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181 participants

Dengue : les asymptomatiques peuvent transmettent le virus aux moustiques

Par Léa Surugue

Les personnes atteintes de la dengue mais asymptomatiques pourraient transmettre le virus et contribuer à de nouvelles infections. Une découverte qui devrait transformer la vision des épidémiologistes.

DURAND FLORENCE/SIPA

C’est un cercle vicieux. Les moustiques aedes aegypti transmettent la dengue aux humains, mais ces derniers peuvent aussi leur retourner la faveur, s’ils sont piqués une fois malades. Cette dynamique de propagation du virus contribue à augmenter le nombre d’insectes pouvant potentiellement infecter de nouvelles personnes, et donc l’ampleur de l’épidémie.

Toutefois, les biologistes pensaient jusqu’ici que l’infection du moustique par l'homme n’était possible que si la personne présentait des symptômes particulièrement graves de la dengue.  

Pour la première fois, une équipe de l’Institut Pasteur remet en cause cette vision, en montrant que les personnes infectées, mais qui ne présentent pas ou peu de symptômes, peuvent aussi transmettre le virus aux moustiques. Or, les asymptomatiques représentent trois quarts des 390 millions de cas de dengue annuels.

 

Identifier les participants

Pour arriver à ces résultats, les chercheurs ont dû recourir à une ingénieuse sélection des participants. « Par définition, les personnes asymptomatiques ne savent pas qu'elles sont porteuses de la dengue. Tout le défi a donc été de les repérer pour prouver nos hypothèses », explique Louis Lambrechts, co-auteur de l’étude, interrogé par PourquoiDocteur.

L’équipe a d'abord collaboré avec des médecins pour repérer les malades de la dengue. Ils ont ensuite testé les proches de ces derniers, qui vivaient dans le même environnement, et avaient donc la même possibilité de se faire piquer par un aedes aegypti. Après plusieurs essais, les scientifiques ont réussi à identifier 181 participants, infectés mais asymptomatiques.

Les chercheurs les ont ensuite mis en contact avec des moustiques sains, qui les ont piqués. Enfin, dernière étape : détecter des traces éventuelles du virus chez les insectes. D’après leurs analyses, il y a bien eu transmission des personnes asymptomatiques vers les moustiques.

 

Repenser les modes de transmission

L’intérêt de cette découverte est de remettre en cause un dogme bien établi de l’épidémiologie de la dengue, en soulignant le rôle joué par les malades asymptomatiques dans la diffusion de l'épidémie. D’autant que, comme ceux-ci continuent à vaquer à leurs occupations quotidiennes, ils ont plus de chance d’entrer en contact avec des moustiques.

« On se rend compte que l’on a peut-être ignoré un mode de transmission crucial de la dengue. La vision des épidémiologistes de la dengue au sujet de la propagation de la maladie va donc devoir évoluer », observe Louis Lambrechts.

Néanmoins, pour le moment, les chercheurs ne sont pas capables de quantifier l’ampleur du phénomène, ou de préciser quelle est la part exacte des la transmission pour laquelle les asymptomatiques sont responsables.

« En termes d’implications cliniques, pour les malades, cela ne va pas encore transformer leur quotidien. Mais en comprenant mieux les modes de transmission, on avance dans le contrôle de l’épidémie. On peut aussi imaginer que nos découvertes permettent de repenser les campagnes de vaccination, pour répondre aux risques posés par les asymptomatiques, et pour protéger un plus grand nombre de personnes », conclut Louis Lambrechts.