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Etude dans le JAMA Neurology

Déclin cognitif : le cerveau vieillit à partir de 30 ans

Par Audrey Vaugrente

Avec l’âge, les capacités à mémoriser déclinent, un phénomène normal sans lien avec la formation de plaques d’amyloïde dans le cerveau. Les femmes sont plus épargnées que les hommes.

GILE/SIPA

Le cerveau des hommes vieillit moins bien que celui des femmes. C’est la conclusion d’une étude réalisée sur plus de 1 000 personnes pendant 8 ans. L’objectif était d’observer l’impact du sexe, de l’âge et d’un facteur de risque d’Alzheimer (le gène APOE ε4) sur l’évolution du cerveau. Publiés dans le JAMA Neurology, les travaux soulignent que la démence tardive n’est pas toujours due à l’accumulation de plaques amyloïdes dans le cerveau.

 

Les hommes mémorisent moins

Les chercheurs de la Mayo Clinic ont recruté 1 246 personnes âgées de 30 à 95 ans. Au début de l’étude, aucun participant ne présentait de signe de démence. « Le déclin cognitif typique peut se définir par des modifications liées à l’âge dans la performance cognitive de personnes qui ne souffrent pas de démence », notent les auteurs en introduction. Mais peu d’études sur le déclin cognitif ont recruté des personnes jeunes.

 

Le suivi des participants souligne pourtant des disparités face au vieillissement cognitif. De manière générale, la mémoire se dégrade entre 30 et 90 ans. Les images au PET scan révèlent aussi une réduction du volume de l’hippocampe entre 30 et 65 ans, ce qui induit une baisse de la capacité à mémoriser.
« Cette tendance s’établit avant que des plaques visiblement anormales n’apparaissent au PET scan dans la population. Les valeurs de la mémoire et du volume hippocampique sont distribuées symétriquement autour de l’âge médian de la population, ce qui sous-entend que le déclin de la structure du cerveau et de la mémoire sont une caractéristique fondamentale du vieillissement normal », analyse l’équipe dans le JAMA Neurology.

 

Mais les hommes souffrent plus du vieillissement que les femmes : leur mémoire est généralement moins bonne. C’est particulièrement le cas après 40 ans, alors que les participants étaient en moyenne plus éduqués que leurs paires. Le volume de l’hippocampe est aussi plus réduit chez les sujets de sexe masculin. Une différence beaucoup plus marquée après 60 ans.

 

L’amyloïde a un rôle marginal

Ce n’est qu’à partir de 70 ans que le gène APOE ε4, associé à un risque d’Alzheimer, commence à distinguer les participants qui en sont porteurs des autres. Comme dans la population générale, la présence de plaques amyloïdes chez ces personnes reste relativement basse. Mais lorsqu’ils atteignent leur septième décennie, la protéine bêta-amyloïde commence à s’agglutiner de manière beaucoup plus marquée.

 

Les porteurs du gène APOE ε4 sont aussi considérés comme « positifs » à l’amyloïde au PET scan quelques années plus tôt que les autres (57 ans Vs 64 ans). Cela signifie que des plaques apparaissent à l’imagerie, mais ne sont pas forcément accompagnées de symptômes d’Alzheimer. « Nos résultats correspondent à un modèle d’Alzheimer tardif, dans lequel l’amyloïdose survient tardivement dans un contexte de déclin cognitif pré-existant et structurel, qui est associé au vieillissement et pas aux dépôts de plaque », soulignent les chercheurs.

 

Ces travaux remettent en question le rôle de la plaque amyloïde dans le déclin cognitif, commente le Dr Charles DeCarli, qui publie un éditorial associé à l’étude. « Ces travaux ne règlent pas seulement la question de l’impact possible de l’accumulation d’amyloïde dans le cerveau sur le risque de démence ; elle étend aussi les connaissances par rapport au processus de vieillissement de la structure cérébrale, de l’accumulation d’amyloïde et des capacités de mémorisation entre 30 et 95 ans chez des individus normaux sur le plan cognitif », écrit-il. « Comprendre la biologie de base de ces processus précoce peut potentiellement nous informer sur les moyens de maintenir une bonne santé cognitive et d’optimiser la résistance à la démence tardive. »