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Etude texane

Les viandes grillées augmentent le risque de cancer du rein

Par Audrey Vaugrente

Mieux vaut éviter les barbecues à répétition : ce mode de cuisson est associé à une augmentation du risque de cancer du rein. Il en va de même pour la cuisson à la poêle.

SIERAKOWSKI/ISOPIX/SIPA

Ils ont la réputation de manger leur viande bouillie. Les Anglais auraient-ils tout compris ? Une étude parue dans Cancer associe les régimes riches en viandes rouges et blanches à un risque accru de cancer du rein. Et la manière de cuire ces aliments a son rôle dans cette association, expliquent les auteurs : les températures très élevées favorisent l’émission de produits cancérigènes.

Une équipe du Centre de lutte contre le cancer MD Anderson à l’Université du Texas (Etats-Unis) a comparé les habitudes alimentaires de 659 personnes chez lesquelles un carcinome rénal a été récemment diagnostiqué, à celles de 699 personnes en bonne santé. « Le rein est un organe actif sur le plan biochimique qui contribue de manière significative au métabolisme des xénobiotiques (molécules chimiques polluantes ou toxiques extérieures à l’organisme, ndlr), il est donc exposé à de plus hautes concentrations de produits cancérigènes que les autres organes », expliquent les auteurs.

Poêle et barbecue à haut risque

Les données indiquent que les patients atteints d'un carcinome rénal consommaient davantage de viandes rouges ou blanches que les contrôles. Une association qui pourrait s’expliquer par le mode de cuisson de la viande : les hautes températures, la poêle ou le barbecue favorisent l’émission de substances cancérigènes. Parmi ceux cités dans l’étude, des amines hétérocycliques ou des hydrocarbures aromatiques.

« Le poulet qui est très fortement grillé, qui est souvent consommé en barbecue, apporte énormément d’acides hétérocycliques du type PhIP », illustre Fabrice Pierre, responsable de l’équipe Inra (1) « Prévention et promotion de la cancérogénèse par l’alimentation » à Toulouse (Haute-Garonne), contacté par Pourquoidocteur. Le chercheur souligne cependant que le fer contenu dans la viande (surtout la rouge) joue un rôle dans le processus carcinogène, quel que soit le mode de cuisson.

Ecoutez...
Fabrice Pierre, chercheur à l’Inra : « La cuisson au barbecue génère des composés cancérogènes avérés pour l’homme. Mais une fois qu’on a dit cela, on sait que le fer de la viande est responsable de l’effet promoteur. »

 

Des variations génétiques

Une forte consommation de quinolaxine (MeIQx) double presque le risque de cancer du rein (+95 %). Une autre amine hétérocyclique (PhIP), là aussi consommée en excès, est associée à une hausse de 54 % de la probabilité de développer un carcinome. L’effet est particulièrement marqué chez les fumeurs.
Les chercheurs mettent aussi en évidence des variants génétiques qui sont susceptibles d’accentuer ces effets néfastes de l’alimentation. Deux variations sont associées de manière significative avec une augmentation du risque.

« C’est une étude de plus, elle est intéressante, mais il ne faut pas se baser sur cette seule publication pour affirmer que le risque est avéré », tempère Fabrice Pierre. En effet, le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) a publié une monographie consacrée aux viandes il y a peu. Elle n’a conclu à un risque cancérigène « probable » que dans le cas du cancer colorectal... et pour certaines viandes seulement.

Par ailleurs, il est possible de prévenir les effets délétères de la viande. « On a montré dans une grande cohorte que si on a un régime suffisamment riche en antioxydants, on est protégé contre l’effet délétère du fer qu'elle contient, explique Fabrice Pierre. Dans la cohorte E3N, les femmes qui mangent beaucoup de charcuterie et de viande ont un risque d’adénome colique supérieur. Mais ce risque est normalisé lorsqu’elles ont un régime riche en antioxydants. » Mais pour obtenir un effet protecteur, encore faut-il que les recommandations nutritionnelles atteignent tout le monde. Or, selon le chercheur, c'est encore loin d'être le cas.

Ecoutez...
Fabrice Pierre : « La recommandation nutritionnelle a un défaut : elle est écoutée par les catégories socio-professionnelles supérieures. Mais les CSP inférieures ne les intègrent pas. »

 

C’est tout le problème soulevé par de telles études : elles mettent en évidence des risques qui peuvent être prévenus par l’adoption d’une alimentation plus saine. Mais un panier plus équilibré revient souvent plus cher en caisse. C’est là que se creusent les inégalités de santé.

 

(1) INRA : Institut national de recherche en agronomie

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