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126 000 d’euros de dommages-intérêts

Distilbène : une victime obtient réparation sans ordonnance

Par Julie Levallois

Exposée au Distilbène in utero, Stéphanie Chevallier a remporté son procès en appel contre UCB Pharma. Sans produire d'ordonnance.

Réseau DES France/DES Daughter/Flickr

Le combat de Stéphanie Chevallier a duré. Depuis 10 ans, cette femme exposée in utero au Distilbène poursuit le laboratoire qui fabrique ce médicament. Elle souffre d’une malformation grave des voies génitales, à l’origine d’une infertilité. Ce 15 octobre, la présidente de l’association Les Filles DES a enfin obtenu gain de cause : la cour d’appel de Versailles (Yvelines) a reconnu les torts d’UCB Pharma. Il devra verser 126 000 euros de dommages et intérêts à la plaignante.

Un dossier inhabituel

Stéphanie Chevallier a découvert sa malformation utérine à l’âge de 19 ans, relate France Inter. Lorsqu’elle était enceinte, la mère de la jeune fille a reçu du Distilbène. Cette hormone de synthèse était destinée à réduire les risques de fausse couche. Mais elle est aussi à l’origine de graves malformations des voies génitales et d’un risque accru de cancer. En 1977, le médicament est retiré du marché. Mais il est trop tard pour plus de 100 000 enfants qui portent les stigmates de cette prescription.

Après plusieurs tentatives de fécondation in vitro (FIV), Stéphanie Chevallier se résout à son infertilité. Elle entame alors des poursuites contre UCB Pharma, qui a tardé à rendre publics ces effets secondaires lourds. C’est le début de 10 ans de procédures judiciaires, entre victoires et appels. Car ce dossier présente une particularité : la plaignante ne dispose pas des ordonnances pour prouver que le Distilbène a bien été prescrit à sa mère. De plus, sa malformation n’est pas typique d’une exposition au médicament. Son utérus n’est pas formé en Y ou en T.

Un fonds d’indemnisation

Ce 15 octobre, pourtant, la cour d’appel de Versailles a établi un lien entre l’hormone de synthèse et l’infertilité de Stéphanie Chevallier. « Cette décision peut être la porte ouverte à toutes les femmes qui n’ont pas de documents pour prouver leur exposition au DES mais dont la pathologie n’a pas d’autre cause et même si elles n’ont pas d’anomalies caractéristiques », se félicite son avocate, Maître Martine Verdier, interrogée par l’AFP.

Les dossiers sont nombreux : entre 1948 et 1977, le Distilbène a été largement prescrit. Plus de 200 000 femmes l’ont reçu. Or, une étude a montré que le médicament provoque des effets secondaires sur deux générations. Les enfants exposés in utero sont plus à risque de certains cancers (sein, vagin, etc). Lorsqu’ils ne sont pas stériles, leur propre descendance est à risque de malformations des voies génitales et d’autres organes, dont l’œsophage. Voilà qui laisse augurer de nombreuses poursuites à l’avenir.

La présidente de l’association Les Filles DES l’a sans doute compris. Elle se bat à présent pour obtenir la création d’un fonds d’indemnisation pour toutes les victimes potentielles du Distilbène.