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Communiqué

Le CNRS accable le chercheur toulousain qui aurait trouvé des impuretés dans le Levothyrox

Enième rebondissement dans l'affaire du Levothyrox. Le CNRS et l'université de Toulouse III ont annulé la conférence de presse du chercheur qui pensait avoir détecté une "impureté" dans la nouvelle formule du Levothyrox. Motifs : ses recherches "n'ont pas respecté la déontologie scientifique" et ses résultats n'ont pas été "validés par le processus d'évaluation" de la "communauté scientifique".

Le CNRS accable le chercheur toulousain qui aurait trouvé des impuretés dans le Levothyrox Shidlovski /iStock


  • Publié le 05.10.2018 à 18h50
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  • Mise à jour le 06.10.2018 à 00h06
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La conférence de presse qui devait avoir lieu ce vendredi sur "les résultats annoncés par Jean-Christophe Garrigues, ingénieur de recherche au CNRS" au sujet des impuretés qui auraient été trouvées dans la composition de la nouvelle formule du Levothyrox, a été annulée par le CNRS et l'université de Toulouse III Paul Sabatier, dans la mesure où ils n'ont pas été validés "par le processus d’évaluation par les pairs propre à la communauté scientifique". Dans un communiqué fraîchement envoyé à la presse, le CNRS considère que les résultats du chercheur toulousain "n'ont pas respecté la déontologie scientifique indispensable pour valider toute donnée scientifique" et  "ne constituent pas en l'état actuel des faits scientifiques".

Un conflit d'intérêt possible

"De plus, bien que Jean-Christophe Garrigues ait effectué ces mesures en utilisant les équipements du laboratoire des Interactions Moléculaires et Réactivités Chimiques et Photochimiques (IMRCP), celles-ci ne sont liées en aucune façon à une quelconque activité de recherche de son équipe ou du laboratoire", précise le communiqué. Elles ont été subventionnées par l’Association française des malades de la thyroïdes (AFMT). "En tant qu’employeur, le CNRS considère que l’ingénieur de recherche n’a pas respecté la déontologie scientifique et que ces analyses ont été réalisées hors conventionnement".

Les deux institutions vont jusqu'à se désolidariser des recherches menées par le chimiste : "Ni les tutelles, le CNRS et l’université Toulouse III Paul Sabatier, ni l’IMRCP n’ont été impliqués dans les analyses conduites par Jean-Christophe Garrigues, dont ils n'étaient pas même informés". 

Début d'une polémique infondée

Si les effets secondaires indésirables provoqués par la nouvelle formule, modifiée en février 2017, sont désormais bien connus (perte de cheveux, fatigue, dépression…), on ignorait encore ce qui les provoquait exactement. Différentes hypothèses avaient été invoquées par l’Association française des malades de la thyroïde (AFMT) : présence d'acide citrique qui pourrait dénaturer la levothyroxine, présence de nanoparticules, présence de dextrothyroxine, présence d'impuretés. Ce jeudi 4 octobre, un chimiste toulousain a affirmé avoir mis le doigt sur le coupable. En effet, à la demande de l’Association française des malades de la thyroïde (AFMT), Jean-Christophe Garrigues a étudié les résultats d’une synthèse des recherches sur la composition du comprimé publiée par l’ANSM.

C'est "en se penchant de plus près sur les chromatogrammes (méthode d’analyse qui permet de séparer les constituants d’un mélange)", que le scientifique découvre un important pic d’impuretés dans la nouvelle formule du Levothyrox, alors qu'il n'existait pas dans l'ancienne, selon le site Mediacités. Ce dernier "alerterait le moindre scientifique. Pourquoi l’ANSM n’a-t-elle pas poussé plus loin l’analyse de cet élément qui devient forcément inquiétant lorsque l’on est dans un contexte de crise sanitaire ?", s’interroge Jean-Christophe Garrigues auprès du site d’investigation.

Des accusations de changement de la composition

Le chercheur affirme que cet élément chimique est présent à plus forte dose dans les médicaments distribués en 2017 que dans ceux achetés à l'été 2018 en pharmacie. "Ce qui laisse entendre que la composition du Levothyrox aurait été améliorée depuis les débuts de la commercialisation de la nouvelle formule en 2017", interpelle-t-il. "Nous n’avons pas le détail du protocole d’analyse suivi par l’ANSM et nous ne pouvons par conséquent pas interpréter ces pics. Le laboratoire Merck affirme n'avoir rien changé à la formule. depuis sa mise sur le marché en mars 2017.

Pourtant, se défend le laboratoire Merck, "il est normal d’observer dans ce type d’analyse différents pics, qui sont inhérents à la méthode et ne sont pas de nature à remettre en cause la qualité du produit". Ce n'est pas la première fois qu'un scientifique pense avoir découvert une faille dans ce médicament. En mai dernier, un ancien chercheur au laboratoire Merck estimait que l’acide citrique, présent dans la nouvelle formule du traitement, influait sur son efficacité et serait à l'origine des effets indésirables. Puis, cela a été les nanoparticules, la dextrothyroxine et les impureté. Le laboratoire Merck dénonce des "allégations sensationnalistes et sans preuve".

L'ANSM, enfin, a publié sur son site le jeudi 4 octobre une mise à jour de la note de synthèse de juillet 2018 : "Les analyses chromatographiques réalisées pour la recherche de dextrothyroxine démontrent la présence de quantités de lévothyroxine comparables entre l’ancienne et la nouvelle formule, qui n’est donc pas sous-dosée. Elles montrent également la présence de dextrothyroxine uniquement à l’état de traces dans la nouvelle comme dans l’ancienne formule, ce qui est tout à fait conforme aux spécifications attendues. L’ANSM précise que ces chromatogrammes permettent uniquement d'identifier la présence de dextrothyroxine et de lévothyroxine et ne peuvent générer aucune autre interprétation. L’ensemble des contrôles réalisés dans les laboratoires de l’ANSM ont confirmé la bonne qualité de la nouvelle formule du Levothyrox."

Rappel des faits

Début septembre, 42 victimes du Levothyrox ont assigné le laboratoire Merck devant le tribunal de grande instance de Toulouse. Ils réclament 15 000 € au titre du préjudice d’anxiété et la même somme pour le préjudice moral. Ils demandent également le maintien de la commercialisation de l’ancienne formule du Levothyrox et la réalisation d’une expertise pour pouvoir fixer le préjudice corporel subi par les malades. L’Association française des malades de la thyroïde (AFMT) est très active mais cette dernière péripétie ne vient pas clarifier la situation.

Pour mémoire, en février 2017, sur demande de l’ANSM qui voulait garantir la stabilité du traitement dans le temps, Merck avait changé la composition de "l'excipient" (l'enrobage de la molécule active pour en faire un comprimé) et avait remplacé le lactose qui enrobait l’hormone thyroïdienne par du mannitol. Mais peu après avoir commencé leur nouveau traitement, de nombreux malades se sont plaint de fatigue, de troubles dépressifs, de maux de tête, de douleurs articulaires, de pertes de cheveux ou encore d’insomnie.

En tout, 17 000 cas d’effets secondaires ont été recensés. Parmi eux, 5062 ont été classés comme graves et 14 décès ont été comptabilisés par l'ANSM, sans qu’un lien direct avec la nouvelle formule puisse être officiellement établi. La seule chose qui soit sure, c'est que de nombreux malades se plaignent des mêmes maux avec la nouvelle formule alors que leur bilan hormonal est normal et que ces trouble disparaissent lors du remplacement par l'ancienne formule du levothyrox ou par un autre médicament à la levothyroxine.

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