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12 morts en 10 jours

Libéria : la piste d'une intoxication alimentaire

Par Anne-Laure Lebrun

Une semaine après la mort suspecte de 12 personnes au Libéria, les investigations se poursuivent. La piste d'une intoxication est explorée. 

UNMEER/Simon Ruf

La mort inexpliquée de 12 personnes au Libéria fait à nouveau trembler le pays. En 10 jours, cette maladie inconnue a frappé 21 personnes dans la province de Sinoe, à 4 heures en voiture de la capitale, Monrovia, ainsi que dans cette dernière.

Virus, bactéries, parasite ? Pour le moment, personne ne sait ce qui a pu terrasser si rapidement cette dizaine de personnes. La forte fièvre, les vomissements, la diarrhée et les maux de tête ont immédiatement fait penser au virus Ebola ou à la fièvre de Lassa. Mais vendredi 28 avril, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a précisé que tous les échantillons testés sont revenus négatifs pour ces deux virus. Un ouf de soulagement qui laisse place aux interrogations.


Un effet de groupe

« Je suis un peu comme vous en ce moment. Je m’interroge beaucoup, confie à Pourquoidocteur le Pr Denis Malvy du service de maladies infectieuses du CHU de Bordeaux et membre de l’équipe Inserm Maladies infectieuses dans les pays à ressources limitées. Il semble qu’il y ait un effet de groupe. Cela pourrait être un empoisonnement ou une intoxication collective sévère. Dans ce cas, cela devrait rester circonscrit ».

En effet, parmi la vingtaine de malades, plusieurs auraient participé à des funérailles dans la province de Sinoe. Sur le terrain, les experts prélèvent des échantillons de la nourriture et des boissons servies à la cérémonie. Ils cherchent également à savoir si des denrées ont été transportées, notamment dans la capitale Monrovia, où des cas ont été signalés. Les analyses sont actuellement en cours aux Centres de prévention des maladies américains (CDC) à Atlanta. L’agent pathogène ne devrait pas être identifié avant plusieurs semaines.

La peur d'une épidémie 

« Si ce n’est pas une intoxication, il faudra s’assurer que ce n’est pas l’émergence d’une épidémie, en particulier une flambée qui ressemblerait à Ebola », souligne le spécialiste français, ajoutant que si épidémie il y a, « nous le saurons très vite ».

Dix mois après la fin de l’épidémie d’Ebola, la crainte de voir le scénario se rejouer est palpable. Des inquiétudes notamment suscitées par un affaiblissement des systèmes de santé dans les pays frappés par cette fièvre hémorragique. « Mais avec l’aide des Américains, le système de surveillance au Libéria s’est fortement renforcé, structuré et densifié, et est capable de réactivité. La preuve avec ce que l’on observe aujourd’hui. C’est malheureux de détecter un événement morbide, mais c’est le signe que le pays est prêt à répondre aux alertes », relève le Pr Malvy qui connaît bien le Libéria pour y avoir mené des essais cliniques en pleine épidémie d’Ebola.

En attendant les résultats des CDC, les patients hospitalisés à l’hôpital Francis Grant dans la province de Sinoe reçoivent des antipaludéens, des antibiotiques ainsi que des antidouleurs. Des équipes de l’OMS collaborent étroitement avec les autorités sanitaires libériennes afin de leur apporter un soutien logistique et personnel. A l’instar d’Ebola, les malades sont isolés, les proches sont recherchés pour être examinés, et les rites funéraires déconseillés.