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Truvada en prévention : les interrogations

Par Philippe Berrebi

La mesure n’est pas même pas entrée en application qu’elle suscite déjà des interrogations. A l’initiative de Marisol Touraine, les députés ont voté le principe d’un traitement préventif contre le sida. A partir de la mi-décembre, les centres hospitaliers pourront délivrer du Truvada, une combinaison d’antirétroviraux, à des hommes non infectés mais très exposés au risque de contamination.
Plusieurs études, dont l’essai Ipergay en France, ont montré l’efficacité d'un tel programme, avec une réduction du risque de contamination de l’ordre de 86 %. Avec cette prophylaxie préexpostion (PrEP), l’objectif est bien de neutraliser l’épidémie du sida en réduisant au maximum les nouvelles contaminations.
En Europe, la France fait figure de pionnière avec cet engagement. Mais les promoteurs politiques et associatifs de la PrEP devront faire œuvre de pédagogie pour convaincre l’opinion publique. Les réticences sont nombreuses.

Moins courageux, de nombreux pays voisins hésitent d'ailleurs à franchir le pas. « Beaucoup d'États traînent les pieds pour des raisons morales, car la PrEP va essentiellement bénéficier aux gays », confie à l’AFP Bruno Spire, l’ancien président de l’Association Aides.

Comme aux Etats-Unis, où il est commercialisé depuis 2014 pour limiter les contaminations sexuelles, le Truvada sera ici pris en charge à 100 % par l’Assurance maladie. « La boîte de 30 comprimés de Truvada coûte 450 euros, les médecins auront le choix entre un traitement quotidien et un à la demande (deux comprimés avant le rapport à risque, un troisième le lendemain et un quatrième le surlendemain) », précise la journaliste de l’AFP.
Pourquoi la collectivité devrait-elle prendre en charge les risques liés à un comportement individuel, interrogent déjà les sceptiques, en ajoutant que cette mesure va éloigner les personnes du préservatif.
Parce qu’il y a encore 2 millions de nouvelles infections par an dans le monde et 1 million de morts à cause du VIH, répond l’OMS, qui défend ce programme depuis l’an dernier.

Mais au-delà de ces interrogations, l’exemple nord américain doit nous servir de leçon. Là-bas, les autorités sanitaires déplorent que les médecins ne sont pas suffisamment informés et que trop de patients abandonnent leur traitement en cours de route. Ces comportements réduisent de moitié (44 % au lieu de 90 %) l’efficacité de la PrEP.