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La chronique du docteur Lemoine

Un bébé après 40 ans

Par le Dr Jean-François Lemoine

L’âge moyen de la grossesse ayant dépassé 30 ans en France, de plus en plus de femmes sont tentées de devenir mères après 40 ans : en France, environ 5 % des grossesses concernent des femmes de plus de 40 ans, deux fois plus qu'il y a 20 ans. La vérité des chiffres...

Rostislav_Sedlacek / iStock

Le record – dénoncé par tous les spécialistes – est indien : 71 ans. En France, en aucun cas au-dessus de 50 ans. L’espérance de vie de la femme, il y a plus d’un siècle, ne dépassait pas cet âge. Elle pouvait donc concevoir des enfants à peu près jusqu’à la fin de sa vie. Aujourd’hui, cette espérance est multipliée par deux ; en revanche, la durée de la fertilité n’a pas bougé. Une femme de 40 ans qui n’a pas encore d’enfant, pour des raisons professionnelles la plupart du temps, n’a pas encore atteint la moitié de son espérance de vie ; elle trouve cela parfaitement injuste. Mais sa fertilité est devenue faible.

Il y a une énorme différence entre l’homme et la femme. L’homme fabrique toute sa vie, jusqu’à sa mort, des spermatozoïdes. La femme naît avec un stock qui est constitué quand le fœtus a 3 mois ; à 40 ans, ses ovocytes ont donc 40 ans. Ils sont moins nombreux, et surtout, vieillissants. L’âge du père rentre aussi en ligne de compte pour la réussite d’une grossesse, mais sans commune mesure avec l’influence de celui de la femme, qui est l’élément déterminant de la fertilité. La part de l’échec est de 80 % pour la femme et de 20 % pour l’homme.

Au-delà de 45 ans, une femme rentre dans une zone où la grossesse est dangereuse, à risque, dans 20 ou 30 % des cas. Ce sont essentiellement des complications vasculaires, hypertension artérielle, diabète, accouchement prématuré, augmentation du nombre de césariennes… Une femme qui veut faire un enfant au-delà de 40 ans doit donc avoir un bilan cardiologique sérieux.

Pour le bébé, les risques sont en partie liés aux complications de la mère. La trisomie est également un problème : 2 à 3 % de survenue à l’âge de 40 ans, dix fois moins avant. Il existe toutefois un examen de dépistage particulièrement efficace.

En ce qui concerne les chances d’être enceinte, une femme de 30 ans a 80 % de chances d’avoir un bébé ; à 40 ans, 40-45 % avec d’énormes variations d’une femme à l’autre. Celle qui désire une grossesse après 40 ans doit consulter un spécialiste si elle n’obtient pas de résultat au bout de six mois d’une vie sexuelle régulière ; si l’on fait l’amour une fois par semaine, on a 15 % de chances d’avoir un enfant au bout d’un an, 80 % si on le fait tous les jours, car la femme n’est fertile qu’une journée par mois.

Pour aider la nature, le médecin va effectuer une stimulation ovarienne, avec des hormones en injection. Il va détecter la période idéale, et si le sperme du futur papa est normal, les rapports seront programmés ; pas très romantique, mais efficace. S’il existe un problème de sperme, la phase suivante sera l’insémination en plus de la stimulation. On prend les meilleurs spermatozoïdes pour les déposer directement dans l’utérus. Si les ovaires fonctionnent bien mais que tous ces traitements simples ont échoué, reste la fécondation in vitro : on met ensemble les ovocytes de la femme et le sperme de l’homme pour donner, dans une éprouvette, naissance à des embryons, qui seront ensuite implantés dans l’utérus de la future maman.

Un cas particulier : pour les femmes seules, n’ayant pas encore trouvé le futur papa, il est possible de congeler les ovocytes pour les utiliser plus tard. Une technique très au point… Avec cependant un bémol : cette solution pratique est interdite en France. Elle est heureusement possible en Espagne et de nombreuses jeunes Française y ont recours. Problème, le coût de la conservation et de l’implantation.

Au-delà de 45 ans, ces techniques ne marchent plus (sauf la congélation au préalable) et on doit faire appel à un don d’ovocytes. On va prélever, chez une donneuse jeune, un œuf, qui sera fécondé par le sperme du mari de la femme de 45 ans, puis placé dans l’utérus de la future maman. Enfin, si tout échoue, reste l’adoption… en sachant que c’est long, cher et pas facile.

Docteur Jean-François Lemoine

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