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Handicap

Les lames des sprinters amputés des jambes ne les font pas courir plus vite

Pour la Fédération internationale d’athlétisme, les prothèses en carbone sont une aide pour les coureurs amputés. Des scientifiques prouvent le contraire : elles ne les avantagent pas par rapport aux athlètes valides.

Les lames des sprinters amputés des jambes ne les font pas courir plus vite sportpoint/istock




L'ESSENTIEL
  • Cette étude rassemble le plus grand échantillon de données jamais collecté auprès de coureurs d'élite ayant subi une amputation bilatérale des jambes.
  • La capacité aérobie correspond à la capacité des poumons, du cœur et de l'appareil circulatoire à transporter efficacement l'oxygène aux muscles pendant l'activité physique.
  • Les auteurs encouragent d'autres chercheurs à publier plus de données pour permettre au public de se forger une opinion éclairée sur le sujet.

En 2012, l’athlète sud-africain Oscar Pistorius marque l’histoire : il devient le premier athlète handicapé à participer aux Jeux Olympiques. Surnommé "Blade runner", le coureur parvient à se maintenir jusqu’aux demi-finales de 400 mètres face aux athlètes valides. Mais les prothèses en carbone qui permettent au sportif de courir sème le débat dans le milieu de l’athlétisme. Après cette course d’Oscar Pistorius, l'Association internationale des fédérations d’athlétisme décide qu'à l'avenir, les athlètes utilisant des "aides mécaniques" doivent prouver que leurs lames ne leur donnent pas un avantage concurrentiel. Des scientifiques américains l’ont fait pour eux, dans une étude parue dans Royal Society Open Science.

Une étude sur tapis roulant et sur piste 

Blake Leeper, un athlète né sans jambes, a été déclaré inéligible pour les Jeux olympiques de Tokyo l'année dernière en raison d'un "avantage présumé". Il avait précédemment participé à cette recherche. En 2018, il s’est rendu dans le laboratoire de biomécanique d’Alena Grabowski, autrice principale de l’étude, pour une série de tests. Cet été-là, il a couru le 400 mètres en 44,42 secondes, battant le record d’Oscar Pistorius. Sur le tapis roulant et la piste, les chercheurs ont mesuré l'accélération de Blake Leeper hors des blocs de départ, la vitesse maximale le long des lignes droites et autour des courbes, la vitesse à la capacité aérobie et l'endurance au sprint. Pour ces différentes mesures, ils ont collecté les données disponibles des amputés bilatéraux d'élite et les ont mises en parallèle avec celles d’athlètes non-amputés.

Aucun avantage pour les coureurs équipés de lames

En comparant les données de performance de Blake Leeper, d’Oscar Pistorius et de six autres sprinteurs amputés bilatéraux, avec celles des meilleurs sprinteurs non-amputés du monde sur cinq mesures de performance, la recherche n'a trouvé aucun avantage aux athlètes courant avec des lames en carbone. "De nombreuses hypothèses ont été émises sur l'utilisation de prothèses et de performances sans données pour les étayer, explique Alena Grabowski. Avec cette étude, nous montrons que l'utilisation de prothèses de course n'apporte aucun avantage compétitif sur 400 mètres par rapport aux jambes biologiques." Au contraire, les athlètes amputés sont 40% plus lents à la sortie des blocs de départ, en comparaison aux autres. Ils avaient une vitesse 19 % plus lente à la capacité aérobie et étaient 1 à 3 % plus lents dans les courbes par rapport aux non-amputés. "Nous avons constaté qu'aucun athlète avec des jambes prothétiques n'a jamais mieux performé que les athlètes d'élite non amputés dans des expériences en laboratoire dans toute mesure liée à la performance de sprint", précise le co-auteur Owen Beck.

Des résultats ignorés par la Fédération internationale d’athlétisme 

En 2020, les conclusions de cette étude ont été présentées au Tribunal arbitral du sport, mais cela n’a pas permis à Blake Leeper de participer aux événements du World Athletics, le nom actuel de la Fédération internationale d’athlétisme. Elle a estimé que les prothèses le grandissaient trop : elles lui offrent une longueur de jambes de 104 cm. Les auteurs de cette étude précisent pourtant qu’ils ont précédemment démontré que la taille ne fait aucune différence en ce qui concerne la vitesse de sprint maximale. Avec cette nouvelle recherche, ils ont l'espoir que la World Athletics réexamine les données disponibles sur ces prothèses. "J'espère que cela amènera les gens à vraiment remettre en question les règles mises en place qui empêchent les athlètes handicapés de concourir, même lorsqu'ils ont montré, grâce à la science, qu'ils peuvent concourir de manière équitable", confie Alena Grabowski. 

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