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Parlement

L'affaire des masques et le drame des Ehpad au coeur des débats devant la Commission d'enquête parlementaire

Par Amanda Breuer-Rivera

Ce mardi s'ouvre la commission d'enquête parlementaire sur la gestion de la crise sanitaire. Une initiative de l'Assemblée nationale pour tenter de comprendre les manquements en début de crise. À cela s'ajoute l'étude des plaintes notamment contre les administrations et les membres du gouvernement.

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À mesure que la crise sanitaire s'éloigne en France, l'heure des comptes se précise. Ce mardi s'ouvre à l'Assemblée nationale une première commission d'enquête. Sous l'égide de la présidente de la commission des Affaires sociales, Brigitte Bourguignon (LREM), leur but est d'"établir la généalogie et la chronologie de cette crise". Éric Ciotti (LR, membre de l'opposition), rapporteur de la commission d'enquête, compte bien s'intéresser plus particulièrement à "la gestion des stocks de masques", à la stratégie "en matière de tests" ainsi qu'à la "prise en charge des résidents des Ehpad" - où ont eu lieu plus du tiers des décès de la Covid-19.

Un travail parlementaire qui bénéficie de pouvoirs étendus. Les convocations sont obligatoires sous peine de sanctions pénales, les auditions se déroulent sous serment et ses membres peuvent réaliser des contrôles sur pièces et organiser des déplacements, par exemple dans un hôpital ou un Ehpad durement touché par l'épidémie. Une deuxième commission d'enquête parlementaire - cette fois-ci menée par le Sénat - doit débuter à la fin du mois.

Interrogations des députés

Dès aujourd'hui, le directeur général de la Santé, Jérôme Salomon, doit être le premier a être auditionné par les 32 députés de cette commission d'enquête. Demain, ils entendront l'ancien patron de Santé publique France, François Bourdillon, puis Geneviève Chêne, qui lui a succédé en novembre à la tête de cette agence en charge de la veille sanitaire, de la prévention et de l'éducation pour la santé, et de la réponse aux urgences sanitaires. Jeudi aura lieu l'audition de Jean-François Delfraissy, le président du conseil scientifique dont les avis ont incité le gouvernement à décréter le confinement puis guidé sa fin progressive. Suivront deux anciens directeurs généraux de la santé. Puis, selon des sources parlementaires, viendra le tour des scientifiques, dont le controversé professeur marseillais Didier Raoult, et des politiques, après le second tour des élections municipales, avec Agnès Buzyn, ex-ministre de la Santé, et plusieurs de ses prédécesseurs assure l'AFP.

Au cœur de ces débats, les "dysfonctionnements" de la gestion de la crise sanitaire. Les parlementaires comptent bien se pencher sur le statut et le rôle de Santé publique France créée en 2016. Elle a absorbé l'Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (Eprus), affectant selon certains la capacité à anticiper une crise telle que le coronavirus. Des responsabilités interrogés qui vont également chercher au niveau local. "Le drame des Ehpad posera nécessairement, par exemple, la question de la pertinence des conseils départementaux et des agences régionales de santé", pointe le député LREM Florent Bachelier dans une tribune publiée par Ouest France. Une manière également pour la majorité et l'opposition de contester la politique des uns et des autres. Éric Ciotti, rapporteur de la commission d'enquête, compte bien dénoncer "le retard dans la mise en œuvre des tests virologiques" rapporte 20 minutes et interroge : "si nous avions été mieux préparés, le confinement aurait-il été nécessaire ?"

Cependant certains députés ne se font guère d'illusions sur les échanges avec les ministres. Certains redoutent qu'ils voudront réserver leurs réponses à la justice.

Front judiciaire

Car parallèlement à cette tourmente politique, ces même protagonistes seront a priori également convoqués devant des juges d'instructions. Le parquet de Paris ainsi que la Cour de justice de la République - chargée exclusivement de juger les ministres dans l'exercice de leur fonction - ont été saisis d'une soixantaine de plaintes pour l'un et de 84 pour l'autre. Les principaux griefs : "mise en danger de la vie d'autrui", "homicide involontaire", "non-assistance à personne en danger" ou abstention de prendre à temps des mesures pour endiguer l'épidémie, abstention volontaire de combattre un sinistre dangereux ou encore homicides et blessures involontaires. Ces plaintes émanent principalement de particuliers, associations et de syndicats.

Début juin, le parquet de Paris a ouvert une vaste enquête préliminaire sur la gestion de la crise pour traiter une soixantaine de plaintes contre 'X' ou à l'encontre des responsables administratifs comme le directeur général de la santé Jérôme Salomon, l'administration pénitentiaire ou le ministère du travail. L’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique (Oclaesp) est diligentée pour enquêter notamment sur la protection au travail, la mise à disposition de masques et de tests, etc. François Molins plaide pour avoir davantage de "moyens" face à l'ampleur des investigations à mener. "Il faudra faire en sorte que cette procédure soit diligentée de la façon la plus rapide et la plus efficace possible" insiste-il au micro de RTL ce matin. Cependant cette enquête nationale ne concerne pas les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), qui font l’objet à ce jour d’enquêtes locales, dont deux à Paris, mais également à Nanterre ou Grasse (Alpes-Maritimes) rapporte Le Monde.

En ce qui concerne la responsabilité des ministres, la Commission des requêtes de la Cour de justice de la République doit bientôt juger la recevabilité des 84 plaintes déposées. "À l'issue de son examen, vraisemblablement à la fin du mois de juin, soit elle estimera que ces plaintes ne sont pas recevables et elle les classera et sa décision sera définitive, soit elle estimera qu'elles sont recevables et elle me les transmettra" a expliqué François Molins. Les plaintes visent le plus souvent le Premier ministre Édouard Philippe, ainsi que les deux ministres de la Santé, Agnès Buzyn et Olivier Véran. Le chef de l'État, Emmanuel Macron, est protégé par la Constitution. Ses actes dans le cadre de sa fonction présidentielle sont considérés comme irresponsable pénalement.