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Mesure de l’oxygénation cérébrale

Traumatismes crâniens : vers une meilleure prise en charge des blessés

Par la rédaction

Des chercheurs français ont mis au point une nouvelle approche pour mesurer l’oxygénation cérébrale grâce à l’IRM. Elle pourrait à terme permettre de mieux prendre en charge les traumatismes crâniens.

SUPERSTOCK/SUPERSTOCK/SIPA

Selon une étude parue le 14 mai dans le Journal of the American Medical Association (JAMA), les traumatismes crâniens connaissent un boom aux Etats-Unis. Là-bas, entre 2006 et 2010, les visites aux urgences pour commotion ou traumatisme crânien indéfini ont bondi de 30 % pour atteindre 2,5 millions de consultations. C’est huit fois plus que la hausse du nombre de visites générales aux urgences. Et en France, ce phénomène inquiète aussi de plus en plus les chercheurs. Ces derniers estiment qu'il en survient 150 000 par an, au domicile, au travail, dans les maisons de retraite, les cours d’école ou sur les terrains de sport. Certains experts français parlent même d’une « épidémie silencieuse » de traumatismes crâniens légers dans le pays. Face à ce constat, une équipe de chercheurs français (1) vient de mettre au point une nouvelle approche très prometteuse visant à améliorer leur prise en charge. Des résultats inédits publiés il y a quelques jours dans le Journal of Cerebral Blood Flow and Metabolism.

Une nouvelle approche IRM
En préambule de leurs travaux, ces scientifiques rappellent que dans des conditions normales et à défaut de pouvoir le stocker, « le cerveau ne supporte pas d’être privé d’oxygène plus de quelques minutes sans risque de provoquer de graves séquelles. » Ils soulignent ainsi qu'après un accident (traumatisme crânien ou accident vasculaire cérébral - AVC), « c’est l’oxygénation cérébrale que les équipes d’urgence et les médecins tentent de restaurer le plus rapidement possible. » « Plus les médecins seront rapides et précis, plus les chances de récupérer seront grandes », précisent-ils. Pour y arriver, cette équipe multidisciplinaire a mis au point une nouvelle approche pour mesurer l’oxygénation cérébrale grâce à l’IRM. En plus d’être non invasive, cette technique identifie précisément les zones du cerveau les moins oxygénées. Selon eux, « elle pourrait à terme guider les interventions thérapeutiques pour les rendre plus précises, moins risquées et plus efficaces », écrivent les chercheurs.

Une approche utilisable immédiatement chez l’homme
En détail, cette nouvelle approche d’IRM caractérise la saturation tissulaire en oxygène du cerveau, c’est-à-dire la quantité d’oxygène présente dans la microvascularisation tissulaire (notée StO2). Grâce à cette technique, les chercheurs ont ainsi pu observer une réduction importante du niveau d’oxygénation cérébrale dans un modèle animal d’accident vasculaire cérébral (AVC) ischémique et, à un moindre degré, après un traumatisme crânien. En permettant de cartographier l’oxygénation cérébrale, une hétérogénéité régionale de StO2 a été mise en évidence dans l’AVC, le traumatisme crânien et un modèle de tumeur cérébrale. 
Cette approche innovante présente plusieurs avantages, dont celui d’être utilisable immédiatement chez l’homme. Par ailleurs, l’examen IRM ne nécessite pas d’injection d’un traceur radioactif, contrairement à l’imagerie par émission de positon, technique de référence. L’IRM permet également d’obtenir des cartes de StO2avec une meilleure résolution spatiale. Enfin, un examen IRM est moins coûteux qu’un examen TEP, et les imageurs IRM sont plus répandus en France que les imageurs TEP.

Une technique qui permettrait aussi de mieux traiter les tumeurs 
Résultat de ce développement, plusieurs applications cliniques de cette nouvelle approche sont envisageables d'après ces chercheurs. D'une part, chez les patients souffrant d’un traumatisme crânien. Cette cartographie pourrait en effet contribuer à déterminer les zones cérébrales les moins bien oxygénées. Le suivi et la stratégie thérapeutique pourront ainsi être adaptés au mieux.
D'autre part, chez les patients atteints d’un AVC, cette technique devrait permettre de mieux identifier la zone de tissu cérébral ischémique susceptible de récupérer après traitement.
Enfin, certaines tumeurs cérébrales malignes présentent des zones mal oxygénées, connues pour être celles qui résistent aux traitements comme la chimiothérapie ou la radiothérapie. « On soupçonne fortement que ces zones mal oxygénées abritent des cellules souches tumorales à l’origine de la récidive tumorale. Mieux les cartographier permettrait d’adapter et personnaliser les traitements », espère l'équipe. 
« Dans quelques années, nous pourrions imaginer que la cartographie précise de l’oxygénation du cerveau nous permette de délivrer les médicaments au bon endroit ou bien de mieux paramétrer l’intervention chirurgicale pour faire baisser l’hypertension intracrânienne », conclut Emmanuel Barbier, directeur de recherche Inserm.

(1) Des travaux réalisés par une équipe multidisciplinaire au sein de l’Institut des Neurosciences de Grenoble (GIN, Inserm / Université Grenoble Alpes / CHU de Grenoble) associant physiciens, biologistes et médecins (neurologues et anesthésistes-réanimateurs).