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Fondation du souffle

Les pneumologues défendent la cigarette électronique

Par Cécile Coumau

Longtemps sceptiques, les médecins, par la voix des pneumologues, apportent un soutien franc à la e-cigarette. Les témoignages de fumeurs les ont convaincus de son intérêt dans la lutte contre le tabac.

ANGOT/SIPA

« La cigarette électronique, amie ou ennemie ? » C’est la question que se sont posée le Comité contre les maladies respiratoires (CCMR) et la Fondation du souffle. Et pour les pneumologues membres de ces structures, la réponse est clairement « amie ». Dans l’édition du mois d’août de « La lettre du souffle », la Fondation fait le point sur la cigarette électronique. Et au vu des preuves scientifiques qui s’accumulent, les pneumologues refusent de regarder passer le train de la e-cigarette sans monter dedans. Devant l’enthousiasme des milliers de fumeurs qui ont arrêté de fumer ou diminuer leur consommation de tabac, les pneumologues mettent en avant la toxicité bien moins importante de la e-cigarette par rapport à la cigarette traditionnelle.


Entretien avec le Pr Louis Jeannin, ancien chef de service de pneumologie du CHU de Dijon et président du comité contre les maladies respiratoires de Côte d’Or.


Pourquoi Docteur :
Pourquoi le comité des maladies respiratoires a pris position sur la cigarette électronique alors que les preuves de son efficacité et de son innocuité ne sont pas encore très claires ?

Pr Louis Jeannin : Il est vrai que des études paraissent presque tous les jours. Il s’agit donc d’une prise de position provisoire. Mais, la cigarette électronique représente un tel mouvement citoyen, avec environ un million d’utilisateurs réguliers, que nous, médecins, ne pouvions pas restés en dehors, et ne pas se positionner sur une réglementation de cet usage. Par ailleurs, quand on sait le chemin de croix que représente le sevrage tabagique, et que l’on découvre que des personnes qui ont essayé la cigarette électronique arrêtent alors qu’elles n’en avaient pas l’intention, c’est une telle révolution que ça vaut la peine que nous nous interrogions. Pour rien au monde, ces personnes voudraient se retrouver avec une interdiction de vente de ce produit.


Pourquoi Docteur : Mais peut-on dire que la cigarette électronique est un produit d’aide au sevrage tabagique ?

Pr Louis Jeannin : Tout ce qui permet de diminuer la consommation de tabac est de toute façon bon à prendre. Certes, le fait de moins fumer n’est pas une garantie d’arrêt à terme. Mais, la e-cigarette reste malgré tout un outil de réduction des risques. C’est déjà un résultat qui a sa valeur. Par ailleurs, le fait que la diminution voire l’arrêt soit si rapide, c’est confondant pour les personnes. Elles en tirent une grande satisfaction. Alors que d’habitude, les personnes en sevrage vivent plutôt un épisode dépressif que les tabacologues essaient de prévenir en prescrivant des anxyolitiques. C’est donc très nouveau dans l’arrêt du tabac. Certes, cet outil n’est pas efficace chez tout le monde mais pour les autres, c’est formidable. L’autre grand avantage de la cigarette électronique, c’est que ce sont les fumeurs eux-mêmes qui choisissent cette méthode, et pas le médecin.




Pourquoi Docteur : La toxicité des produits contenus dans la e-cigarette ne vous inquiète pas ?

Pr Louis Jeannin : Si on parle de toxicité, il faut la comparer avec celle de la vraie cigarette. Les experts ne sont pas tous d’accord mais la différence de nocivité est énorme. C’est un rapport de 1 pour 1000 ! Il n’y a donc pas d’hésitation. Par ailleurs, une étude sur les principales marques européennes de cigarettes électroniques vient de montrer que la plupart des produits sont de qualité pharmacologique. Donc, la nicotine par exemple, n’a rien à voir avec celle qui était dans les cigarettes chinoises. Elle est de qualité semblable à celle que les laboratoires peuvent utiliser pour fabriquer des substituts nicotiniques. Enfin, mener des études à long terme pour évaluer les dangers de cet outil me semble très compliqué. Comment voulez-vous faire la différence entre les dommages causés par la vraie cigarette et ceux dus à la e-cigarette dans la mesure où les vapoteurs ont souvent été fumeurs avant ? Et attendre des années pour faire une législation alors qu’il y a des millions d’utilisateurs dans le monde, voilà quelque chose qui est bien stupide !




Pourquoi Docteur : Au printemps, la ministre de la santé a proposé des mesures pour encadrer l’utilisation de la cigarette électronique. Vous semblent-elles satisfaisantes ?

Pr Louis Jeannin : Je suis d’accord avec sa proposition d’interdire le vapotage dans les lieux publics. Il faut que la vraie et la e-cigarette soient logées à la même enseigne. En revanche, je ne suis pas d’accord avec l’interdiction de vente aux mineurs. Mais a-t-on bien réfléchi ? Les fumeurs les plus à risques, ce sont les plus jeunes. On sait bien que plus le tabagisme est précoce, plus il est dangereux à terme. Donc, si ces jeunes s’aperçoivent que la cigarette électronique les aide à diminuer voire à arrêter, on a déjà considérablement amélioré les choses. Quant au gamin qui n’est pas fumeur et qui pourrait passer de la e-cigarette à la vraie, c’est un risque purement potentiel. Donc cette interdiction aux mineurs me semble totalement contre-productive.