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Dans 14 pays d’Afrique

Sida : la circoncision pourrait réduire l’épidémie de 25%

Par Afsané Sabouhi

Un programme de circoncision en Afrique du Sud confirme à large échelle la réduction de 60% de l’infection par le VIH chez les hommes circoncis.

Dita Alangkara/AP/SIPA

Trois études, menées en Afrique du Sud, au Kenya et en Ouganda, avaient démontré en 2005 et 2007 que la circoncision réduisait le risque d’être infecté par le VIH de 50 à 60%. L’OMS avait alors aussitôt recommandé d’en faire une stratégie de prévention additionnelle contre le VIH dans les pays fortement touchés. Mais une fois sortis des conditions très encadrées des études expérimentales, il restait à prouver que des programmes de circoncision volontaire pouvaient être acceptés par les populations locales et donner les mêmes résultats de réduction du risque d’infection.

 

C’est cette transposition réussie d’un résultat expérimental dans « la vraie vie » que viennent de démontrer le Pr Bertran Auvert et ses collègues sud-africains et américains. Réalisée dans le bidonville d’Orange Farm en Afrique du Sud, leur étude, publiée mercredi dans la revue Plos Medicine confirme l’acceptation et l’efficacité d’un programme de circoncision volontaire à large échelle. Entre 2007 et 2011, plus de 20000 hommes âgés de 15 à 49 ans ont accepté la circoncision gratuite et médicalisée proposée dans le cadre d’un large programme d’information et de prévention.


Ecoutez le Pr Bertran Auvert
, professeur de santé publique à l’Université de Versailles Saint-Quentin en Yvelines : « En 3 ans, on est passé de 15 à 50% d’hommes circoncis et même 60% chez les jeunes. L’acceptation est très bonne, dans une région où la circoncision n’est pas une pratique usuelle. »  



Parmi ces hommes nouvellement circoncis, les chercheurs ont retrouvé exactement l’effet observé lors des études expérimentales, le taux de nouvelles infections a été réduit de 57 à 61%. Ils estiment qu’en l’absence du programme de circoncision volontaire, la prévalence du VIH aurait été 19% plus élevée au sein de ce bidonville et 28% plus élevée parmi les 15-29 ans. Fait rassurant, les chercheurs ont observé que la circoncision n’avait pas modifié le comportement sexuel des volontaires, ni sur leur nombre de partenaires, ni sur le port du préservatif.  

 

Pourquoi la circoncision protège contre le VIH ?

Le prépuce est un repli de peau protecteur du gland. Dans la face interne du prépuce se trouvent de nombreuses cellules du système immunitaire capables de nettoyer la surface du gland. Après un rapport sexuel contaminé, le prépuce concentre donc à la fois des cellules infectées et des cellules immunitaires que le VIH va pouvoir détourner pour infecter l'organisme. Par la circoncision, qui consiste en l'ablation du prépuce, on limite donc le risque de rencontre entre le virus du Sida et les cellules du système immunitaires qui lui servent de porte d'entrée dans l'organisme.

 


« Compte tenu des résultats de cette étude, la généralisation de la circoncision doit plus que jamais être une priorité de santé publique en Afrique australe et de l’Est », souligne le Pr Jean-François Delfraissy, directeur de l’Agence nationale de recherche sur le Sida. La circoncision peut en effet être envisagée à large échelle comme outil de prévention du VIH dans les pays remplissant deux conditions : l’épidémie de Sida doit y être élevée et hétérosexuelle et la population masculine ne doit pas être circoncise. Quatorze pays d’Afrique Australe et de l’Est remplissent cette double exigence et ils concentrent à eux-seuls la moitié des personnes contaminées chaque année par le VIH dans le monde.


Ecoutez le Pr Bertran Auvert
, professeur de santé publique à l’Université de Versailles Saint-Quentin en Yvelines : « Si ces 14 pays atteignaient des taux de circoncision de 80%, ce qui reviendrait à circoncire 20 millions d’hommes, on réduirait l’ampleur de l’épidémie mondiale de Sida de 25%. »   




L’étude se poursuit actuellement, notamment pour mesurer quel est l’effet de ce programme de circoncision pour la population féminine.