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Rapport de l'Igas

Décès à l'Ehpad de Lyon : la vaccination en cause

Par Audrey Vaugrente

L’épidémie de grippe dans l’Ehpad Korian de Lyon  a été bien gérée. Mais les conséquences auraient pu être évitées avec une meilleure politique vaccinale.

alexraths/epictura

Pas de faute majeure, mais une succession de petites erreurs. Voilà, en substance, les conclusions de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) sur l’épidémie de grippe survenue fin décembre dans l’EHPAD Korian-Berthelot de Lyon (Rhône).
Le bilan est impressionnant : 72 infections dont 13 mortelles.
Saisie par le ministère de la Santé, l’institution reconnaît que la gestion globale de la flambée a été conforme aux recommandations. Mais le jour de Noël a joué un rôle de pivot, explique-t-elle dans un rapport rendu public ce 6 février.

Une équipe réactive

L’épidémie de grippe a démarré peu avant les fêtes de fin d’année, le 19 décembre. L’Etablissement d’hébergement pour personnes âgées Korian-Berthelot accueillait alors 102 retraités. Agées en moyenne de 85 ans, ces personnes « sont âgées et sont fragilisées par les pathologies dont elles souffrent », souligne l’Igas dans son rapport. Un âge avancé qui réduit l’efficacité du vaccin et accroît les risques d’infection par un virus.

Face à cette vulnérabilité, les établissements spécialisés appliquent des mesures dites « barrière » : hygiène des mains, entretien des surfaces, port de masques en cas de maladie… Sur ce plan, la mission de l’Igas ne relève aucune anomalie majeure. Les pratiques du personnel étaient conformes et ont été adaptées dès les premiers cas. Les soins ont aussi été rapides et la surveillance tracée précisément. Les inspecteurs saluent d’ailleurs la « compétence » et le « professionnalisme » de l’Agence régionale de santé (ARS), alertée rapidement de l’épidémie.

Une stratégie « peu judicieuse »

Alors pourquoi la grippe a-t-elle autant circulé, et si rapidement ? Le rapport pointe deux failles majeures dans la protection des résidents de l’Ehpad. La première concerne la vaccination à titre préventif, recommandée à toute personne de plus de 65 ans. Le taux de couverture est « très inférieur aux objectifs du groupe ».

En effet, le groupe Korian demande à ses établissements d’atteindre 90 % de vaccination chez ses résidents et 50 % au sein du personnel. Cette année, les objectifs ne sont pas tout à fait atteints et la structure lyonnaise est loin du compte : la couverture vaccinale est de 40 %... chez les soignants comme les habitants. 
« Cet écart du simple au double demande des explications », tranche l’Inspection. Difficiles à obtenir, puisque le médecin coordonnateur n’a pas été rencontré par les inspecteurs. Plusieurs motifs expliquent ce retard. La campagne de vaccination était presque à l’arrêt au moment de l’épidémie : en trois semaines, trois résidents ont reçu le vaccin.



Le relâchement de Noël

Cette faible couverture est aussi provoquée par les refus de 13 familles et la volonté d’attendre la réception des bons de prise en charge. Une stratégie « peu judicieuse », selon les mots-mêmes de la mission. Une somme de 650 euros pour l’intégralité des vaccins est, de fait, largement supportable par l’établissement. Cet ensemble d’erreurs « s’est traduit notamment par des différences de pratique selon les étages ».

Mais la série ne s’arrête pas là. Malgré les conseils de l’ARS, l’Ehpad a relâché ses efforts peu avant Noël. La transmission ralentit, le personnel croît à une accalmie. Les portes sont ouvertes aux familles. 42 visiteurs sont rassemblés à l’occasion d’une animation. La conséquence est malheureuse. L’épidémie reprend. 14 nouveaux cas se déclarent le 28 décembre, provoquant le confinement total des pensionnaires.

Quatre recommandations

L’Igas émet donc quatre recommandations à l’intention de l’établissement. L’Inspection pointe les imprécisions dans le suivi épidémiologique et vaccinal, qui doit nettement s’améliorer. Mais la politique des établissements vis-à-vis de la vaccination doit changer : elle doit devenir la priorité du médecin coordonnateur. Les échanges avec l’ARS auraient aussi tout intérêt à se renforcer, afin d’améliorer davantage le suivi.

Les auteurs du rapport recommandent de se montrer plus insistants à l’égard d’une injection préventive. Pour cela, les membres du personnel doivent poursuivre l’information des familles et améliorer la prise de contact ciblée sur la vaccination. L’accord écrit doit être obtenu. Il n’est, en revanche, pas nécessaire d’attendre l’arrivée des bons de prise en charge – synonyme de retard.