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Interview

Tracey Cox : "A 50 ans, l'envie de faire l'amour sans déclencheur disparaît"

Pour son dix-septième ouvrage sur les relations amoureuses et la sexualité, Tracey Cox (auteure et chroniqueuse anglaise spécialisée dans les livres sur les rencontres, le sexe et les relations) a choisi d'aborder la question des rapports sexuels après cinquante ans. Un sujet qui fait parfois peur, puisque passé la cinquantaine notre corps change. Pour autant, pas de raisons de s'inquiéter, nous rassure l'écrivaine : l'entretien qu'elle nous a accordé démystiphie le sujet.

Tracey Cox : \ KatarzynaBialasiewicz/iStock

  • Publié le 26.07.2021 à 15h00
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- Mieux Vivre Santé : Dans votre dernier livre, Le sexe c’est encore meilleur après 50 ans: boostez votre libido et profitez de votre sexualité en toute liberté”, vous expliquez que c’est généralement autour 50 ans que notre appétit sexuel décroit et que la sexualité devient une source de stress plutôt que de plaisir. On comprend les enjeux possibles lorsque l’on souffre de problèmes de santé. Mais, si l’on est en pleine forme, le sexe à 50 ans, parce que l’on a beaucoup plus d’expérience, ne devrait-il pas, au contraire, être plus agréable ? 

Tracey Cox : Quand vous arrivez à 50 ans, et c’est la raison pour laquelle j’ai écrit ce livre, il y a vraiment pas mal de choses qui se passent. Et ce même si vous avez une forte libido et êtes très éduqué sur la question. Prenons mon exemple : je n’avais aucun problème de libido et étais très au fait et pourtant la ménopause a, quand même, changé la donne. 

Pourquoi ? Parce que lorsque vous atteignez la cinquantaine, vos taux d’oestrogènes et de progestérones, les hormones responsables du désir, diminuent. Et cela pose problème puisque la plupart des individus estime que le désir sexuel est le simple fait de regarder quelqu’un qui nous plaît et d’avoir soudainement envie de sexe. C’est faire erreur : cette forme de désir que l’on éprouve lorsque l’on est jeune n’est pas représentative du désir en général, elle est uniquement déclenchée par les hormones que sont l’oestrogène et la progestérone. 

En ce sens, quand vous avez 50 ans et que la production de ces hormones est plus lente ou inexistante, l’envie de faire l’amour spontanément, sans élément déclencheur disparaît. Se faisant, les gens pensent, à tort, qu’ils n’ont plus de désir sexuel, que quelque chose ne va pas chez eux ou qu’il ne sont plus attirés par leur partenaire. C’est un vrai challenge mais ça n’a rien d’anormal, ce n’est pas synonyme d’un problème quelconque : c’est juste ce qui arrive lorsque l’on vieillit

Il faut donc repenser le désir : il n’arrive plus spontanément, vous devez le créer. On peut donc totalement avoir une vie sexuelle épanouie après 50 ans, il faut simplement, je le répète, être éduqué sur la question et comprendre les changements que traversent notre corps. 

Par exemple, parce que les taux d’oestrogene sont plus bas, les rapports sexuels auront tendance à être plus douloureux chez les femmes, mais ce n’est pas une fatalité si on connaît cette réalité on peut la contourner. 

En résumé, si l’on a envie de continuer à avoir une vie sexuelle épanouie, c’est tout à fait possible : ce n’est pas une question d’âge, mais plutôt une question d’attitude. En outre, l’un des messages importants du livre est : “use it, or lose it” (NDLR utilisez le, ou perdez-le). Ceci signifie que si vous souhaitez continuer à avoir une vie sexuelle riche, et ce peu importe votre âge, il faut l’entretenir’. Comment ? En se masturbant régulièrement et en ayant des rapports sexuels fréquents. En d’autres termes : si vous voulez préserver votre libido, alors il faut au minimum trois orgasmes par semaine, idéalement deux seuls et un avec un partenaire. 

- D’accord, mais si l’on a plus de 50 ans, que l’on est marié ou dans une relation longue et que l’on a plus eu de rapports sexuels avec notre partenaire depuis des années, comment aborder le sujet ? 

La plupart des couples ne font rien, et ont tendance à penser que le problème se résoudra tout seul. Ils font erreur : si vous n’avez pas fait l’amour avec votre partenaire depuis deux ans, vous n’allez pas soudainement le faire à nouveau, sans en avoir préalablement parlé ensemble. Vous devez donc réellement penser à ce que vous voulez : certains couples arrêtent d’avoir des rapports sexuels et sont parfaitement heureux avec cette décision, d’autres non. 

Il est donc essentiel de vous demandez où vous vous situez. Et si vous n’avez plus envie de faire l’amour avec votre conjoint ou avec votre conjointe, une discussion reste néanmoins nécessaire. Effectivement, il est important d’en parler afin de maintenir les rapports affectifs -même sans sexe- puisqu’une relation amoureuse peut totalement exister sans sexe, mais ne peut pas perdurer sans affection. 

