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Stigmatisation

Perte de poids : pourquoi faut-il éviter de mettre la pression aux ados ?

Par Stanislas Deve

La stigmatisation liée au poids "intériorisée" chez l’adulte est souvent associée à une pression familiale et sociétale durant l’adolescence, selon une étude.

Liudmila Chernetska / istock
Certaines personnes sont, de par leur profil et leur histoire, beaucoup plus à risque de souffrir de stigmatisation du poids "intériorisée", c’est-à-dire de s’appliquer à eux-mêmes des stéréotypes négatifs liés à l'obésité.
Les plus exposés à cette auto-stigmatisation sont d’abord ceux qui, à l’adolescence, ont ressenti une pression de la part de la famille, avec des remarques et des taquineries liées au poids, mais aussi de la part des médias, pour perdre des kilos.
Les femmes et "les personnes ne s’identifiant pas comme hétérosexuelles" sont également plus à risque, tout comme les gens "désavantagés socio-économiquement" qui ont passé la majorité de leur vingtaine "sans éducation, ni emploi ni formation".

"La stigmatisation du poids 'intériorisée', c’est lorsque les gens s’appliquent à eux-mêmes des stéréotypes négatifs liés à l'obésité, comme par exemple penser qu'ils sont, du fait de leur poids, moins attrayants, moins compétents ou moins importants en tant que personne. C’est un problème majeur de santé publique [car] ils sont plus susceptibles de développer des troubles de santé mentale ou de l’alimentation, et de ne pas rechercher de traitement médical."

Or, d’après une nouvelle étude publiée dans la revue The Lancet Regional Health – Europe, certaines personnes sont, de par leur profil et leur histoire, beaucoup plus à risque de souffrir de cette "auto-stigmatisation" liée au poids, qui s’ajoute à une discrimination subie "banalisée".

Une stigmatisation du poids plus forte chez les adolescents ayant subi des pressions

Dans le cadre de leurs travaux, les chercheurs de l’Université de Bristol, au Royaume-Uni, ont analysé les données d’une vaste enquête appelée "Children of the 90s". A travers des questionnaires, celle-ci a recueilli les différences en matière de stigmatisation intériorisée du poids chez plus de 4.000 personnes âgées de 31 ans, en fonction du sexe, de l'origine ethnique, des facteurs socioéconomiques, de l'orientation sexuelle, de la famille et des influences sociales dans l'enfance et l'adolescence.

Résultat, il apparaît que les participants les plus exposés à cette stigmatisation intériorisée sont d’abord ceux qui, à l’adolescence, ont ressenti une pression de la part de la famille, avec des remarques et des taquineries liées au poids, mais aussi de la part des médias, pour perdre des kilos. Et ce, indépendamment des "différences d’indice de masse corporelle" entre les personnes, précisent les scientifiques dans un communiqué. L'intimidation à l'adolescence (à 17 ans) et à l'âge adulte (23 ans) était également associée de manière indépendante à une plus forte stigmatisation intériorisée du poids.

Poids : plus on est désavantagé socio-économiquement, plus on s’auto-stigmatise

Les personnes pointées du doigt à l’adolescence ne sont pas les seules promptes à s’auto-flageller. L’étude révèle que les femmes et "les personnes ne s’identifiant pas comme hétérosexuelles" sont également plus exposées à un risque accru de stigmatisation du poids intériorisée, tout comme les gens "désavantagés socio-économiquement" qui ont passé la majorité de leur vingtaine "sans éducation, ni emploi ni formation", ou dont les mères avaient "peu de qualifications scolaires".

Il devient "crucial de réduire la stigmatisation du poids et ses conséquences en changeant la façon dont nous parlons du poids dans les médias, dans les espaces publics et dans les familles, et la manière dont nous réagissons à l'intimidation dans les écoles, les lieux de travail et dans d'autres contextes", concluent les chercheurs, qui prévoient maintenant "d'explorer en détails les processus psychologiques par lesquels ces facteurs sociaux peuvent influencer cette stigmatisation du poids intériorisée".