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Addictions

Chemsex : une épidémie proche de celle du Sida selon le New York Times

Par Charlotte Arce

Cette pratique, qui consiste à prendre des drogues de synthèse dans un contexte sexuel, fait des ravages parmi la communauté gay. Au point que le "New York Times" établit une comparaison avec l’épidémie de Sida dans les années 80.

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Cette pratique, qui consiste à avoir des relations sexuelles après avoir pris des drogues de synthèses, est en vogue auprès de la communauté homosexuelle.
Elle multiplie les risques d'overdose, de malaise cardiaque, et de contracter une infection sexuellement transmissible.
Pour certaines associations, le phénomène est tel qu'il peut être comparé à l'épidémie de Sida qui a touché la communauté gay dans les années 80.

Avoir des relations sexuelles quand on a consommé de la drogue est loin d’être une pratique nouvelle. Pourtant, depuis quelques années, elle connaît un essor inquiétant auprès de la communauté gay. Aux États-Unis, la pratique a un nom :  chemsex, contraction de "sex" et de "chemicals" ("drogues" en anglais), qui désigne la consommation de drogues de synthèse comme les cathinones, la méthamphétamine et les méphédrones pour décupler les sensations et maintenir ses performances sur plusieurs heures, voire plusieurs jours.

"Parfois, ce sont des orgies qui durent quarante-huit heures. On passe d'appartement en appartement. Des mecs partent, d'autres viennent : ça tourne sans cesse et la drogue t'aide à tenir", décrit ainsi à Slate Stéphane, 35 ans, accro au chemsex.

Un grave problème de santé publique

Prisé par le milieu parisien, le chemsex connaît depuis quelques temps de plus en plus d’ampleur en France, et commence à peine à être considéré comme un grave problème de santé publique. Et pour cause : outre les importants problèmes d’addiction qu’il engendre, le sexe sous substances est associé aux pratiques sexuelles à risque, et donc à l’augmentation des infections sexuellement transmissibles telles que les gonorrhées, gonocoques, l’herpès ou encore la syphilis et le VIH. Ainsi, selon l'enquête Apaches (Attentes et PArcours liés au CHEmSex) menée par l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) en 2019, un chemsexeur sur 3 est séropositif. Les chemsexeurs ont aussi plus de risque de faire une overdose, parfois mortelle, et augmentent aussi leur risque d’accident cardiovasculaire.

Quant au risque d’addiction, il est bien présent. Le chemsex est ainsi associé au "slam", c’est-à-dire à la pratique d’injection intraveineuse, qui multiplie les effets psychoactifs de la drogue, mais aussi les risques de surdosage et d’IST. "Lorsque les cathinones sont injectées, l'intensité et la brièveté des effets amène les usagers à en consommer de façon répétée. Jusqu'à quinze ou vingt fois au cours d'une même session", explique l'OFDT.

Une nouvelle épidémie ?

L’ampleur prise par le phénomène du chemsex ces dernières années inquiète, au point que le New York Times le compare à l’épidémie de Sida qui a touché la communauté homosexuelle dans les années 80. "Aujourd'hui, la communauté gay est confrontée à une autre crise dont nous ne parlons pas et que les élus ignorent une fois de plus. La méthamphétamine en cristaux est devenue une tentation populaire pour les hommes gays, conduisant beaucoup d'entre eux à la dépendance. Cette drogue, qui peut modifier la composition chimique du cerveau chez les utilisateurs chroniques, crée une dépendance extrême. Et tout comme pendant l'épidémie de sida des années 1980 et 1990, les ressources sont dérisoires, le soutien gouvernemental est pratiquement inexistant et une aura de déni entoure la crise", écrit dans le quotidien américain Jim Mangia président et le directeur général du St. John's Well Child and Family Center, lui-même homosexuel.

Une prise en charge multidisciplinaire

Comment alors prendre en charge les hommes pratiquant le chemsex ? La situation devient urgente, alarment les associations communautaires comme AIDES, d’autant que la pandémie de Covid-19 n’a pas freiné le phénomène. La crise sanitaire semble même avoir eu un effet délétère, en retardant l’accès au diagnostic d’IST et en aggravant la solitude et l’isolement des addicts au chemsex. "Si les confinements et les couvre-feux ont été l'occasion d'une pause pour certains, ils ont réveillé chez d'autres l'angoisse du vide et la peur de la solitude que le chemsex venait diluer, les faisant plonger dans une nouvelle spirale", écrit ainsi le magazine NEON.

Pour la psychiatre addictologue Muriel Grégoire, il existe cependant des ressources à disposition des chemsexeurs. Interrogée par Top Santé, elle plaide pour un accompagnement pluridisciplinaire, alliant psychothérapie, groupes de parole et traitement médicamenteux en cas de dépression. Les associations communautaires peuvent aussi être d’une grande aide. "Toute la difficulté est de prendre en charge le patient sans qu'il ne se sente jugé sur ses pratiques", estime-t-elle.