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Dans les 24 heures

AVC : une prise en charge précoce réduit le risque de moitié

Par Anne-Laure Lebrun

Entre 15 000 et 25 000 AVC pourraient être évités chaque année si les victimes étaient prises en charge dans les 24 heures après l'apparition des premiers signes.

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Toutes les 4 minutes, un Français est victime d’un accident vasculaire cérébral (AVC), soit environ 150 000 personnes chaque année. Avec 40 000 morts, l’AVC est la 3ème cause de mortalité chez les hommes et la 1ère chez la femme. Pour les survivants de cette attaque cérébrale, les séquelles peuvent être définitives et invalidante au quotidien.

Pourtant, « ce coup de tonnerre dans un ciel serein peut être évité », insiste le Pr Pierre Amarenco, chef du service de neurologie et du Centre d’accueil et de traitement de l’attaque cérébrale à l’hôpital Bichat (AP-HP, Paris).
Dans 25 % des cas, l’AVC est en effet précédé d’un accident ischémique transitoire (AIT). Et si ces patients sont pris en charge dans les 24 heures après son apparition, le risque d’AVC ultérieur est réduit de moitié, révèle une étude internationale coordonnée par ce spécialiste et publiée ce jeudi dans le New England Journal of Medicine.


Des signes d'alertes à ne pas négliger

Comme l’AVC, l’AIT résulte d’une obstruction d’un vaisseau sanguin par un caillot. Le sang ne peut lus circuler et irriguer le cerveau. Difficultés à trouver ses mots ou à les prononcer, troubles de la vue, paralysie d’un membre ou d’un côté de la face, perte d’équilibre, tout se passe comme si la personne était ivre… Cet arrêt brutal de la circulation sanguine se traduit par les mêmes signes que l’AVC mais ils sont réversibles et durent rarement plus d’une heure.

 

Ecoutez...
Pierre Amarenco, chef du service de neurologie et du Centre d’accueil et de traitement de l’attaque cérébrale à l’hôpital Bichat : « Le patient qui a une faiblesse motrice dans la main qui n'arrive pas à tenir la télécommande pendant quelques secondes ne doit pas négliger ce symptôme, c'est très important. »

 

Agir même sans symptôme

Très vite dissipés, ces symptômes n’alertent pas toujours les patients. Or, le risque de récidive est très élevé. « L’AIT est la fumée du volcan qui annonce la catastrophe, souligne le spécialiste. Il vaut mieux intervenir lorsque les symptômes ont disparu pour trouver la cause et l’éliminer afin d’éviter l’attaque cérébrale. C’est ce que nous faisons dans notre clinique SOS-AIT à l’hôpital Bichat. »

Les patients envoyés dans cette clinique par leur médecin traitant ou un spécialiste réalisent des examens neurologiques et cardiaques dans les 3 heures qui suivent leur arrivée. « A Bichat, nous accueillons entre 500 et 600 personnes par an. Environ 25 % nécessitent un traitement immédiat tandis que les autres peuvent immédiatement rentrer chez eux avec une ordonnance », explique le Pr Amarenco. En 2007, l’équipe de l’hôpital parisien a montré que cette prévention d’urgence permet de réduire de 80 % les risques d’attaque cérébrale. La même année, des confrères britanniques de l’université d’Oxford arrivent aux mêmes conclusions.

 

Ecoutez...
Pierre Amarenco : « Nous avons envoyé une plaquette d’information aux médecins pour leur présenter la clinique SOS-AIT et leur donner un numéro vert qu’ils peuvent appeler 24h/24 h d’accéder au neurologue vasculaire qui prend tout de suite en charge le malade. »

 

Eviter près de 30 000 cas d'AVC

Avec ces récents travaux internationaux, ils ont voulu montrer que cette approche est généralisable dans le monde entier. Une soixantaine de cliniques dédiées à la prise en charge de l’AIT dans 21 pays des 5 continents ont participé à cette étude. Entre 2009 et 2011, plus de 4 700 patients y ont été accueillis, et 80 % ont été examinés dans les 24 heures suivant leur attaque. Une prise en charge précoce qui permet diminué le risque d’AVC à un an d’au moins 50 %.

Pour le spécialiste, ces résultats confortent l’importance de développer ces cliniques d’AIT partout en France et dans le monde. En Grande-Bretagne, 200 cliniques ont ouvert leurs portes dès 2008 après la publication des articles scientifiques de l’équipe de l’hôpital Bichat et de l’université d’Oxford.
« Ils estiment qu’ils évitent entre 10 000 et 20 000 AVC par an », ajoute le Pr Amarenco. L’Allemagne, l’Italie, le Japon ou la Chine ont eux aussi développé ces unités. La France, elle, n’a pas sauté le pas. Seulement deux de ces cliniques existent dans le pays, celle de Bichat à Paris et une autre au CHU de Toulouse-Rangueil.

Pourtant, si cette initiative était déployée à tout le pays, entre 25 000 et 30 000 cas pourraient être évités. « Ce qui nous manque, ce sont des recommandations de la Haute Autorité de Santé et un véritable plan ministériel pour développer des cliniques d’AIT comme nous avons développé des unités neurovasculaires ces 15 dernières années qui sont très efficaces pour prendre en charge les patients lorsque la catastrophe est arrivée », explique-t-il. Il espère que ces travaux encourageront les autorités sanitaires à mettre en place une politique de prévention de l’AVC.