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QUESTION D'ACTU

L’interview du week-end

Endométriose : «Les femmes atteintes ne sont pas assez prises en charge concernant leur sexualité»

La gynécologue obstétricienne Alix Sesques livre ses précieux conseils pour améliorer la vie sexuelle des femmes atteintes d’endométriose.

Endométriose : \ Nattakorn Maneerat / istock.




Pourquoi docteur - Qu’est-ce que l’endométriose ?

Alix Sesques - L’endométriose est une maladie complexe qui fait que le tissu de l’endomètre de la muqueuse utérine va migrer à d’autres endroits du corps où il n’est pas censé être. Cela provoque une inflammation de l'organisme et des douleurs chroniques.

Les douleurs sexuelles liées à l’endométriose

En quoi cette maladie impacte-t-elle la vie sexuelle des femmes qui en souffrent ?

L’endométriose peut parfois provoquer des douleurs pendant les rapports, car le tissu qui sort de l’utérus et saigne régulièrement peut se mettre à des endroits proches des organes sexuels et du vagin.

Toutes les femmes atteintes d’endométriose souffrent-elles de ce genre de problème ?

Non, mais je dirais que huit de mes patientes atteintes d’endométriose sur dix souffrent pendant les rapports sexuels. C’est donc un problème courant qu’il est important de dépister en posant clairement et systématiquement la question aux patientes.   

Les douleurs sexuelles liées à l’endométriose sont-elles importantes ?

Cela dépend vraiment d’une femme à l’autre, car chaque patiente développe une forme particulière d’endométriose. Cela va de la simple gêne à une impossibilité complète d’avoir des rapports.

Sexualité et endométriose : comment limiter les douleurs 

Concrètement, que leur conseillez-vous pour améliorer cette situation au quotidien ?

Il faut éviter les positions douloureuses une fois qu’on les a repérées et qu’on a identifié à quel moment elles apparaissent (ce qui est souvent lié au cycle menstruel, NDLR). Généralement, je conseille à mes patientes de se mettre au-dessus, car cela leur permet de maîtriser l’apparition éventuelle de la douleur. Je les invite également à moins se concentrer sur les pénétrations profondes en privilégiant d’autres types de sexualités. 

Il faut aussi pallier les soucis de lubrification à l’entrée du vagin lorsqu’ils se présentent en utilisant du gel et en prenant le temps de bien faire monter l’excitation avant le rapport.

Enfin, j’incite les femmes que je reçois à communiquer avec leur partenaire sur leur maladie et ses conséquences sexuelles, afin de lui permettre d’être attentif et compréhensif.

Et sur un plan plus médical ?

Le recours à la chirurgie ou à la contraception peut être efficace dans certains cas.

Sexualité et endométriose : qui consulter ? 

Qui faut-il consulter ?

Je pense que c’est le rôle du gynécologue, mais face au manque de professionnels de santé dans ce secteur, beaucoup n’ont malheureusement pas le temps et l’énergie de s’occuper de la sexualité de leurs très nombreuses patientes.

Dans ce cas-là, les sexologues, les sages-femmes, les kinésithérapeutes, les ostéopathes et les médecins généralistes peuvent aussi être de bons recours s’ils sont suffisamment formés (ce qui est loin d’être toujours le cas).

Et si jamais on sent que le retour du soignant n’est pas positif sur le sujet, je conseille de consulter quelqu’un d’autre, car il ne faut pas rester seule avec ses douleurs.

Un suivi psychologique peut-il être intéressant ?

Oui, notamment en cas d’anxiété, de vaginisme ou de douleurs fantômes.

En revanche, je pense que dans ces cas-là, il faut que nous soyons vigilants à ne pas faire comprendre aux patientes que leurs douleurs sont uniquement "dans leur tête" et bien mener avec chacune une approche physique et technique de leur sexualité en parallèle.

Comment réussir une consultation sur sa vie sexuelle ?

Du côté du soignant comme de la patiente, il ne faut pas hésiter à aller dans le détail, c’est-à-dire expliquer ou chercher à savoir à quel point cela fait mal, dans quelles positions, à quel moment, si cela amène à l’arrêt du rapport, s’il y a déjà une contraception, etc.

Il faut aussi avoir en tête que ce genre de consultation prend du temps, et que cela peut parfois nécessiter plusieurs rendez-vous pour que la malade se sente assez à l’aise et s’exprime.  

Davantage informer sur l’endométriose et la sexualité

Est-ce que les douleurs sexuelles peuvent vraiment disparaître une fois qu’elles sont bien prises en charge ?

Pas toujours, notamment en cas de la présence de nodule au fond du vagin. Dans ce cas précis, la contraception est inefficace et la chirurgie peut entraîner une cicatrice qui reste douloureuse (sans forcément éviter les récidives).

Les femmes atteintes d’endométriose sont-elles assez prises en charge concernant leur sexualité ?

Pas du tout. Je suis régulièrement effarée par le nombre de patientes qui arrivent dans mon cabinet totalement résignées au fait que leur sexualité a toujours posé problème.

Pourtant, il suffit quelquefois de pas grand-chose pour améliorer leur situation.

Que faudrait-il faire selon vous pour améliorer leur état ?

Comme le sujet est encore tabou, les Françaises devraient à mon sens être davantage informées sur l’endométriose et la sexualité, afin qu’elles comprennent que c’est une partie importante de leur qualité de vie globale dont il est possible de s’occuper. En ce sens, peut-être serait-il intéressant d’intégrer la dimension sexuelle dans les échelles actuelles d’évaluation du bien-être des patientes.

Il faudrait aussi développer un réseau de professionnels spécialisés dans ce genre de problématique sur tout le territoire, ce qui n’est pas encore le cas aujourd’hui. 

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