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Pourquoi la Covid-19 freine le marché immobilier

Par Amanda Breuer-Rivera

Les conditions d'octroi de crédit liées aux craintes sur la solvabilité des ménages touchés par les conséquences de la crise sanitaire ainsi que les taux plus élevés rendent plus difficile l'accession à la propriété. 

AaronAmat/iStock

La Covid-19 semble continuer à freiner la dynamique du marché immobilier. Après deux années de taux à très bas prix, l'argent recommence à coûter plus cher que l'inflation. En l'espace d'un mois, le taux moyen de crédit est passé de 1,18% à 1,25% en mai 2020. Un taux semblable à celui de mai 2019 qui cependant inquiète les amoureux de la pierre. "A cause de la crise du coronavirus, 42% des futurs acquéreurs expriment davantage d'inquiétudes concernant l'obtention d'un prêt immobilier pour concrétiser leur projet" assure Séverine Amate, porte-parole de SeLoger. Selon la dernière vague de l'Observatoire du Moral Immobilier, réalisée par SeLoger auprès de 2517 futurs acquéreurs dès le début du déconfinement, 72% des futurs acquéreurs qui n'avaient pas encore étudié leur financement avant le confinement craignent que la hausse des taux freine leur projet. Ils sont 61% du côté de ceux qui ont déjà étudier leur financement avant à envisager ce scénario noir. Malgré cette morosité, ils seraient 7 futurs acquéreurs sur 10 à penser qu'ils parviendront à acheter un bien immobilier.

Pourtant, l'emprunt se fait plus rare et chiche ces derniers mois. Comptez une baisse de 41% entre mars et mai 2020 par rapport aux mêmes mois de 2019. Ainsi qu'une chute de 39,7% du nombre de crédits accordés sur ces mêmes périodes.

Effets du coronavirus et de la HCSF

Les effets économiques de la crise sanitaire fragilisent la situation économique de certains ménages et semble rendre plus difficile l'accès à l'endettement. "Il n’y a pas de liste rouge pour les secteurs d’activité mais on peut envisager que les dossiers d’un régisseur dans l’événementiel ou un salarié de Renault seront étudiés avec plus de précautions que l’an dernier, reconnaît Maël Bernier, de Meilleurtaux.com sur Le Figaro. On ne peut pas reprocher aux banques de ne pas prêter à des ménages non solvables."

Cependant, ce durcissement des prêts porte également le nom du Haut conseil de stabilité financière (HCSF) - autorité qui conseille le ministre des finances. En septembre et décembre dernier, cette autorité a estimé qu'il existait des risques pour la stabilité financière de l'économie française. "Même si le risque reste contenu à l'heure actuelle, les tendances observées continuent une vulnérabilité à moyen-terme" explique-t-il en septembre 2019 après avoir calculé que l'endettement du secteur non-financier en France (particuliers et entreprises non-financières) s'élève à 133% du PIB au premier semestre 2019. En décembre, il préconise un plan d'action pour limiter "la dégradation tendancielle des conditions d'octroi qui en garantissent la robustesse, et à prévenir une dynamique excessive de l'endettement des ménages." Ces recommandations ont été suivi d'effet avec l'augmentation progressive des taux qui selon l'Observatoire crédit logement / CSA "pèse nettement sur le dynamisme du marché observé jusqu’alors."

Primo-accédants principales victimes

Des octrois plus difficiles et moins nombreux ont permis selon l'Observatoire de noter que "l’indicateur de solvabilité de la demande se redresse". Cependant, les premières victimes de ce durcissement du crédit selon les primo-accédants. "La part des emprunteurs les moins dotés en apport personnel qui supportent en général les taux les moins favorables - les emprunteurs modestes et/ou ceux qui sont en primo accession - a encore reculé, note l'Observatoire. Cela a partiellement neutralisé la remontée des taux des prêts annoncés dans les barèmes des banques." Comprenez que si le taux moyen n'est que de 1,25% parce que les prêts de plus de 25 ans à 1,51% ont trouvé moins de preneurs.

Cependant, ceux qui veulent accéder pour la première fois à la propriété et qui ne se sont pas découragés ont allongé leur durée de crédit. 51% d'entre eux se sont endettés pour plus de 20 ans, "le plus haut niveau observé jusqu’alors" commente l'Observatoire. En 2019, ils étaient 48,9% à signer cette durée de contrat contre 44% en 2018 et 30,4% en 2016. Pourtant malgré ces mauvais signaux, le prix de l'immobilier continue de croitre. Optimisme malgré la rigueur ou bulle immobilière annoncée ?