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Douleurs chroniques

Cannabis médical : les séniors américains de plus en plus accros

Par Mathilde Debry

Aux Etats-Unis, où le cannabis médical est légal dans 29 Etats, les séniors consomment de plus en plus de marijuana pour soulager leurs diverses douleurs dues à l'âge. 

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Alors qu'en 2006, les Américains n'étaient que 4,5 % des 50-64 ans à tirer sur un joint au moins une fois par an, ils sont aujourd'hui 7,1%, selon une étude. Le nombre de personnes âgées de 50 à 64 ans fumeuses de weed a augmenté de 57,8 % en moins de 10 ans au Etats-Unis. Si cette progression se poursuit au même niveau, la proportion de consommateurs de cannabis de plus de 50 ans s'élèvera à une personne sur deux d'ici une quarantaine d'années. "Ils viennent en nombre, curieux, cherchant de quoi soulager leurs douleurs et problèmes de sommeil", indique Marta Macbeth, consultante chez Octavia Wellness, une start-up qui cible en particulier les seniors.

Ce phénomène s’explique en grande partie par la légalisation du cannabis médical. "Je me réveillais souvent à cause de la douleur. Cela ne m’arrive plus", témoigne sur France Info Bryna, une californienne de 87 ans souffrant d’arthrite. Là-bas, l’herbe est légale depuis 20 ans, et depuis janvier dernier, même plus besoin d’ordonnance. "Je prenais du Vicodin (un médicament analgésique) mais je voulais arrêter. Et après quelques mois, j’ai pu arrêter. Je me suis rendue compte qu’en utilisant le vaporisateur avant d’aller me coucher, je dormais plus longtemps."

Dans les maisons de retraite 

Rien qu'en Californie, l'industrie de la marijuana légale devrait générer 6,5 milliards de dollars d'ici 2020. De nombreux magazins spécialisés ont ouvert, vendant du cannabis sous forme d’huile, de crèmes, de tisanes, de chocolat… D'après une étude récente, neuf personnes âgées sur dix sont en effet satisfaites du résultat."J’ai commencé quand j’étais dans la Navy, explique David, 68 ans. C’était il y a longtemps. Ici, je vais regarder les produits comestibles. C’est ça qui m’intéresse. Le reste, je le fais pousser chez moi depuis longtemps".

Marta Macbeth explique même que des vendeurs viennent présenter leur produit dans les maisons de retraites, qui leur organisent des réunions. "On en a eu une à San Jose (nord de la Californie) récemment et il y avait 400 personnes qui voulaient entrer, on était submergés", raconte-t-elle.

Question de santé publique

En France, le sujet est à la mode chez les politiques. Après que la ministre de la Santé Agnès Buzyn a déclaré que le cannabis médical "pourrait arriver en France", plusieurs élus PS, LREM, EELV et médecins demandent la légalisation en France du cannabis à "usage thérapeutique" dans une tribune publiée dimanche  8 juillet par Le Parisien.

"Produire du cannabis pour un usage thérapeutique en France n’est plus une option mais une nécessité. Comment ne pas déplorer le statu quo national sur cette question de santé publique ? Pourquoi maintenir le sceau de l’interdit et l’arsenal législatif et réglementaire qui l’accompagne à l’égard de plus de 300 000 patients français qui pourraient apaiser leur souffrance autrement ?", s’interrogent les signataires, parmi lesquels figurent, entre autres, le sénateur PS Rachid Témal, le maire PS de Strasbourg Roland Ries, les députés LREM Sonia Krimi, Jean-Baptiste Moreau, et Florent Boudié, le maire EELV de Grenoble Eric Piolle et le maire EELV du IIe arrondissement de Paris, Jacques Boutault.

Gestion de la douleur chronique

Concernant la gestion de la douleur chronique non due au cancer, une toute récente étude prospective publiée par The Lancet vient pourtant de démontrer que le cannabis n’est pas efficace. Le recrutement de la cohorte s'est déroulé du 13 août 2012 au 8 avril 2014. 1514 participants ont été interrogés, entre autres, sur les origines et la durée de la douleur chronique, la consommation de cannabis au cours de la vie et des 12 derniers mois, la prise d’opioïdes et l’existence ou non de troubles dépressifs ou anxieux généralisés.

Après quatre ans de suivi, 295 participants (24%) avaient consommé du cannabis pour soulager la douleur. Comparativement aux personnes n'ayant pas consommé de cannabis, les chercheurs ont constaté que les participants qui avaient consommé du cannabis avaient "un score de gravité de la douleur plus élevé". "Nous n'avons trouvé aucune preuve que l'usage de cannabis a réduit l'usage des opioïdes prescrits ou augmenté les taux d'abandon des opioïdes", ajoutent les scientifiques.