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Poisson menteur

1er avril, quand le mensonge devient un jeu : après on arrête ?

Par le Dr Jean-François Lemoine

Le poisson d’avril est une plaisanterie traditionnelle du 1er avril. Mais il faut expliquer aux enfants que cette tradition s’arrête le 2 et aux adultes que mentir est une petite déviance, voire une mauvaise habitude qui peut devenir une vraie maladie. 

PHOTOGRAPHIE/EPICTURA
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Les "poissons d’avril" font rire les grands et donnent l’occasion aux enfants d’accrocher quelques coloriages dans le dos de leurs parents. Cette coutume, dont on connait mal l'origine mai qui serait probablement née au Moyen-âge existe également à l'étranger. S'il n’y a pas lieu de craindre des dérives ce jour, dans certaines familles ou groupe d’amis, le prétexte de "poisson d’avril" est utilisé pour assener des vérités. Pourtant, il ne faut pas laisser au mensonge l’étiquette de "jeu charmant" !

Le mensonge a pris une place importante dans nos sociétés. L’enfant est volontiers menteur, sans que personne ne lui ait appris. Il s’agit chez lui d’un mécanisme de défense, de négation d’une réalité qui le gène. Chez nos politiques par exemple, le mensonge semble s’intensifier : la réalité n’est pas si simple à assumer et généraliser le mensonge en fait une banalisation bien pratique. Mais rappelons que la base de la vie en communauté présuppose quand même que l’autre dit la vérité. Est-ce normal de mentir, ou est-ce que cela signifie que quelque chose cloche chez une personne ? Normalité ou déviance du cerveau ? Cela dépend du type de mensonge, car il existe quatre catégories de menteurs.

1. Les mythomanes

La première catégorie, celle qui indiscutablement concerne la médecine, est la mythomanie. Avec une nuance : comme souvent dans le langage populaire, on détourne les termes médicaux et le "mytho" devient un  "baratineur" ou un "rêveur". Ces signes sont loin de la réalité de la mythomanie, une vraie maladie suscitant beaucoup de souffrance. Le mythomane ressent un besoin impérieux de mentir, parce qu’il trouve là une solution pour répondre au mépris qu’il éprouve de lui-même. C’est une "abjection de conscience", comme le dit si joliment Boris Cyrulnick. 

2. Le menteur "cynique et utilitaire"

Le menteur "cynique ou utilitaire" est le plus "répandu", celui que l'on rencontre le plus souvent. On ne parle plus de maladie. Le mensonge sert pour abuser et manipuler. Mais entre deux mensonges, ce menteur se calme, alors que le mythomane ment tout le temps, pour le simple plaisir d’attirer l’attention.

3. Le déni

Il existe une troisième catégorie, également une maladie : le "déni",  que l’on pourrait définir comme le refus de prendre en charge certaines réalités. Vous connaissez par exemple le "déni de grossesse", ces femmes qui accouchent sans savoir qu'elles étaient enceintes. 

4. La fausse vérité acceptable

Enfin, la médecine ne peut pas aborder le chapitre du mensonge sans évoquer une quatrième et dernière catégorie qui la concerne et que les médecins appellent pudiquement "la fausse vérité acceptable" : par exemple, le fait de mentir à son malade pour ne pas lui faire de la peine… Un débat qui, contrairement à ce qu’affirment de nombreux médecins est loin d’être tranché. Mentir pour soulager. Chacun en appréciera l’utilité. Et si possible avertira son médecin !

Les menteurs ne se soignent jamais spontanément

Les menteurs n’en parlent jamais à leurs médecins, même les grands mythomanes. Ils ne consultent pas spontanément. Cela se produit toujours dans le cadre d’une expertise judiciaire.

Mais difficile de faire la différence entre le "mytho" - menteur permanent victime d'une maladie- et le menteur occasionnel - une personnalité cynique - pour qui un traitement ne servira à rien. C'est pourtant important de faire la différence entre ces deux profils parce que la justice excuse le mytho, mais condamne l’autre. Cela nécessite un examen psychiatrique long et soigneux. Mais, en revanche, au bout il y a un traitement pour le mytho.