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Maux de tête intenses

Maux de tête : révolution thérapeutique dans le traitement de l'algie vasculaire de la face

Par Dr Philippe Montereau

L’explication du mécanisme des algies vasculaires de la face, un des maux de tête les plus douloureux, semble avoir été trouvée. Une révolution du traitement s’annonce.

grinvalds/istock

L’algie vasculaire de la face est l’un des maux de tête paroxystiques dont la douleur est l’une des plus intenses connues. Ce trouble, bien qu'unilatéral, fait partie des "céphalées paroxystiques unilatérales". Il consiste en l’apparition brutale d’une douleur atroce autour de l’œil, comparée à une brûlure par un tisonnier brûlant, et qui s’associe à des signes vasomoteurs dans le territoire du nerf trijumeau (larmes, rougeur de la conjonctive, écoulement nasal…).

L’algie vasculaire de la face peut prendre 2 formes : épisodique ou chronique. La plupart des patients ont une forme épisodique qui consiste en des périodes de plusieurs semaines à plusieurs mois d’attaques de maux de tête suivie d'une rémission. Les personnes souffrant de la forme chronique n'ont pas de rémission ou, si elles ont un sursis, il est de moins de 3 mois par an. Ils surviennent par attaques avec plusieurs crises par jour (jusqu’à 8). Les traitements actuels sont très peu efficaces. Mieux comprendre ce qui déclenche ces crises pourrait permettre d’identifier de nouvelles cibles thérapeutiques et de nouveaux traitements.

Dans une nouvelle étude, la perfusion d'un neuropeptide appelé "peptide lié au gène de la calcitonine" (CGRP) déclenche des attaques d’algie vasculaires de la face, démontrant le rôle pivot de ce peptide dans cette maladie orpheline. Sur les 9 patients ayant une forme épisodique d’algie vasculaire de la face qui étaient en phase d’attaque, 8 algies ont été déclenchées après les perfusions de CGRP, contre une après le placebo. Parmi les malades qui étaient en dehors de la phase d’attaque, aucun des 9 participants n'a eu d'algie après le CGRP ou le placebo. Sept des 14 patients souffrant de la forme chronique ont eu un déclenchement de leur algie après la perfusion de CGRP, mais aucun après le placebo. Cette étude, qui marque un tournant dans la compréhension des algies vasculaires de la face, est publiée dans JAMA Neurology.

Une maladie orpheline de traitement

Compte tenu de la durée des crises aiguës (15 minutes à 3 heures), les traitements oraux disponibles sont généralement trop lents pour être utiles. L'oxygène et le sumatriptan injectable peuvent parfois être efficaces chez certains malades. Prévenir complètement l’apparition des attaques serait donc plus intéressant. Cependant, à ce jour, aucun traitement préventif spécifique contre l’algie vasculaire de la face n'a été mis au point.

Une injection de corticoïdes dans le nerf occipital, avec ou sans anesthésique local, pourrait être utile, de même que le vérapamil, le lithium et la mélatonine. Malheureusement, la proportion de malades non-répondeurs et les problèmes de tolérance fréquents et, en particulier chez les malades ayant une forme chronique épisodique, sont élevés. De plus un traitement qui a été efficace une fois ne le sera pas forcément la fois suivante.

Rôle pivot du peptide lié au gène de la calcitonine

Il était déjà connu que les taux dans le sang du "peptide lié au gène de la calcitonine" étaient élevés lors des attaques d’algies vasculaires de la face et que celles-ci pouvaient être déclenchées par une perfusion de nitroglycérine. Parallèlement, il a été observé qu'un traitement efficace des attaques normalisait les taux de CGRP dans le sang.

Cette étude démontre que la perfusion CGRP peut également déclencher des crises d’algie vasculaires de la face, mais uniquement chez les malades dont le trouble est déjà actif. Dans le cadre d'une étude rigoureuse, en double insu versus placebo, les malades souffrant d’une forme épisodique ou chronique de l’algie vasculaire de la face, ont été perfusés avec du CGRP ou un placebo et surveillés pendant 90 minutes ce qui amène toutes la garanties méthodologiques.

Une étude expérimentale

Le fait que des attaques d’algies vasculaire de la face puissent être déclenchées par une perfusion de CGRP chez les malades dont le trouble épisodique est déjà actif, mais pas chez les autres, témoigne du rôle du système nerveux central (le cerveau) dans l’apparition de cette maladie. Il ne s’agit pas simplement d’un déclenchement périphérique avec une réponse réflexe secondaire du nerf trijumeau. La nature fréquemment circadienne des attaques indique que la région hypothalamique postérieure est probablement à l’origine de cette susceptibilité centrale aux attaques. Ce qui semble confirmé par des données en neuro-imagerie fonctionnelle.

Les cerveaux des différents malades peuvent avoir des différences dans les seuils de déclenchement d’une attaque, même chez ceux dont le désordre est actif. Par exemple, dans cette étude, ceux avec une fréquence d'attaque naturelle supérieure étaient plus susceptibles d'être déclenchés que les autres.

Un nouvelle voie de traitement

Des études de phase III ont démontré l'efficacité des anticorps monoclonaux anti-CGRP, ou de leur récepteur, dans la prévention des formes aiguës et chroniques de migraine, et le premier d'entre eux vient d’être approuvé par les autorités de régulation dans cette indication.

Compte tenu de l'ensemble des données disponibles et de la présente étude, il est très probable que ces médicaments puissent également s'avérer utiles pour le traitement de l’algie vasculaire de la face. C’est l’objet des études en cours avec les anticorps monoclonaux anti-CGRP dans l’algie vasculaire de la face.

Nous sommes à l’aube d’une révolution thérapeutique pour des malades qui souffre d’une des maladies les plus douloureuses qui soient.