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Congrès de cardiologie

Les bénéfices du sevrage tabagique après 70 ans

Par Cécile Coumau

Entre 70 et 79 ans, le sevrage réduit les risques de décès de 27%. Réunis en congrès à Paris, les cardiologues insistent sur les bénéfices immédiats pour le coeur et les poumons. 

Franklin Reyes/AP/SIPA

« Ne plus fumer, c’est une perte d’une partie de moi-même », « La cigarette, c’est ma compagne de tous les jours. Par quoi je vais la remplacer ? », « A mon âge, à quoi bon arrêter de fumer ? Le mal est fait ! ». Le Dr Patrick Dupont, tabacologue à l’hôpital Paul Brousse à Villejuif, a déjà entendu ce type de réflexions. Elles sont typiques des plus de 65 ans qui arrivent souvent sous la contrainte dans les consultations de tabacologie.
Certes, aujourd’hui environ 10% des seniors sont fumeurs et plus de 5% des patients qui fréquentent ces consultations ont plus de 65 ans mais bon nombre de personnes âgées pensent que le sevrage tabagique, ce n’est pas pour eux. Et ils ne sont pas les seuls à le penser. « Beaucoup de médecins estiment qu’à leur âge, on ne va pas leur enlever ce petit plaisir. »
Et ils ont tort ! « En effet, 32% des personnes de plus de 65 ans interrogées dans une étude américaine souhaitaient arrêter dans les six mois et 28% avaient déjà fait une tentative dans l’année. C’est loin d’être négligeable ! Je pense donc que l’on ne leur demande pas assez si elles souhaitent arrêter de fumer et on les adresse en consultation de tabacologique uniquement quand ils ont un problème de santé », regrette Patrick Dupont.


Les cardiologues réunis actuellement en congrès, à Paris, pour les Journées européennes de la Société française de cardiologie, tiennent d’ailleurs à lutter contre cette idée reçue qui voudrait que le sevrage tabagique n’est pas fait pour les seniors. Selon eux, il n’est jamais trop tard pour tenter d’en finir avec la dépendance au tabac. Les études le prouvent. Entre 70 et 79 ans, le sevrage réduit les risques de décès de 27%. Et sur les accidents coronariens, « l’impact est encore plus net parce que le risque de faire un infarctus est surtout lié au fait d’être consommateur en temps réel, insiste le Pr Daniel Thomas, cardiologue à la Pitié-Salpêtrière. Contrairement au cancer, la durée du tabagisme n’est pas l’élément le plus important.


Ecoutez le Pr Daniel Thomas, cardiologue à la Pitié-Salpêtrière : « Dès qu’on arrête de fumer, on supprime ce risque de thrombose. »



Et le cœur n’est pas le seul à bénéficier d’un sevrage tabagique, même tardif. Les poumons peuvent aussi retrouver une sorte de seconde jeunesse. Les pneumologues sont formels, avec la mise sous oxygène, l’arrêt du tabac est la seule intervention ayant montré un effet favorable sur l’évolution de la broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO). Globalement, cesser de fumer ralentit le déclin du volume expiratoire qui redevient identique à celui des non-fumeurs. Or, on estime que 15% des plus de 65 ans sont touchés par la BPCO.


Faut-il malgré tout une prise en charge différente pour les fumeurs âgés ?
Les études sont rares sur le sujet mais « il semblerait que les plus de 60 ans ont la même capacité à arrêter de fumer que les plus jeunes », indique Daniel Thomas. Une certitude en revanche, plus le sevrage est tardif, plus la motivation est forte. « Sans doute parce qu’à partir d’un certain âge, on veut se libérer de certaines contraintes et parce que la qualité de vie commence vraiment à se dégrader. »
Le tabacologue Patrick Dupont constate lui que « cette génération a la culture de la persévérance. Quand ils s’engagent dans un sevrage, ils se donnent les moyens de réussir ». Bien sûr, s’ils ont une longue histoire avec le tabac, c’est aussi parce qu’ils sont souvent très dépendants et le sevrage ne sera donc pas facile. Même si la dépendance à la nicotine est identique à 40 ans et à 70 ans.

Quant aux outils de sevrage, quatre seulement ont fait la preuve de leur efficacité sur les fumeurs de tous âges : les substituts tels que les patchs, les thérapies cognitivo-comportementales (TCC) et deux médicaments, la varénicline (Champix) et le bupropion (Zyban). Mais, concernant les médicaments, leur prescription chez les seniors nécessit quelques adaptations.


Ecoutez le Dr Patrick Dupont, tabacologue à l’hôpital Paul Brousse de Villejuif : « Il faut faire attention aux doses si le patient est insuffisant rénal, diabétique, insuffisant hépatique… »



Si vous avez plus de 65 ans et que vous faites partie de ce tiers de personnes qui ont l’intention d’arrêter de fumer, il ne reste donc plus qu’à trouver la bonne occasion pour sauter le pas. Il n’est peut-être pas trop tard pour prendre de bonnes résolutions pour 2013. Sinon, bon nombre de médecins considèrent qu’une hospitalisation pour n’importe quelle pathologie est une bonne opportunité. Pour le Pr Daniel Thomas, « tout fumeur qui rentre à l’hôpital devrait se voir systématiquement proposé une aide au sevrage tabagique. »