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L'avis de l'experte

Infidélité : "Je ne suis pas convaincue que toute vérité soit bonne à dire, ni à entendre "

S'il est particulièrement difficile de généraliser les situations que les couples peuvent rencontrer, il est parfois possible de décrire quelques schémas. C'est le cas pour l'infidélité. Des motivations qui poussent à l'adultère, à l'idée d'une reconstruction en passant par le questionnement qui entoure la révélation, Claire Alquier, sexologue et thérapeute de couple, répond à nos questions.

Infidélité : \ Drazen Zigic/iStock

  • Publié le 12.06.2021 à 10h10
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- Face aux autres "torts" qui peuvent exister au sein d'une relation, l'infidélité est celui qui tend à être le plus diaboliser. Pensez-vous qu'il faudrait la dédramatiser ?

Claire Alquier : Je suis assez d'accord sur le principe, mais, lorsque l'on parle de fidélité, on fait appel à des valeurs personnelles : c'est difficile d'affirmer à quelqu'un que les siennes ne sont pas justifiées. Ceci étant dit, il n'est pas incompatible d'avoir une fidélité affective ou amoureuse et une non exclusivité sexuelle. En revanche, ce que l'on place derrière est le nerf de la guerre : il s'agit de la question du contrat de base et des règles qui sont posées. À partir du moment où les limites sont clairement identifiées, il n'y a pas d'infidélité car il n'y a pas de mensonge. Le "problème" de l'adultère, c'est que l'on sous-entend qu'il ya une trahison de la valeur de la fidélité,

On se rend compte que beaucoup de personnes n'en parlent pas avec leur partenaire : certains vont s'accorder des libertés, d'autres pas… En somme, chacun va faire un petit peu à sa sauce, et c'est là que la situation peut devenir compliquée. Pour "dédramatiser" l'infidélité, il faut déjà travailler sur ce dont il est question, sur ce qui est important pour l'autre. En bref, avant toute chose, il est intéressant de clarifier le contrat de départ, pour que l'on joue avec les mêmes règles.

- Sans tomber dans la généralisation, peut-on concevoir différents grands schémas dans le passage à l'acte ? 

Oui, même si je n'ai pas envie de dire qu'il y aura infidélité car tel ou tel évènement s'est produit. Ce qui est sûr, c'est que la vie de couple à moyen et à long terme peut être assez complexe, voire inégale, et mener à un délitement de l'érotisme et de la sexualité. Ainsi, la lassitude, le manque d'entretien, ou encore la perte de désir, peuvent générer des passages à l'acte. De la même manière, la frustration sexuelle est souvent évoquée comme motif d'adultère, ce qui rejoint l'envie de nouveauté chez certains, d'aller voir si l'herbe est plus verte ailleurs.

Même sans cette "curiosité", il y a le cas où "l'occasion fait le larron", avec certains contextes propices, perçus comme davantage permissifs, comme des vacances ou un déplacement professionnel. Je pense également à la parentalité nouvelle, ou à une rencontre inattendue ; en somme, un changement dans la vie quotidienne du ménage peut avoir des répercussions sur un éventuel adultère.

- Que conseillez-vous à une personne qui vient vous consulter parce qu'elle a été infidèle ? 

C'est toujours compliqué de dire ce qu'il faut faire ou pas, je ne prêche pas la bonne parole. Mais, si la personne consulte, il convient de questionner le motif de sa venue. Par exemple, est-ce qu'une culpabilité énorme la ronge ? Auquel cas, effectivement, il faut que l'on travaille dessus pour voir comment la dépasser, peut-être en le disant à l'autre, ou pas. Par ailleurs, il est possible qu'une personne vienne parce qu'elle a mis le doigt sur quelque chose qui lui paraît intéressant et qu'elle aimerait l'aborder avec sa ou son partenaire. J'ai déjà eu des consultations individuelles à ce sujet, de la part de patients qui souhaitaient discuter de la question de l'ouverture de leur couple, mais avaient peur, ne savaient pas comment le faire sans compromettre leur relation. Bien sûr, tout se travaille, notamment avec la communication.

- Prônez-vous la transparence à tout prix ?

Non, je ne suis pas convaincue que toute vérité soit bonne à dire, ni à entendre, surtout si elle peut détruire un couple qui n'a aucune raison de dysfonctionner, hormis un incident de parcours. Cela peut être très compliqué de se remettre d'une infidélité que l'on n'avait pas perçue, et qui va peut-être venir tout "fracasser" : il ne faut pas l'oublier. Je ne dis pas que l'on doit se mentir, mais je pense qu'il faut évaluer la situation dans laquelle on se trouve, ainsi que l'impact que peut avoir une telle révélation sur l'autre, et la raison qui nous pousse à vouloir la faire. Surtout, une fois que c'est dit, il faut s'interroger sur ce que l'on en fait ensuite et comment on reconstruit le couple après.

- Comment se remettre d'une infidélité ? 

Cela dépend de si l'autre a détruit une valeur qui altère la confiance à jamais. Avec les couples que je reçois, on travaille sur la possibilité de réparer ou non ce qui a été brisé. Je mise sur la communication, afin d'appréhender ce que cela signifie pour l'autre, ainsi que pour comprendre la raison qui a mené à cette situation, si un contexte s'est installé et a favorisé le passage à l'acte. Je pense qu'il faut pouvoir entendre sa souffrance – aussi bien de la personne trompée que de celle qui a été infidèle – mais aussi accepter que la personne à l'origine de l'adultère puisse s'excuser. À mon sens, il est possible de s'en remettre, mais cela demande un véritable travail d'équipe et de couple, main dans la main. 

- Est-il possible de faire d'un adultère un évènement "positif" pour le couple ?

Cela dépend des situations et des individus, mais c'est possible, oui. J'ai déjà assisté à des infidélités qui ont fait évoluer le couple. Par exemple, chez des personnes à qui l'adultère explose un petit peu au visage, cela peut donner lieu à des discussions intéressantes sur des sujets qui n'avaient jamais été abordés car ils ne semblaient pas importants. Aussi, dans certains cas, on pensait être d'accord sur des principes alors que ce n'était pas dit. Quoiqu'il en soit, il n'y a pas de bonne ou de mauvaise manière de faire. Ce qui est sûr, c'est que, sur ces questions, la communication est la clé.

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