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Dysplasie osseuse

Mélorhéostose : le mystère des origines de cette maladie osseuse enfin résolu

Par le Dr Jean-Paul Marre

Une anomalie génétique présente uniquement dans des lésions des os explique les origines d’une dysplasie osseuse rare, la mélorhéostose. Une découverte qui a des implications fondamentales pour traiter des maladies plus fréquentes comme l’ostéoporose.

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Des chercheurs de l’institut de la santé américain (NIH) ont découvert l’anomalie génétique à l’origine d’une maladie osseuse rare, la mélorhéostose, une dysplasie osseuse qui provoque des déformations osseuses avec des condensations de certains os longs en « coulée de cire de bougie » sur les radiographies du squelette.

Les résultats, parus dans Nature Communications, offrent des cibles potentielles de traitement de cette maladie. Ils permettent également une nouvelle compréhension de la physiologie osseuse pouvant conduire à des progrès thérapeutiques dans l'ostéoporose.

Une maladie rare mais des implications larges

La mélorhéostose est une maladie osseuse rare appartenant au groupe des « dysplasies osseuses sclérotiques » (comme l'ostéopœcilie et l'ostéopétrose). Bien qu'il y ait seulement environ 400 cas connus dans le monde, 15 adultes non apparentés et souffrant d’une mélorhéostose se sont portés volontaires pour venir au NIH et y subir des biopsies à la fois des os affectés et non affectés.

« Les médecins supposaient auparavant que les mutations génétiques responsables de la mélorhéostose se produisaient dans toutes les cellules de l’organisme d'une personne atteinte de la maladie », explique Timothy Bhattacharyya, chef de service de chirurgie orthopédique au NIH. « Notre équipe a émis l'hypothèse que des mutations pourraient seulement se produire dans le tissu osseux affecté ».

Une étude sur 15 cas dans le monde entier

Les chercheurs ont comparé les échantillons d'os sains et affectés provenant de chaque malade afin de rechercher des différences dans « l'exome », c’est-à-dire la partie du génome qui code pour les protéines. La comparaison des gènes des deux types d’échantillons osseux (sain et malade), pour chaque patient, a permis d'identifier des mutations même présentes à des niveaux faibles.

L'analyse révèle que 8 des 15 participants ont des mutations dans le gène MAP2K1 qui sont présentes uniquement dans les os affectés des malades et pas dans la biopsie des os non affectés. MAP2K1 produit la protéine MEK1. Le gène MAP2K1 a déjà été lié à certains types de tumeurs cancéreuses ainsi qu'à des maladies qui conduisent à une formation anormale de vaisseaux sanguins dans la tête, le visage ou le cou.

Dans la mélorhéostose, toutes les mutations MAP2K1 identifiées affectent une région de la protéine MEK1 qui normalement supprime son activité, ce qui fait que MEK1 devient hyperactive et s'associe à une croissance osseuse débridée. La croissance osseuse est considérée comme bénigne et ne s'étend pas aux autres parties du corps. On ne sait pas encore ce qui provoque cette mutation régionale des os.

La mélorhéostose est une dysplasie osseuse rare dont la fréquence exacte est inconnue.

La maladie est parfois asymptomatique, mais il existe souvent des douleurs osseuses et/ou articulaires ainsi que des déformations osseuses à l'origine d'un handicap fonctionnel qui peut être sévère. L'évolution est chronique, insidieuse, avec des épisodes de poussées douloureuses.

Les lésions osseuses sont faites d’un os normal, mais en excès, et se traduisent en radiographie par une hyperostose de la corticale osseuse s'étendant « en coulée de cire de bougie », souvent le long du corps vertébral d’un os long. Ces condensations peuvent s'associer avec des calcifications ou ossifications des parties molles.

La scintigraphie osseuse, le scanner et l'IRM peuvent être utiles pour le bilan d'extension des lésions et les différencier d’un ostéosarcome paraostéal, des myosites ossifiantes ou des hématomes calcifiés. Les lésions osseuses se situent le plus souvent sur un seul membre, en suivant le trajet d'un sclérotome, mais des lésions multiples diffuses sont possibles.
Il n'y a pas d'anomalie biologique en particulier du métabolisme phosphocalcique. L'analyse histologique est peu contributive pour le diagnostic positif.

Le traitement est symptomatique. Des bisphosphonates par voie intra-veineuse peuvent être proposé (mais aucune étude n'est disponible). Enfin la chirurgie est utile en cas de complication (compression nerveuse ou vasculaire notamment).

La mélorhéostose : a = déformation de la jambe droite ; b = Radiographie : condensation et déformation du tibia droit en coulée de cire de bougie ; c = hyperfixation scintigraphique ; d = scanner avec condensation osseuse ; PET-scan = hyperfixation osseuse (Crédit NIH)

Une étude pleine de promesses

« Il s'agit d'une étude passionnante sur un trouble osseux très rare qui, non seulement identifie la mutation responsable chez la moitié des patients, mais révèle des informations fondamentales sur le rôle d'un gène lié au cancer dans les voies métaboliques de l'os normal » selon l'auteur principal Joan Marini. « D'autres études sur la façon dont cette voie fonctionne dans les cellules osseuses normales et mutantes pourraient avoir de vastes implications qui pourraient bénéficier à population plus large ».

« La plupart des adultes ont un problème de perte osseuse et d’ostéoporose à mesure qu'ils vieillissent. Ces patients ont le problème inverse car certains de leurs os sont durs et continuent de se densifier », selon Timothy Bhattacharyya, ce qui ouvre de nouvelles perspectives thérapeutiques pour l’ostéoporose.