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Entretien avec David Gruson de la FHF

Hôpital : "une révolution numérique est en marche"

Par Bruno Martrette

Baptisée "Concept Home", cette chambre d'hôpital du futur a été créée par des PME regroupées au sein du Clubster Santé

ENQUÊTE - La chambre d'hôpital du futur "Concept Home" laisse augurer un séjour hospitalier très différent d'aujourd'hui. A côté de ces projets futuristes, la Fédération Hospitalière de France (FHF) a sa propre vision des établissements de demain. Ils laisseront plus de place à la chirurgie ambulatoire et aux téléconsultations.

Dévoilée en 2012 au salon Hôpital Expo, la chambre d'hôpital de demain met l’innovation au service du malade. Baptisée "Concept Home" (1), elle laisse augurer un séjour dans les hôpitaux français très différent d'aujourd'hui. Visite avec ses concepteurs : « Confortablement assis dans un grand fauteuil, vous regardez les clichés d’IRM que vous commente votre neurologue sur une tablette tactile. Puis vous déplacez votre fauteuil jusqu’à une petite table où vous pouvez déjeuner avec votre conjoint venu vous rendre visite. Pour dormir, vous n’aurez qu’à basculer votre fauteuil en position allongée et l’encastrer dans la tête de lit prévue à cet effet ».  

Vous l'avez compris, l'objectif est de faciliter les soins et d’améliorer la qualité de vie de la personne hospitalisée. Dans un souci d'efficience économique, l'autre défi sera de réduire au maximum la durée des séjours des malades, en développant notamment la chirurgie ambulatoire. Un mode de prise en charge où le patient rentre le matin pour être opéré et ressort le soir. Pour la Fédération hospitalière de France (FHF), qui représente les hôpitaux et les établissements médico-sociaux publics, certains de ces projets sont possibles à court terme. Son délégué général, David Gruson, dévoile la feuille de route. 

 

Les durées d'hospitalisation vont-elles évoluer ?
David Gruson : En France, le potentiel de développement de l'ambulatoire est considérable. Le mouvement est déjà à l'oeuvre et massif. Ces dix dernières années, nous avons supprimé 10 000 lits de chirurgie d'hospitalisation complète. On est passé de 44 000 à 34 000 lits, c'est directement lié à l'essor de la chirurgie ambulatoire. Mais attention, le potentiel de développement n'est pas illimité. Il y aura toujours besoin de plateaux médicaux techniques et de blocs opératoires significatifs dans le secteur hospitalier parce qu'il y a une complexité des prises en charge qui s'accroît. Et des techniques nouvelles qui se déploient pour répondre à des pathologies émergentes. Pour résumer, je dis "oui" à plus d'ambulatoire, mais pas à n'importe quel prix.
Demain, on veut que la moitié de l'activité de chirurgie se fasse en ambulatoire. C'est un objectif atteignable et des régions comme la Réunion y sont déjà. 
L'ambulatoire répond à une demandes des patients et permet, en plus, de faire des économies considérables.


Pourtant, la coordination entre la ville et l'hôpital pêche encore ?

David Gruson : Oui, c'est un enjeu très important de structuration des parcours de prise en charge des patients entre la ville et l'hôpital. Là aussi il y a du chemin à parcourir, même si les deux acteurs commencent à se parler. Mais il faut aller plus loin. Il y a des réflexes à prendre sur le suivi des patients, la diffusion dans un délai bref des comptes rendu d'hospitalisation, et la capacité à mobiliser le levier des nouvelles technologies pour permettre ces modes de dialogue. 


La fermetures de lits va donc se poursuivre ?

David Gruson : Attention aux idées reçues, le nombre de lits par habitant en France est 20 % moins élevé qu'en Allemagne. Néanmoins, la notion de réduction de capacité et de fermeture de lits n'est pas du tout tabou pour la FHF, pour autant qu'elle réponde à des projets médicaux et à des logiques d'efficience économique. L'exemple emblématique de cela est le sujet du développement de la chirurgie ambulatoire. Mais il y a aussi la nécessité de préserver un certain nombre de capacités de lits d'hospitalisation pour répondre aux problématiques de santé publique d'aujourd'hui et de demain, comme la montée des troubles neuro-dégénératifs. Il y aura besoin de répondre au défi du vieillissement de la population.


La chambre d'hôpital de demain sera-t-elle très différente ?

David Gruson : Oui clairement, c'est une vraie révolution numérique qui est à l'oeuvre. Elle va modifier le rapport de nos concitoyens à leur hôpital. Exemple précis, le développement des téléconsultations pour les personnes vulnérables, ou celles âgées atteintes de troubles neuro-dégénératifs. Elle leur permettra d'avoir depuis chez elle accès à leur spécialiste qui sera physiquement présent l'hôpital. Ce sera un vrai gain sur la qualité de vie du patient. Et ça permettra en plus des économies à l'Assurance maladie en évitant des séjours hospitaliers inutiles et des transports sanitaires très couteux. 
L'autre piste est, avec le développement des groupements hospitaliers, la convergence des systèmes d'informations entre tous les hôpitaux. Il faudra, par ailleurs, mettre en place des outils de dialogue partagés avec la médecine de ville. Le but est de rendre la circulation des informations plus fluide pour améliorer le suivi des patients dans le respect des normes éthiques et du secret médical.
Cela ne passera pas forcément par une diminution des personnels humains qui doit s'analyser au regard de l'activité médicale et des besoins en santé de la population. 

(1) Le premier prototype de "Concept Home" a été mis au point par une trentaine de PME du Nord-Pas de Calais, regroupées au sein du Clubster Santé