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Près de 10 000 morts

Choléra : l'ONU admet sa responsabilité en Haïti

Par Julian Prial

Pour la première fois depuis 2010, l'ONU reconnaît timidement qu'elle a pu être à l'origine de la réintroduction du choléra à Haïti, causant près de 10 000 morts.

Save The Children/REX/REX/SIPA
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« C'est une victoire pour le peuple », s'est exclamé Mario Joseph, à la tête du bureau des avocats internationaux. Adjoint du porte-parole du secrétaire général des Nations-Unis, Farhan Haq, a affirmé par email qu'au « cours de l'année dernière, l'ONU s'est convaincue qu'elle doit se pencher sur son implication dans le déclenchement de l'épidémie et les souffrances des victimes affectées par le choléra ».

En Haïti où le drame s'est produit il y a six ans, l'annonce a fait l'effet d'une bombe. Surtout que Farhan Haq ajoute qu'une nouvelle stratégie pour endiguer la maladie serait rendue publique dans les deux prochains mois.
Jusqu'à présent, l'ONU avait toujours nié bec et ongles toute responsabilité, contestant la validité des rapports la mettant en cause et se réfugiant derrière son immunité diplomatique, selon un article du New York Times publié ce jeudi.

Des soldats népalais à l'origine de l'infection 

Dans cette histoire, tout commence en 2010, peu de temps après le violent tremblement de terre de janvier à Haïti. En octobre, des casques bleus sont stationnés au nord de la capitale Port-au-Prince, dans un camp où les installations sanitaires sont défaillantes. 1 075 soldats népalais, porteurs de la bactérie du choléra, se trouvent parmi eux dans le cadre de la mission pour la stabilisation "Minustah". 
D'après une recherche de la célèbre Université de Yale (Connecticut), la contamination trouve son origine dans la négligence d'un sous-traitant local qui aurait mal désinfecté la fosse septique de la base.

Rosalyn Chan, principal auteur des travaux, racontait cette année-là sur RFI : « Notre étude a montré qu’il y a eu d’importantes négligences dans le traitement des eaux usées du camp des soldats népalais. Il y a eu une fuite vers la rivière et c’est ce qui a contaminé les ressources en eau. Alors oui ce n’était pas intentionnel, mais les Nations unies auraient dû faire plus attention ». Car, la bactérie « Vibrio cholerae » s'est alors retrouvée dans un affluent du plus grand fleuve d’Haïti, l’Artibonite, dans lequel la majorité des Haïtiens s’approvisionnent en eau, pour se laver et pour boire.
 

La plus importante épidémie de choléra 

Résultat, alors qu’aucun cas de choléra n’avait été détecté dans ce pays depuis un siècle, ces casques bleus népalais seraient, selon cette étude, à l’origine de « la plus importante épidémie de choléra au monde ». 
Les chiffres de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) indiquent que dans les deux premiers mois de l'épidémie, plus de 3 000 personnes seraient décédées des causes de cette maladie. Et le bilan s'élèverait aujourd'hui à près de 10 000 morts.

 

La bataille continue pour les associations 

« Les Nations unies doivent faire suivre cette annonce d'actions, comprenant des excuses publiques, l'établissement d'un plan pour verser des compensations aux victimes qui ont tant perdu et pour s'assurer que le choléra soit éliminé d'Haïti à travers de solides investissements dans les infrastructures d'eau et d'assainissement », a commenté Beatrice Lindstrom, de l'Institut pour la justice et la démocratie en Haïti, qui a également porté plainte contre l'organisation.
« Nous allons continuer à nous battre jusqu'à ce que cela soit fait », a-t-elle précisé dans le communiqué émis par les organisations de défenses des victimes.

« Il est grand temps pour l'ONU de bien faire et de prouver au monde que "les droits de l'homme pour tous" signifie pour les Haïtiens aussi », conclut pour sa part Mario Joseph. Mais cette demande de réparation financière risque d'être à nouveau déboutée par l'ONU. Le porte-parole adjoint du secrétaire général Ban Ki-moon a en effet précisé jeudi que « la position juridique de l'ONU n'a pas changé sur cette affaire ».