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Inné ou acquis ?

Évolution : la culture permet une adaptation plus rapide que la génétique

Par Charlotte Arce

Selon une nouvelle étude américaine, la culture permettrait aux humains de s’adapter à leur environnement et à surmonter les difficultés, mieux et plus rapidement que la génétique.

Pict Rider/iStock
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Si les comportements humains peuvent aussi être dictés par les gènes, la culture devient de plus en plus prédominante pour expliquer leur évolution.
Cela s'explique par une transmission plus rapide et plus souple des connaissances par l'expérience que par les gènes.
La culture du groupe influence aussi de plus les comportements humains : la collaboration, la coopération et l'apprentissage social ne sont pas dus aux gènes, mais bien à la culture, qui est transmise par le groupe.

En matière d’évolution humaine, l’acquis serait-il plus fort que l’inné ? Alors que les chercheurs se sont longtemps demandé si le comportement humain est déterminé par la génétique ou par l'expérience acquise, une nouvelle étude vient clore une bonne fois pour toutes le débat.

Dans une étude publiée dans les Proceedings of the Royal Society B, la revue phare de recherche biologique de la Royal Society de Londres, des chercheurs de l’université du Maine (États-Unis) expliquent que la culture (c’est-à-dire les connaissances, les pratiques et les compétences acquises) dépasse la valeur des gènes pour aider les humains à s’adapter à leur environnement et surmonter les difficultés qu’ils pourraient rencontrer. Ils appellent cela une "transition évolutive spéciale".

L’apprentissage plus rapide que les gènes

Dans leurs travaux, les scientifiques Tim Waring et Zach Wood expliquent que la culture a longtemps été un facteur sous-estimé de l’évolution humaine. Cela est notamment dû aux travaux de Charles Darwin -et plus récemment de l'éthologue Konrad Lorenz- qui, au début du XXe siècle, a étudié des animaux vivant dans leur milieu naturel. En les voyant évoluer sans interférer dans leur environnement, il en a conclu que les animaux "savaient" instinctivement reproduire des tâches complexes. C’est le cas, par exemple, des oiseaux qui construisent leur nid, de castors construisant des barrages ou de loups chassant en meute.

Pour ces scientifiques, la culture, l'éducation et l'expérience personnelle étaient moins importants que les comportements innés, qui dépendent du bagage génétique de l'espèce. Cette nouvelle étude affirme le contraire. Selon ses auteurs, la culture aide les gens à s'adapter à leur environnement et à relever les défis de la survie et de la reproduction plus efficacement que les gènes. Et pour cause : le transfert de connaissances est plus rapide et plus souple que celui des gènes.

"La culture est un mécanisme d'adaptation plus puissant pour plusieurs raisons, explique le Pr Waring. Elle est plus rapide : le transfert de gènes ne se produit qu'une fois par génération, alors que les pratiques culturelles peuvent être rapidement apprises et fréquemment mises à jour. La culture est également plus souple que les gènes : le transfert de gènes est rigide et limité à l'information génétique de deux parents, tandis que la transmission culturelle repose sur un apprentissage humain souple et effectivement illimité, avec la possibilité d'utiliser les informations de pairs et d'experts bien au-delà des parents. Par conséquent, l'évolution culturelle est un type d'adaptation plus fort que la génétique ancienne."

Des humains de plus en plus culturels et de moins en moins génétiques

Selon les deux auteurs, les humains sont une "espèce unique" car ils évoluent "à la fois génétiquement et culturellement". Mais, au fil du temps, "nous devenons de plus en plus culturels et de moins en moins génétiques".

Ainsi, si la combinaison de la culture et des gènes est à l'origine de plusieurs adaptations clés chez les humains, comme la réduction de l'agressivité, les tendances à la coopération, les capacités de collaboration et la capacité d'apprentissage social, les adaptations humaines sont de plus en plus souvent guidées par la culture, même si elles nécessitent l'intervention des gènes.

Pour preuve, les évolutions humaines axées sur le groupe. Des facteurs tels que la conformité, l'identité sociale et les normes et institutions partagées sont le fait de la culture, et non de la génétique. Par conséquent, la concurrence entre les groupes culturellement organisés favorise les adaptations telles que les nouvelles normes de coopération et les systèmes sociaux qui aident les groupes à mieux survivre ensemble.

"À très long terme, nous suggérons que les humains évoluent d'organismes génétiques individuels vers des groupes culturels qui fonctionnent comme des superorganismes, semblables aux colonies de fourmis et aux ruches d'abeilles", avance le Pr Waring. La métaphore de la "société en tant qu'organisme" n'est finalement pas si métaphorique que cela. Ce constat peut aider la société à mieux comprendre comment les individus peuvent s'intégrer dans un système bien organisé et mutuellement bénéfique", conclut-il.

dépasse la valeur des gènes pour aider les humains à s’adapter à leur environnement et surmonter les difficultés qu’ils pourraient rencontrer