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Neurobiologie

Comment le sport donne du plaisir

Par La rédaction

En bloquant des récepteurs spécifiques dans le cerveau des souris, des chercheurs de l'Inserm ont pu réduire de 20 % à 30 % leur capacité physique. Et ont ouvert des pistes pour comprendre les circuits de la motivation. 

Rémy de la Mauvinière AP/SIPA

 


Dossier réalisé en partenariat avec

Science et Santé, le magazine de l'Inserm 

 

« Faire du sport ». Tel était, en début d’année, la principale et ô combien louable résolution des Français selon le Baromètre Sport-Santé 2013. C’est que, dans une société très sédentaire, renouer avec le plaisir du mouvement à pied ou à vélo, dans un stade ou un gymnase, en ville ou en forêt, en mer ou dans les airs…, « produit notamment des effets bénéfiques sur les métabolismes, qu’il s’agisse de celui des graisses, en favorisant la baisse du cholestérol, ou de celui des sucres, en diminuant le glucose sanguin et en aidant à réguler la glycémie et le poids », plaide Jean-François Toussaint, directeur de l’Institut de recherche biomédicale et d’épidémiologie du sport (Irmes).


Si les bénéfices du sport sur la santé sont aujourd'hui scientifiquement bien établis, les mécanismes neurobiologiques expliquant la motivation des uns à pratiquer régulièrement une activité sportive et la « flemmardise » des autres sont, quant à eux, longtemps demeurés mystérieux. 

Certes, voilà une dizaine d’années que l’on sait qu’une séance d’exercice physique, chez le sportif entraîné, active le système endocannabinoïde, un système impliqué dans la gestion de nombreuses fonctions cérébrales (humeur, anxiété, prise alimentaire…).
Depuis, en 2009, Francis Chaouloff, directeur de recherche Inserm au Neurocentre Magendie a mis en évidence que des souris auxquelles on a enlevé le principal récepteur aux cannabinoïdes dans le cerveau, nommé « récepteur aux cannabinoïdes de type 1 (récepteur CB1) », courent 20 à 30 % moins longtemps sur les roues d’exercice placées dans leurs cages.

Récemment, le chercheur vient de proposer un scénario expliquant pourquoi et comment l’absence de ces récepteurs diminue les performances des rongeurs modifiés génétiquement. « Selon notre hypothèse, au début et pendant toute la durée d’un exercice physique, des flots d’endocannabinoïdes sont libérés dans le cerveau et se fixent sur les récepteurs CB1, dit-il. Leur activation dans une région cérébrale particulière (l’aire tegmentale ventrale), freine la libération du neurotransmetteur GABA, lequel inhibe l’activité des neurones dopaminergiques impliqués dans les circuits cérébraux de la motivation et de la récompense. »

Résultat des courses : en désinhibant l’activité des neurones dopaminergiques, les récepteurs CB1 contrôlent positivement la motivation pour courir. Et voilà très certainement pourquoi les souris sans récepteurs CB1 ne ressentent pas l’exercice comme une récompense et donc un plaisir, ce qui réduit leur degré de motivation. Ces souris mettent ipso facto moins d’ardeur à faire tourner leurs roues que leurs congénères encore dotées des fameux récepteurs CB1.

Comment démontrer que ceux-ci agissent bien sur la motivation ? Grâce à une expérience planifiée dans un futur proche qui forcera les souris à accomplir un effort (comme appuyer sur un levier) pour accéder à la roue et pouvoir courir. « Si les souris mutantes renoncent rapidement à appuyer sur le levier, nous tiendrons alors la preuve définitive que les récepteurs CB1 jouent un rôle crucial dans la motivation pour courir », assure Francis Chaouloff. 

 

 

Philippe Testard-Vaillant

Sciences et Santé, le magazine de l'Inserm