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Vote à l'Assemblée nationale

La recherche sur les cellules souches en liberté surveillée

Par la rédaction

Les députés ont adopté le texte autorisant la recherche sur l'embryon et les cellules souches. La France met fin à son régime d'interdiction avec dérogations. 

DESSONS/JDD/SIPA
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Ca y est, c'est fait ! Après plusieurs jours d'un débat intense et houleux, les députés français ont voté ce mardi le texte modifiant le statut de la la recherche sur l'embryon. Cette dernière va dès lors devenir une « autorisation encadrée », au lieu d'une « interdiction avec dérogations ». L'Assemblée a voté cette proposition de loi des radicaux de gauche soutenue par le gouvernement qui avait déclenché une forte polémique par 314 voix contre 223. Mais pour l'opposition qui avait réussi à faire traîner les débats en déposant près de 300 amendements, la bataille n'est pas finie. L'UMP a d'ores et déjà annoncé qu'elle allait déposer un recours devant le Conseil constitutionnel. Retour sur les enjeux d'un débat passionné.

En France, la recherche sur ces cellules souches étaient jusqu'à présent interdite mais des dérogations exceptionnelles étaient possibles. Malgré ce statut très restrictif, une poignée d’équipes de chercheurs français a pu démarrer quelques travaux prometteurs : pour réparer le tissu endommagé du cœur, permettre des greffes de peau chez les grands brûlés, ou encore améliorer les techniques de procréation médicalement assistée… 

Mais, le député Roger-Gérard Schwartzenberg, ancien ministre de la Recherche en 2000-2002, à l'origine de ce projet, souhaitait aller plus loin, cela afin de rattraper le retard pris par la France comparé aux autres pays. «  L’objectif est de mettre fin à l’interdiction de principe, qui persiste dans l’actuelle loi de bioéthique de 2011, car elle est préjudiciable aux malades, et auprès des chercheurs qui veulent développer les techniques d’une médecine régénératrice. ». Voeux aujourd'hui exaucé pour le député !

Car la loi à présent adoptée met fin à cette interdiction de principe. Mais, le nouveau régime d'autorisation reste toutefois très encadré. Il repose sur certaines conditions. Le projet doit être scientifiquement pertinent, avoir une finalité médicale, ne pouvoir être conduit qu'avec des embryons humains et respecter des garanties éthiques. Sur ce dernier point, le texte précise que cette recherche ne pourra être menée « qu'à partir d'embryons conçus in vitro dans le cadre d'une assistance médicale à la procréation et qui ne font plus l'objet d'un projet parental ». Alors, grande avancée pour certains, déception pour les autres, était-il au final bien utile de changer la loi ? 

« Il faut être franc, aujourd’hui la loi telle qu’existe ne bloque pas les chercheurs s’ils se consacrent à de projets de recherche académique et fondamentale, précisait le Pr Marc Peschanski, directeur scientifique de l’I-Stem au Genopole d’Evry, un des premiers chercheurs à avoir travaillé sur les cellules souches embryonnaires humaines. Mais, aujourd’hui nous n’en sommes plus là, les équipes sont en train de passer au stade des applications cliniques ou industrielles. »
Par exemple, le Pr Philippe Ménasché à l’hôpital européen Georges Pompidou a fait une demande d’autorisation pour lancer un premier essai clinique chez l’homme de thérapie cellulaire sur les tissus cardiaques. « Et c’est à ce niveau que la loi nous bloque… » pointait le Pr Peschanski. L’interdiction n’encourageait en effet pas les directeurs d’hôpitaux à débloquer des investissements, ni les industriels à développer des partenariats avec les unités de recherche car ils avaient peur de se retrouver avec des procédures juridiques sur les bras. « Dans la mesure où les opposants à ces recherches en sont déjà à 11 procès contre l’Agence de biomédecine, je les comprends un peu… » regrettait le Pr Peschanski. Avec le vote de ce texte, ces partisans des cellule souches voient sans doute la fin d'un parcours du combattant pour mener à bien leurs recherches.