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Facteur de risque

Mort subite du nourrisson : boire et fumer pendant la grossesse multiplie les risques par 12

Par Raphaëlle de Tappie

Boire et fumer pendant la grossesse pourrait multiplier par 12 le risque de mort subite du nourrisson, première cause de mortalité en France pour les enfants de moins d'un an. 

Wojtek Skora/iStock

Chaque femme sait que pendant une grossesse, il est déconseillé de boire et de fumer. A cause de l’alcool, le bébé pourra souffrir à la naissance d’ETCAF (ensemble des troubles causés par l’alcoolisation fœtale) soit une série de handicaps physiques, sociaux, mentaux et émotionnels, surtout caractérisés par des déficiences neurologiques. Quant à la cigarette, elle exposerait le fœtus à plus de 4 000 produits chimiques. Qui plus est, fumer enceinte provoquerait une mauvaise transmission de l’oxygène et des nutriments au bébé. Le risque de grosse extra-utérine, de fausse couche, de mort fœtale in utéro, de naissance de prématurée ou encore de complications placentaires, est également accru. 

Une étude parue lundi 20 janvier dans la revue The Lancet insiste à nouveau sur l’importance d’arrêter l’alcool et le tabac pendant la grossesse. D’après les chercheurs, allier les deux pourrait multiplier par 12 le risque de mort subite du nourrisson. Ce syndrome, qui correspond au décès brutal et inattendu du bébé pendant son sommeil, constitue la première cause de mortalité en France pour les enfants de un mois à un an, avec environ 250 décès chaque année.

Pour leur étude, des chercheurs de l’université d’Harvard (Boston, États-Unis), du Center for Pediatric & Community Research à Sioux Falls (États-Unis) et de l’université de Stellenbosch (Afrique du Sud) ont examiné les données de santé de 10 088 femmes et plus de 12 000 fœtus. Dans l’ensemble, 66 bébés sont décédés, dont 28 du syndrome de la mort subite du nourrisson (SMSN). A chaque fois, la mère avait fumé et bu pendant sa grossesse. Ainsi, quand une mère boit et fume après le premier trimestre, le risque de mort subite est multiplié par 11,79. 

Des effets à long terme sur le placenta

Dans le détail, les effets de l’alcool et du tabac semblent se cumuler puisque le facteur de risque descend à 3,95 quand la mère boit mais ne fume pas et à 4,86 quand elle fume mais ne boit pas. Si les chercheurs ne sont pas encore certains des mécanismes biologiques en action, ils soupçonnent l’alcool et la nicotine d’altérer les circuits chimiques qui contrôlent la fonction cardiorespiratoire, le sommeil et l’éveil. La réponse immunitaire, inflammatoire et infectieuse de l’organisme à ces substances pourrait également jouer un rôle.

Enfin, ces dernières pourraient agir au niveau du placenta et nuire à long terme au fœtus. “Le tabagisme maternel et la consommation d'alcool ont également des effets directs sur le placenta, notamment sur la perfusion, le poids et la structure du placenta. On ignore actuellement si et dans quelle mesure ces actions physiologiques convergent chez un fœtus pour nuire à son développement et à sa survie, ainsi que les effets du moment précis et de la quantité de la double exposition, notent les chercheurs. Des recherches approfondies sur la façon donc les toxines de l’alcool et de la fumée agissent au niveau prénatal pour entraîner une mort subite liée au sommeil dans un temps postnatal sont nécessaires”, poursuivent-ils.

Et même si cette étude porte sur un nombre restreint de cas et qu’elle ne prouve pas de relation de cause à effet, elle porte un important message sanitaire, insistent les chercheurs. “Ces résultats confirment la recommandation du Center for Disease Control and Prevention, du Surgeon General des États-Unis et de l'Organisation mondiale de la santé de ne pas fumer ni boire pendant la grossesse et soulignent l'importance de la double exposition, qui représente le plus grand risque de mortalité infantile”, écrivent-ils. 

“Renforcer les messages de santé publique”

“Dans la mesure où de nombreuses femmes cessent de boire et de fumer seulement après avoir appris qu’elles sont enceintes, cette étude plaide fortement pour le dépistage de l’usage de ces drogues au début de la grossesse et pour intervenir dès que possible”,commentent les dirigeants de l’Institut National de la Santé américain qui ont encadré l’étude. Et de préconiser : “Un renforcement des messages de santé publique concernant les dangers de la consommation d’alcool et de tabac pendant la grossesse et chez les femmes qui prévoient de tomber enceinte.”

En mars, une étude américaine menée sur des lapins avait déjà montré que fumer pendant la grossesse augmentait les risques de mort subite du nourrisson. D’après ces résultats parus dans le journal HeartRhyth, l’exposition fœtale à la nicotine, même par l'intermédiaire d'une cigarette électronique ou d'un patch, entraînerait des modifications à long terme de la fonction cardiaque des bébés. Ces changements peuvent nuire à l'adaptation de leur potentiel d'action cardiaque et empêcher le réveil lors d’une apnée du sommeil.  

Outre l’arrêt du tabac et de l’alcool pendant la grossesse, pour éviter les risques de mort subite chez votre bébé, couchez-le sur le dos, que ce soit pour la nuit ou la sieste, recommandent les experts. Quand votre enfant atteindra l’âge où il peut se tourner lui-même sur le ventre, il ne sera plus nécessaire de le forcer à dormir sur le dos. S’il souffre de reflux gastro-oesphagin ou d’une malformation des voies respiratoires, consultez votre pédiatre pour savoir dans quelle position le coucher. Matelas mou et température trop chaude dans la chambre sont également à éviter.