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Suivi des patients

Les opérateurs à l'écoute de notre santé

Par La rédaction

Malades chroniques, perte d'autonomie, le marché de la santé aiguise l'appétit des opérateurs de téléphonie mobile. A la clé, une croissance de 15 à 20% de l'e-santé dans les cinq ans

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Des textos qui rappellent aux patients leurs rendez-vous médicaux et les horaires de prise de leurs médicaments, des boîtiers qui détectent les chutes et téléphonent automatiquement à un proche, des visites médicales « virtuelles » avec envoi de données (tension artérielle, oxymétrie, glycémie…) par GSM aux praticiens… Les téléphones mobiles sont en train de devenir de véritables assistants médicaux, facilitant la prise en charge des malades et la communication avec leur entourage et leurs médecins. Orange, SFR et Bouygues Telecom, les trois opérateurs français de technologie mobile, se sont investis dans le secteur, et multiplient les innovations, dont beaucoup sont encore au stade d'expérimentation.


Les personnes atteintes de maladies chroniques, comme le diabète, et les personnes âgées dépendantes sont les cibles principales de ces nouvelles technologies. Mais d'autres utilisateurs potentiels sont déjà en vue : candidats au sevrage tabagique ou à un régime amaigrissant par exemple, dont les efforts peuvent être encouragés par sms, ou messages téléphoniques.

Pour les opérateurs, le créneau de la santé s'annonce porteur. Le potentiel de croissance de l' e-santé est estimé entre 15 et 20% dans les cinq ans à venir.
« Les maladies chroniques représentent la moitié des dépenses de santé. Et leur croissance est de 10% par an, contre 1% pour le reste », renchérit Eric Le Bihan, directeur adjoint d'Orange Health Care, la division santé du groupe France Telecom (écouter aussi ci-contre).
La prudence reste toutefois de mise. « Dans le secteur médical, le besoin de qualité de service est très important, insiste Franck Moine, responsable des activités « machine to machine » chez Bouygues Telecom. La démarche en amont peut donc être longue ». De fait, bien qu'aucune autorisation ne soit nécessaire pour commercialiser la plupart de ces services, les opérateurs s'astreignent à des expérimentations pilotes, souvent en partenariat avec des médecins hospitaliers.


Permettre une meilleure observance des traitements


Pour les personnes âgées en perte d'autonomie, plusieurs dispositifs, faisant appel à des technologies plus ou moins évoluées, sont déjà disponibles. C'est le cas du service e-rappel, développé par la jeune société e-medicis , en partenariat avec SFR.
Le principe est simple : rappeler au patient (selon les cas via sms, message téléphonique ou e-mail) ses rendez-vous médicaux ou ses horaires de prise de médicament, deux domaines où le bât blesse quand la mémoire flanche.
Gérés par un proche ou un médecin, les appels sont programmés sur internet aux dates et horaires souhaités. Simple mais efficace.

Les bénéfices sont évidents, tant sur l'observance thérapeutique que pour la présence aux rendez-vous, selon le Dr Sandryne Stirati-Buron, qui a testé ce dispositif auprès d'une vingtaine de patients suivis en hôpital de jour à l'hôpital Bretonneau (Paris). Depuis quelques mois, le public peut s'abonner directement à ce service (qui coûte entre 3 et 23 euros mensuels). E-rappel a été également adopté par des établissements hospitaliers publics et privés et des médecins libéraux, assure Natacha Avila, fondatrice et directrice générale de e-medicis.


Toujours en partenariat avec SFR, la même entreprise développe un boîtier, nommé e-care, auxiliaire de surveillance des personnes âgées. En cas d'inactivité anormale ou de chute, l'appareil porté autour du cou se charge d'appeler le numéro de téléphone programmé, aidant ou professionnel de santé. Même inconsciente, la personne peut être localisée grâce à un GPS intégré. « C'est plus précis qu'une téléalarme, estime le Dr Stirati-Buron, qui l'a évalué chez quelques personnes. Encore faut-il ne pas l'enlever la nuit, et penser à recharger les batteries …». Selon cette gériatre, le dispositif sera sans doute davantage utile aux patients « chuteurs » qu'à ceux atteints de troubles cognitifs. Une autre expérimentation est prévue à l'hôpital gériatrique Charles Foix, en attendant la commercialisation, probablement courant 2008.


Parallèlement, les opérateurs s'intéressent de près aux quelques 800 000 malades d'Alzheimer et à leur désorientation temporo-spatiale. En 2006, Orange a été le premier à commercialiser un bracelet de géolocalisation, nommé Columba. Muni d'un GPS, d'un téléphone mobile et d'un logiciel, le bracelet déclenche une alarme à un centre d'appel lorsque la personne sort du périmètre prédéterminé. Une nouvelle version arrive sur le marché, qu'Orange espère vendre aux établissements de soins. Pour les collectivités, le coût sera de 55 à 75 euros par mois. Un prix beaucoup plus attractif que pour le grand public qui doit d'abord acheter le bracelet 259 euros puis s 'acquitter d'un abonnement mensuel de 59 euros. Bouygues Telecom travaille sur un projet proche, le bracelet « Aloïze ».


Visite médicale virtuelle


Mais c'est pour le suivi des maladies chroniques que les perspectives semblent les plus prometteuses. Un système de suivi du diabète insulino-dépendant est développé par Orange (écouter ci-contre). Après une première expérience dans le service de diabétologie de l'hôpital de Corbeil-Essonne, le programme est en cours d'évaluation dans une vingtaine de centres français. Le malade mesure sa glycémie, puis l'inscrit sur un smartphone, ainsi que d'autres paramètres (composition du repas en portions, activité physique éventuelle). L'appareil calcule instantanément la dose d'insuline à injecter, en fonction des données programmées par le diabétologue. Quand le patient le souhaite, il envoie toutes les informations par GPS à son praticien, qui les reçoit sur son terminal d'ordinateur. Un dispositif comparable est expérimenté par SFR, à la différence près que la glycémie mesurée est transmise directement à un boîtier par un système bluetooth, avec envoi secondaire par GPS au médecin. Sur le même principe, SFR envisage de proposer des appareils pour le suivi des asthmatiques, et des hypertendus, mais les essais n'ont pas encore commencé.

Chez Bouygues Telecom, on parle carrément de « visite médicale virtuelle ». Objectif : permettre à un médecin hospitalier de surveiller un patient à son domicile, celui-ci transmettant des données objectives (poids, tension..) et subjectives (diarrhée, nausées…) une à plusieurs fois par jour. Testé à petite échelle (sur une personne) dans le service d'oncologie de l'hôpital Georges Pompidou, ce système développé en partenariat avec IBM s'est révélé utile pour le médecin et le patient (voir video ci-contre). « Nous souhaitons mener une expérience pilote avec plus de malades, en restant sur des pathologies où un dysfonctionnement du système ne mettrait pas leur vie en péril», assure Franck Moine. Mais selon le Dr Florian Scotté, de l'HEGP, le projet serait pour l'instant en stand-by, en raison du coût et de l'absence de mécène. « Le coût de cette technologie pourrait pourtant être rattrapé si l'on prend en compte les économies générées, sur les ambulances, les examens inutiles...», regrette Florian Scotté.