Maintenant reprenons le sujet depuis le début : si vous avez subitement arrêté d’avoir des rapports sexuels avec votre partenaire, comme on l’a dit, vous devez vous demander pourquoi. Généralement, chez les hommes d’une cinquantaine d’années, l’arrêt des rapports sexuels est synonyme de troubles de l’érection et ils préfèrent mille fois ne plus jamais faire l’amour plutôt que d’admettre qu’ils ont un problème. Chez les femmes, le manque de libido est souvent lié au rapport qu’elles entretiennent avec leur corps, à l’apparition de douleurs nouvelles ou au fait qu’elles n’ont jamais vraiment aimé ça. Une fois votre réflexion personnelle sur la question aboutie, il faut absolument aborder le sujet au sein de votre couple. On ne peut absolument pas s’en sortir sans en parler. 

La discussion doit être simple, il suffit de dire : “J’ai remarqué que nous ne faisions plus l’amour, ça me manque vraiment. Qu’en penses-tu ? Que peut-on faire pour recommencer à avoir des rapports sexuels ?”. Il faut aussi s’attendre à ce que la réaction, de l’autre côté, ne soit pas forcément celle que l’on espère. Mais, c’est normal : de votre côté vous avez déjà réfléchi à la question, de son côté l’autre n’en savait rien et n’est donc pas préparé. 

Quoiqu’il se passe pas de panique : posez le problème et si l’autre ne veut pas en parler tout de suite, reparlez-en ensemble à un moment plus opportun. Plus vite vous en parlerez, mieux ce sera. Les couples qui n’ont pas eu de rapports sexuels pendant cinq ans, et n’ont jamais abordé la question, ont peu de chance de retrouver une vie sexuelle épanouie. 

- Si l’on comprend l’importance de la discussion, comment s’assurer, une fois le problème résolu, de maintenir cette vie sexuelle retrouvée ? 

Personnellement, je pense qu’il est bon de planifier les rapports sexuels. Oui, c’est une opinion très impopulaire mais le fait même que les gens s’y opposent m’amuse. En effet, on a tendance à se remémorer les débuts d’une relation et à s’imaginer que les rapports sexuels étaient alors totalement spontanés. Or, c’est complètement faux : tout est planifié au début. Aux prémices d’une relation, on veut que tout se passe comme prévu, on réfléchit donc à tout, on choisit sa lingerie, sa tenue… Ici c’est pareil : un couple qui n’a pas beaucoup de libido mais veut “rallumer la flamme" doit prévoir les choses.

En ce sens, quand je parle de planification, il ne s’agit pas de planifier le rapport sexuel à proprement parler, mais plutôt de l’inciter. Peut-être que le couple, in fine, ne fera même pas l’amour mais plutôt des choses sensuelles comme, par exemple, prendre un bain ensemble.

C’est très bien : on fait trop souvent l’erreur de penser que le sexe se résume uniquement à des rapports sexuels avec pénétration et un ou plusieurs orgasmes. Ici encore on n’a tout faux : faire quelque chose de sensuel ensemble est aussi important que le sexe en lui-même. L’idée est de faire une activité ensemble qui ne soit pas similaire à ce que ferait deux meilleurs amis ensemble, ça peut être regarder un film érotique par exemple. 

- Dans le livre vous revenez souvent sur l’importance sur des sextoys. Pourtant, tout le monde n’en utilise pas. Si c’est nouveau pour nous, comment les intégrer dans notre vie sexuelle ? 

C’est vrai que c’est une question culturelle : tout le monde n’a pas l’habitude de les employer. En revanche, si l’on a envie d’essayer, c’est comme pour tout, il suffit d’en parler simplement avec son ou sa partenaire. Pas la peine d’en faire des tonnes, un “J’ai entendu que beaucoup de gens en utilisaient, ça te dirait d’essayer ?” suffit. De plus, si vous avez l'habitude de parler régulièrement de sexualité, aborder la question sera d’autant plus simple. 

Par ailleurs, il est bon de les intégrer à ses rapports sexuels, puisque les femmes ont la plupart de leurs orgasmes en utilisant un vibromasseur. Une fois que l’on a essayé, c’est dur de s’en passer ! 

- Vous vous concentrez sur la sexualité des cinquantenaires et levez le voile sur un certain nombre de problèmes. En revanche, il semblerait, que la sexualité devienne encore plus tabou à l’approche des 70 ans ou 80 ans. Quelle est votre opinion sur la question ? 

Peu importe l’âge, si vous voulez continuez à faire l’amour, vous trouverez une solution. Même lorsque la santé se détériore, il existe des moyens de contourner le problème. Aujourd’hui, d’après les chiffres, entre 30% et 40% des couples âgés de plus de 70 et 80 ans continuent à faire l’amour. Et ça ne s’arrête pas là : ils sont satisfaits de leur sexualité.

La question a longtemps été taboue, mais il ne faut pas pour autant s’imaginer qu’il a fallu attendre 2021 pour que les couples âgés aient une vie sexuelle épanouie. Ça a toujours été le cas, on n’en parlait tout simplement pas. 

En revanche, il est certain que lorsque l’on vieillit, l’acte sexuel central n’est plus forcément la pénétration. Comme cela peut-être douloureux ou difficile, notamment en raison de problèmes de santé, les rapports se recentrent autour du sexe oral ou des préléiminaires. 

Par contre, et il est important de le redire, si l’on souhaite avoir une vie sexuelle riche à 80 ans, il faut avoir une vie sexuelle accomplie et régulière tout au long de notre vie : comme je le disais au début, “use it, or lose it”.   

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