Médecins du Monde a augmenté de 70 %. Un tiers d’entre eux nécessitent des soins urgents.

CHAMUSSY/SIPA

A la veille de la journée mondiale du refus de la misère, le rapport de Médecins du Monde (MdM) tombe comme un pavé dans la mare : une personne sur dix qui se rend dans les 20 centres de soins de l’ONG en France est un enfant. Leur nombre a augmenté de près 70 % depuis 2007. « Cette hausse est beaucoup plus marquée que celle de l’ensemble des patients, indique le Dr Jean-François Corty, le responsable de la mission France de MdM. Ces enfants représentent en tout 12,5 % de la file active de malades qui viennent nous consulter ». La grande majorité de ces mineurs est étrangère, mais elle provient à 50 % de pays européens. Et 65 % de ces enfants vivent en France depuis moins d’un an.


Autre chiffre marquant, la moitié de ces enfants qui arrive dans les centres d’accueil, de soins et d’orientation de l’ONG a moins de 6 ans. Un chiffre inquiétant car il faut rappeler que les centres de protection maternelle et infantile (PMI) assurent gratuitement des consultations et des actions de prévention médico-sociale pour tous les enfants de la naissance jusqu’à 6 ans, indépendamment de la présence d’une couverture sociale ou d’un titre de séjour. « Cette difficulté d’accès au droits pour les enfants illustre bien le décalage qui existe entre le droit théorique et l’application de ce droit. Cette difficulté se retrouve aussi chez les populations adultes précaires », souligne le Dr Jean-François Corty.


Ecouter le Dr Jean-François Corty
, responsable de la mission France de Médecins du Monde.« La moitié des enfants ont moins de 6 ans, et ces enfants ont des couvertures vaccinales très faibles, notamment contre la dyphtérie tétanos poliio, ou le rougeole, oreillon, rubéole. »


En France, l’accès aux droits des mineurs est en principe inconditionnel. Tous les mineurs étrangers sont éligibles à l’AME dès leur arrivée sur le territoire, « même si leurs parents ne sont pas éligibles à l’AME. » Or dans les faits, seuls 11 % des mineurs disposent d’une couverture maladie lors de leur première visite aux centres de soins de MdM.

Le retard du recours aux soins affecte un tiers des mineurs, selon Jean-François Corty, qui rappelle que la proportion est encore plus forte chez les adultes. 45 % des femmes enceintes consultent tardivement.


Ecouter le Dr Jean-François Corty. « 43% des personnes que l’on voit dans les centres ont retardé leurs soins. »


32,4 % des enfants nécessitent des soins urgents ou assez urgents au moment de leur consultation. Ainsi en 2012, plus de 3100 mineurs on bénéficié de 4900 consultations médicales dans les centres de soins de MDM. « Ils souffrent essentiellement de pathologies respiratoires dans 56 % des cas, loin devant les problèmes digestifs et dermatologiques, comptabilise le Dr Jean-François Corty. Dernier point, 28% des enfants moins de deux ans présentent des signes de dénutrition. « La situation de ces enfants est un indicateur qui marque la gravité de la précarité, s’alarme le responsable de la mission France de Médecins du Monde. Elle nous impose d’être plus rigoureux, plus innovants, plus pro-actifs, dans nos politiques publiques pour faire en sorte que les plus précaires soient mieux pris en charge dans notre société »


Ecouter le Dr Jean-François Corty. « Il faut simplifier l’accès aux droits, en fusionnant l’AME et la CMU, faire en sorte qu’il y ait plus de dispositifs mobiles d’offres de soins. »