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Alcoolo-dépendance

Traitement de l’alcoolisme : le grand retour du baclofène n'est pas la solution miracle

Par Mathilde Debry

En juin 2020, le baclofène, traitement de l'alcoolo-dépendance, avait été retiré du marché. Le Conseil d'Etat a annulé cette suspension dans une décision en date du 25 novembre.

OlegEvseev / istock.
Le baclofène sera finalement de retour sur le marché dans quelques semaines.
"Le seul moyen dont on dispose actuellement pour combattre efficacement l'alcoolisme, c’est une prise en charge globale du patient."

C’est un vrai feuilleton judiciaire. Le Conseil d’état a finalement annulé la décision de suspension de l’autorisation de mise sur le marché (AMM) du Baclocur, médicament à base de baclofène, utilisé pour traité l’alcoolo-dépendance. "En conséquence, ce médicament peut être commercialisé conformément à son autorisation de mise sur le marché, octroyée par l’ANSM en octobre 2018", précise l’ANSM dans un communiqué.

La dose maximale indiquée est de 80mg/jour, selon l'ANSM

A la suite de la décision de suspension des autorisations de mise sur le marché des spécialités Baclocur (10, 20 et 40 mg) prise par le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise le 17 juin 2020, l’ANSM avait saisi le Conseil d’Etat d’un pourvoi en cassation. Le Conseil d’Etat a annulé cette décision de suspension le 25 novembre 2020.

"L’accès au baclofène dans l’alcoolo-dépendance est toujours possible pour les patients dans le cadre de la recommandation temporaire d’utilisation (RTU) en l’absence de la commercialisation d’un médicament disposant d’une autorisation de mise sur le marché dans l’alcoolo-dépendance", précise l’ANSM.

L’ANSM rappelle, que ce soit dans le cadre de la recommandation temporaire d’utilisation ou dans celui de l’ autorisation de mise sur le marché, que la dose maximale indiquée est de 80mg/jour, compte tenu du risque accru de survenue d’effets secondaires au-delà de cette posologie. Les risques liés à l’utilisation du baclofène augmentent avec la dose, qui fait débat chez les professionnels de santé. 

"Les médicaments à eux seuls ne peuvent pas arriver à bout de l'alcoolisme"

"Le baclofène peut soigner certains patients atteints d’alcoolisme. On a pu le constater, ce sont des réalités cliniques. Et, c’est important de le souligner, nous n’avons pas besoin de prescrire des fortes doses pour avoir de bons retours. Le message que je veux faire passer avec mes confrères, c’est en quelque sorte qu’il faut laisser faire. Il faut laisser le baclofène trouver ses patients, ce qui n’est pas le cas pour l’instant", explique Amine Benyamina, chef de service à l’hôpital Paul Brousse spécialisé dans l’addictologie et président de la Fédération française d’addictologie. "Pour traiter l'addiction à l’alcool, notre arsenal thérapeutique nous met bien des médicaments à disposition qui ne sont ni plus, ni moins efficaces que le baclofène", poursuit le professionnel de santé.

Amine Benyamina rappelle en conclusion :"baclofène ou pas baclofène, les médicaments à eux seuls ne peuvent pas arriver à bout de cette maladie, qui est une pathologie multifactorielle. Le seul moyen dont on dispose actuellement pour combattre efficacement l'alcoolisme, c’est une prise en charge globale du patient. C’est-à-dire un travail de psychologie, de psychothérapie, un aménagement de l’environnement social et la prise de médicaments qui ont l’autorisation de mise sur le marché (AMM)".

En France, on estime à 5 millions le nombre de personnes ayant des difficultés médicales, psychologiques et sociales liées à leur consommation d'alcool.