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QUESTION D'ACTU

Diagnostic pré-implantatoire

Les bébés médicament en gestation en France

Le premier « bébé médicament » français pourrait voir le jour d'ici quelques mois. Cette technique suscite beaucoup d'espoirs même si les chances de réussite ne dépassent pas les 10 %.





Adam Nash a aujourd'hui 8 ans. A en croire la presse américaine, ce jeune garçon qui fut le premier « bébé médicament » au monde, se porte à merveille, ainsi que sa soeur aînée. Molly a maintenant 14 ans. Or, à cause de la maladie de Franconi dont elle souffrait, ses médecins ne lui donnaient que dix ans à vivre, à l'absence de greffe de moelle. Les cellules saines d'Adam ont donc bien sauvé sa grande soeur.
Dans le monde, une dizaine d'autres « bébés du double espoir » ont vu le jour depuis. Le dernier est né en Espagne le 12 octobre. En France, cette technique est autorisée depuis la promulgation des lois de bioéthique de 2004 et d'un décret en décembre 2006.
Sur le papier, le principe est simple : tout commence par une FIV. Les embryons obtenus font ensuite l'objet d'un diagnostic pré-implantatoire (DPI) pour sélectionner ceux qui sont sains mais aussi compatibles avec le système immunitaire du frère ou de la soeur aînée atteint d'une maladie génétique. Le ou les embryons répondant à cette double exigence sont ensuite implantés dans l'utérus de la mère. Quelques jours après la naissance, une greffe de cellule saine pourra être pratiquée au profit de l'aîné. 8 couples en attente

Depuis que cette technique est autorisée, « l'agence de biomédecine a reçu 8 demandes », explique le Pr François Thépot, adjoint au directeur médical et scientifique de l'Agence. Et la première naissance pourrait intervenir d'ici quelques mois puisqu'un couple est en traitement à l'hôpital Antoine-Béclère (Clamart). Un chiffre a priori modeste qui s'explique notamment par le fait que la loi encadre scrupuleusement cette pratique. Les dossiers ne sont retenus que si l'enfant est atteint d'une maladie héréditaire grave pour laquelle aucune autre issue thérapeutique n'a été trouvée. Il s'agit souvent de drépanocytose ou de bêta-thalassémie. Pour ces couples, ce double DPI représente le dernier espoir de sauver leur enfant.
Mais, les chances de réussite sont plutôt maigres. « En fait, nous avons 3 chances sur 4 d'obtenir un embryon sain et ensuite une chance sur quatre que ces embryons soient en plus histocompatibles avec le patrimoine génétique du frère ou de la soeur, soit 18 % de chances de réussite, explique le Dr Nelly Frydman, responsable du laboratoire de FIV à l'hôpital Antoine Béclère, le seul centre de DPI à s'être lancé dans l'aventure. Et 18 %, nous savons pertinemment que c'est faible. D'autant que les femmes ont souvent déjà eu deux ou trois enfants et sont âgées de plus de trente ans. Ce qui complique la tâche ».
« En plus, les expériences internationales nous enseignent que dans la réalité, les chances de réussite tombent aux alentours de 10 %, » indique le Dr Julie Steffan, généticienne à l'hôpital Necker et membre de l'équipe qui prend en charge les couples. En revanche, la bonne nouvelle, c'est qu'une fois pratiquée, ces greffes intrafamiliales ont entre 70 et 90 % de chances de ne pas être rejetées. Les parents, eux, ne veulent retenir que la dose d'espoir supplémentaire. Du côté des professionnels, les bébés du double espoir ne font pas l'unanimité. Certains regrettent que le sort des embryons sains, mais non compatibles, soit resté dans le flou . D'autres continuent de s'interroger sur l'aspect éthique : concevoir un enfant pour en guérir un autre n'est peut-être pas neutre. « Et les enfants conçus naturellement pour sauver leur aîné, personne ne s'intéresse à leur devenir, lâche le Dr Frydman. Tout le monde s'en lave les mains ! Quand j'étais interne, on conseillait aux parents qui avaient un premier enfant atteint d'une maladie héréditaire d'en faire un deuxième. Mais, c'est les envoyer à la loterie ! »

 

Questions au Dr Nelly Frydman, responsable du laboratoire de FIV à l'hôpital Antoine-Béclère

La loi pose problème


Pourquoi l'hôpital Antoine Béclère est le seul centre à s'être lancé dans l'aventure des bébés du double espoir ?
Dr Nelly Frydman
: Les deux autres centres de diagnostic préimplantatoire (DPI), que sont Montpellier et Strasbourg, considèrent que la loi est mal faite. Ils estiment que le législateur ne s'est pas assez  « mouillé » sur le devenir des embryons qui sont sains mais pas compatibles. C'est effectivement une question fondamentale, mais nous ne voulions pas nous défiler parce que la demande existe. Nous sommes donc les seuls à y être allés. Bien sûr, en consultation, nous interrogeons toujours les couples sur ce qu'ils souhaitent faire de ces embryons, bien que notre psychiatre estime que nous les faisons souffrir. Mais, tous les couples nous répondent qu'ils n'en veulent pas. La plupart du temps, ils ont déjà fait un 2e, voire un 3e enfant qui n'était pas compatible. Ils ne viennent pas nous voir pour refaire ce qu'ils ont déjà tenté naturellement. C'est compréhensible.

Que proposez-vous pour ces embryons sains et non compatibles ?
Dr N.F.
Nous proposons aux couples de les congeler. C'est une façon de repousser le problème et de laisser du temps aux personnes que nous prenons en charge. D'ailleurs, en pratique, le premier couple sur lequel nous avons fait un DPI d'histocompatibilité a accepté le transfert d'un embryon sain mais non compatible après l'échec d'un transfert d'embryon compatible. C'est comme ça l'être humain…

Ces couples sont-ils suivis psychologiquement ?
Dr N.F
. Une psychiatre assiste aux consultations et ils peuvent faire appel à elle tout au long du parcours. Mais ils le font rarement, parce que ces couples savent ce qu'ils veulent.  

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