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Perceptions et émotions

Phobies : les arachnophobes surestiment la taille des araignées

Par Suzanne Tellier

Les phobiques surestiment la taille des araignées, selon une étude qui montre que les émotions altèrent la perception du réel. 

(Vickie Flores/LNP/REX/REX/SIPA)

Vous venez de frôler l’arrêt cardiaque en tombant nez à nez avec une araignée énorme et monstrueuse, l’abdomen chargé de touffes sombres, les huit yeux braqués sur vous, l’air dangereusement affamé. Comment cette espèce hybride, entre la tarentule et la veuve noire, a-t-elle pu s’introduire dans votre chambre, située en pleine zone urbaine d’un pays au climat tempéré ?

Il y a une explication rationnelle à cela. Ce prédateur qui vous traque n’est pas plus grand que la phalange de votre auriculaire et aurait tout le mal du monde à chasser autre chose qu’un moucheron. En fait, comme toutes les victimes d’arachnophobie, votre perception est altérée par votre anxiété.

Les émotions façonnent le réel

Une petite étude publiée dans la revue Biological Psychology montre en effet que les personnes qui craignent les araignées ont tendance à les voir bien plus grosses qu’elles ne le sont en réalité. Pour parvenir à ce constat, 27 participants ont été divisés en deux groupes – l’un atteint d’arachnophobie, et l’autre non.

Les chercheurs leur ont passé des images d’insectes et d’animaux (serpent, papillon, guêpe, lapin, mouche, oiseau, agneau). Les sujets devaient évaluer la taille réelle de ces espèces et préciser quel type d’émotion l’image suscitait chez eux.

Or, il est apparu que le groupe d’arachnophobie surestimait de manière significative la taille des araignées, contrairement à l’autre groupe. Concernant les autres espèces, les évaluations étaient similaires entre les deux groupes.

Par ailleurs, les chercheurs ont observé que cette surévaluation de la taille était liée à la fois à la crainte suscitée par l’image, mais aussi au caractère pertinent de cette image. Par exemple, les participants qui ont expliqué avoir peur des serpents ou des guêpes n’ont pas surestimé leur taille.

Pour les chercheurs, cela signifie « la distorsion de la taille est modulée par la pertinence du stimulus du point de vue de l’observateur, ainsi que par l’aversion qu’elle génère. Nous suggérons que la valence (qualité intrinsèquement agréable ou désagréable d'un stimulus ou d'une situation, ndlr) et la pertinence attribuée à la situation, jouent toutes deux un rôle dans la perception de la taille ». Ces travaux montrent en tout cas que les émotions influencent notre interprétation du monde tangible, et que chacun développe une expérience du réel qui lui est propre.